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Le samedi 23 avril 2022

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L’AÉCG est une menace pour les politiques d’approvisionnement et les services publics

L’auteur invité est Scott Sinclair, du Centre canadien de politiques alternatives.

Introduction de la version française du texte “Negotiating from Weakness – Canada-EU trade treaty threatens Canadian purchasing policies and public services”.

Négocier à partir d’une position de faiblesse est presque toujours une recette menant au désastre. C’est tout de même exactement ce que fait le Canada alors qu’il négocie une nouvelle entente commerciale avec l’Union européenne (UE). Dans l’Accord économique et commercial global (AÉCG), l’UE s’attaque directement à l’utilisation des politiques d’achat des gouvernements progressistes à l’échelle provinciale, territoriale et municipale et à divers services publics canadiens. Malheureusement, le gouvernement fédéral ne semble pas susceptible de défendre ces outils de développement importants.

Sauf quelques exceptions, les obstacles traditionnels au commerce entre le Canada et l’Union européenne sont déjà peu élevés. Les tarifs sont déjà bas, s’établissant en moyenne à moins de 3 % sur la plupart des principaux produits les plus commercialisés.

Les tarifs canadiens, par exemple, se situent en moyenne à moins de 6 %. Par conséquent, le principal objectif des négociations est les soi-disant « barrières non tarifaires » et les questions qui sont seulement liées périphériquement au commerce. Deux des plus importantes sont les marchés publics et les services publics.

À ce jour, le Canada a pris seulement des engagements limités face à l’accord commercial international couvrant l’approvisionnement au niveau infranational. L’accord entre le Canada et les États-Unis sur le Buy American (Acheter américain) conclu récemment exigeait que les provinces prennent des engagements face à l’approvisionnement en vertu des règles de l’Organisation mondiale du commerce pour la toute première fois. Les marchés publics sont souvent utilisés pour faire avancer des objectifs en matière de politiques plus vastes comme la protection de l’environnement, la création d’emplois à long terme, la promotion de salaires équitables et des conditions de travail décentes4, et pour aider les groupes marginalisés à obtenir des emplois et une formation. Les politiques progressistes sur les achats gouvernementaux, comme celles que l’on retrouve dans la Loi sur l’énergie verte de l’Ontario, permettent aux gouvernements d’agir dans les meilleurs intérêts de leurs citoyens.

L’absence d’engagements commerciaux infranationaux offre une flexibilité cruciale, non seulement pour que les municipalités et les provinces puissent utiliser l’approvisionnement comme outil pour le développement économique, mais également pour sauvegarder leur capacité à offrir et à réglementer les services locaux, y compris l’eau potable, l’élimination des déchets, l’électricité et d’autres services locaux essentiels.

Du point de vue de l’UE, des engagements profonds par les gouvernements infranationaux visant à couvrir l’approvisionnement, particulièrement les services, sont indispensables et menacent clairement la situation actuelle.

Dans le même ordre d’idées, le Canada a partiellement protégé les services publics des accords commerciaux internationaux comme l’ALÉNA. En vertu des accords commerciaux existants, le Canada a un système compliqué d’exclusions, de réserves et d’exemptions pour les soins de santé, l’éducation, les services de garde et les services sociaux. Ce système est déjà rempli de failles et offre seulement une protection partielle pour les services publics vitaux comme l’assurance-maladie. Étant donné qu’un bon nombre de ces protections s’appliquent aux paliers provincial et local, l’insistance de l’UE pour que les provinces soient couvertes directement menace ces protections.

La Commission européenne (CE), qui négocie des accords commerciaux internationaux au nom de l’UE, a initialement résisté aux propositions pour un ensemble global de négociations avec le Canada.

Le travail antérieur sur un Accord sur le renforcement du commerce et de l’investissement s’est terminé par un échec en 2005. Pour les Européens, deux questions ont retardé les pourparlers : 1) les fonctionnaires fédéraux canadiens étaient hésitants à s’engager sur des questions de compétence provinciale et 2) les Européens s’opposaient à la « sélection aléatoire » et insistaient sur une entente globale et ambitieuse, ou absolument aucune.

Le bureau du premier ministre, le premier ministre du Québec Jean Charest et des éléments clefs du monde des affaires ont cependant persisté à essayer de convaincre les Européens à s’engager dans de nouvelles négociations. Ils ont assuré les leaders politiques européens et la CE du soutien politique des autorités supérieures pour la conclusion d’une entente.

De manière significative, les Européens ont reçu des assurances directes de la plupart des premiers ministres provinciaux et du Conseil de la fédération que les gouvernements provinciaux seraient entièrement liés par l’accord conclu. À l’insistance des Européens, les provinces sont, pour la toute première fois dans le cadre de négociations pour un accord international, directement représentées à la table de négociation. Cette participation fera en sorte qu’il sera très difficile pour les provinces de résister aux pressions pour mettre pleinement en œuvre l’accord dans les secteurs de compétence provinciale, ce qui comprend la plupart des services.

L’hésitation initiale démontrée par la Commission européenne a maintenant été mise de côté. La CE met considérablement d’efforts et de ressources dans les pourparlers. Les plus grandes multinationales européennes et canadiennes sont pleinement engagées. Ainsi, les Européens sont maintenant dans une position forte pour faire pression pour l’adoption de leurs demandes de façon agressive. Les négociations pour l’AÉCG ont débuté en mai 2009, et une conclusion finale est prévue pour 2011.

La préoccupation que l’AÉCG pourrait impliquer une ouverture considérable des droits en vertu des accords commerciaux existants est accrue si on examine soigneusement la dynamique des négociations. L’UE est en tous sens la partie dominante de ces négociations. Le Canada est non seulement le partenaire le plus petit et le plus faible, mais le gouvernement conservateur est également le participant le plus démuni politiquement. Bien qu’Ottawa ait fait de l’AÉCG une pièce centrale de sa politique économique étrangère, l’UE pourrait se retirer de ces pourparlers en tout temps avec peu de conséquences politiques nationales. De plus, le gouvernement canadien actuel ne croit pas en l’utilisation de l’approvisionnement comme moyen d’intervention progressiste.

Pour sa part, le gouvernement conservateur s’est opposé de façon constante aux politiques du Achetez canadien et accueillerait favorablement des obligations en vertu d’accords commerciaux internationaux qui lieraient les gouvernements provinciaux et locaux.

L’UE a été claire que l’obtention d’un accès considérable à l’approvisionnement infranational est sa priorité numéro un. L’analyse du texte du nouvel accord et des documents connexes qui ont fui, accord qui aurait une plus grande portée que l’ALÉNA, démontre que l’UE n’agit pas dans le meilleur intérêt des Canadiens, mais dans le meilleur intérêt de ses multinationales.

Si les citoyens canadiens et leurs gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux restent silencieux et ne défendent pas avec vigueur leurs politiques d’approvisionnement, ce moyen d’intervention sera sacrifié de façon permanente. La capacité des gouvernements de fournir des services publics universels de grande qualité serait également érodée. Ce document traitera des raisons pour lesquelles on ne devrait pas laisser cela se produire.

On trouve le texte au complet, avec ses notes, sur le site Internet d’ATTAC-Québec

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