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Le samedi 23 avril 2022

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Le piège des « règles d’or »

L’auteur invité est Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives Economiques.

La généralisation de la règle d’or budgétaire, prévue par l’accord européen du 9 novembre, ne résoudra rien à la crise de l’euro. L’austérité budgétaire généralisée empêcherait au contraire toute politique de relance et menacerait la cohésion de la zone euro.

Le 9 décembre 2011, les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro se sont mis d’accord pour intégrer à leurs constitutions nationales des « règles d’or » prévoyant que le déficit budgétaire ne devrait pas à l’avenir excéder 0,5 % du PIB. Est-ce de nature à résoudre la crise de la zone euro ? Non, pas vraiment.

Tout d’abord cela ne règle en rien le problème immédiat de la zone : si la crise des dettes publiques s’est aggravée ces derniers mois, c’est surtout parce que la zone est en train de retomber en récession et que, dans un tel contexte, il est impossible de réduire l’endettement public. Au contraire celui-ci s’accroît rapidement comme l’illustre de façon spectaculaire le cas de la Grèce qui est en récession depuis trois ans maintenant. Or aucune mesure de nature à soutenir l’activité n’a été annoncée, ni même d’ailleurs envisagée, lors de ce sommet…

Au sein d’une Union monétaire il faut cependant en effet des règles communes. Avant l’euro, un Etat budgétairement laxiste voyait sa monnaie se déprécier et était amené à corriger le tir sous cette pression. En l’absence de cette menace, un Etat peut être tenté de laisser filer sa dette menaçant à terme la stabilité de la monnaie commune. Pour limiter ce risque, un pacte de stabilité et de croissance avait été mis en place en 1997, mais les règles qu’il fixait n’étaient pas associées à des contraintes très fortes. Ces contraintes ont cependant déjà été durcies en septembre dernier par des modifications du pacte de stabilité, mais les « règles d’or » pourraient en effet sembler de nature à rassurer encore plus sur la capacité des Etats de la zone euro à rembourser leurs dettes.

Cela supposerait cependant que ce soit bien le dépassement des limites fixées par le Pacte de stabilité constaté avant la crise qui nous a conduit dans les difficultés actuelles. Or ce n’est pas le cas : l’Irlande ou l’Espagne avaient été, avant la crise, de très bons élèves de ce pacte. Tandis qu’au contraire le déficit public de l’Allemagne a excédé la limite prévue des 3 % du PIB pendant sept des douze premières années d’existence de l’euro. Elle n’a de plus respecté le seuil de 60 % du PIB pour le stock de dette publique que pendant une année sur douze… Cela n’empêche pas que ce soit elle qui soit aujourd’hui considérée comme un exemple et non l’Irlande ou l’Espagne… Il y a manifestement erreur de diagnostic sur les causes de la crise.

Mais il y aussi erreur sur les remèdes apportés. Les règles d’or vont aggraver dans l’immédiat le biais très restrictif des politiques économiques qui pousse déjà l’Europe dans la récession et amènera dans le futur les Etats à adopter des politiques dites « procycliques » : pour respecter le seuil prévu d’un déficit qui n’excède pas 0,5 % du PIB, ils vont être amenés à couper dans leurs dépenses si un ralentissement de l’économie ampute leurs recettes. Ce qui va aggraver ledit ralentissement… Dans de nombreuses fédérations, et notamment aux Etats Unis, il existe bien des règles interdisant aux Etats fédérés de présenter des budgets en déficit. En France il est également interdit aux collectivités locales d’avoir des budgets de fonctionnement en déséquilibre. Mais dans ce cas, le niveau administratif supérieur, aux Etats-Unis l’Etat fédéral, en France l’Etat central, dispose, lui, à la fois d’un budget nettement plus important et d’une capacité d’endettement significative. Ce qui lui permet d’exercer une puissante action « contracyclique » en cas de ralentissement. Or rien de tel n’existe en Europe : le budget de l’Union est limité à 1 % du PIB et cette dernière n’a pas le droit de s’endetter.

La généralisation des règles d’or, prévue par l’accord du 9 décembre 2011, imposerait à la zone euro un carcan budgétaire qui s’avèrera rapidement impraticable. Malheureusement, si ces règles sont effectivement adoptées et mises en œuvre, il faudra en passer par une nouvelle récession, avec son cortège de chômage supplémentaire, avant de le constater et de corriger le tir. Si la zone euro n’a pas éclaté avant sous la pression du mécontentement populaire du fait de l’austérité et de la hausse du chômage ou de la spéculation financière suscitée par l’incapacité manifeste des dirigeants européens à relancer l’activité économique au sein de la zone euro.

On peut lire le texte complet en allant sur le site d’Alternatives Economiques.

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