L’auteur invité est Jean-Robert Sansfaçon, éditorialiste au Devoir.
Coup sur coup, deux rapports indépendants critiquent la générosité excessive du régime de pension des élus fédéraux. En ces temps de compressions et de crise financière, les élus doivent cesser de se poser en victimes du jeu politique et revoir les privilèges qu’ils s’octroient eux-mêmes avant d’exiger des concessions de leurs fonctionnaires.
De tous les régimes de retraite à l’exception des régimes de chefs d’entreprises publiques et privées, c’est celui des députés et des sénateurs fédéraux qui est le plus généreux, voire le plus scandaleux.
Un régime de retraite, c’est le prolongement financier logique d’une carrière au cours de laquelle les salariés et leur employeur ont mis l’argent nécessaire de côté pour traverser la vieillesse sans chute dramatique du revenu. Or, dans le cas des députés fédéraux, c’est plutôt un pactole garanti pour quelques années de service public. Une façon habile de reporter jusqu’à 55 ans l’excédent non déclaré d’un salaire déjà élevé, à l’abri de l’impôt et du regard des contribuables qui devront payer la facture pendant plusieurs décennies.
Après avoir siégé pendant seulement deux mandats, un député fédéral touchera une rente pleinement indexée de 40 000 $ par année à partir de 55 ans. S’il a siégé 15 ans, la rente sera d’environ 75 000 $, et entre 100 000 $ et 150 000 $ s’il a occupé un poste de ministre ou de chef de l’opposition.
Pour avoir droit à sa rente, le député aura contribué 10 000 $ par année au régime, mais son employeur (les contribuables), 23 fois plus! Une rente de 40 000 $ contractée auprès d’un assureur lui aurait coûté près de 1 million de dollars… et non 80 000 $. Selon la Canadian Taxpayer Federation, un salarié ordinaire, du public ou du privé, devrait mettre 30 ans pour économiser l’argent nécessaire pour se procurer une rente équivalant à celle d’un député qui n’a siégé que six ans aux Communes!
Parmi les anomalies de ce régime, note l’économiste William Robson de l’Institut C.D. Howe, il y a le fait qu’Ottawa déroge à sa propre loi sur les régimes de retraite qui interdit de contribuer plus que 18 % du salaire admissible à la caisse retraite. Au-delà de ce pourcentage, il faut payer l’impôt. Dans le cas des députés, la contribution équivaut à plus de 50 % du salaire annuel.
Autre luxe du régime, il est pleinement indexé grâce à l’excellent rendement de la caisse fixé par décret à 10,4 % par année, et payé par le gouvernement, sans égard aux fluctuations du marché. Rendement comptable et théorique en fait puisqu’il n’y a même pas d’actif dans la caisse, la totalité des prestations étant versée chaque année à même le budget de l’État…
Les temps sont durs pour les régimes à prestations déterminées. Pourtant, voilà le seul type de régime en mesure d’assurer un revenu prévisible aux travailleurs à la retraite.
Les députés fédéraux doivent pouvoir participer à un tel régime qui serait ramené à des limites raisonnables et dont les prestations ne seraient pas accessibles avant l’âge de 65 ans au lieu de 55 ans. Un régime pleinement capitalisé dont les cotisations seraient fixées en fonction des rendements réels du marché comme n’importe quel autre régime. Il ne doit plus s’agir d’un pactole qui profite à l’abri de l’impôt et du regard des contribuables pendant des décennies.
Sans une telle réforme, ce gouvernement sera bien mal venu d’exiger des concessions de la part de ses propres employés, des sénateurs et des juges dont les régimes souffrent aussi d’obésité.
On peut lire le texte complet en allant sur le site du quotidien Le Devoir.
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