Alors que tout devrait annoncer un moment exceptionnel (avec le nouveau programme d’immobilisation, la réfection de l’échangeur Turcot et la reconstruction du pont Champlain) pour repenser nos infrastructures de transport dans l’optique nouvelle de la mobilité durable, nos « décideurs » s’entêtent à nous mener vers le cul de sac irresponsable du « tout à l’automobile ». Des dizaines de milliards $ sont ou seront dépensés pour remettre à niveau des infrastructures de transport vétustes, parce que nous y avons sous-investi depuis la fin des années 1970, sans aucun effort pour profiter de l’occasion pour les adapter à un nouveau contexte où les enjeux environnementaux sont devenus fondamentaux.
L’exemple le plus récent, qui a lui seul illustre l’incompétence des spécialistes au ministère des Transport (MTQ), est le projet d’élargissement de l’autoroute 15. Il est amplement démontré, depuis des années, que les interventions visant à augmenter la capacité des réseaux routiers ne donnent pas les résultats attendus. Par effets induits, l’offre génère la demande, l’ajout de nouvelles capacités débouche sur l’augmentation du volume de circulation automobile. Dans certaines conditions elle conduit à une diminution du transport collectif, comme ce fut le cas avec l’ajout de l’autoroute 13 (dans les années 1980) qui a non seulement conduit, peu après sa mise en service, à de nouvelles congestions, mais en plus à la baisse de l’utilisation du train de banlieue de Deux-Montagnes. L’ajout d’une 4e voie sur l’autoroute 15, nous dit l’organisme TRANSIT, va directement à l’encontre des orientations et des objectifs du Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD), adopté à la quasi unanimité en décembre dernier. Ce Plan imposerait, s’il était bien suivi, de développer les axes de transports collectifs en y aménageant des quartiers pour favoriser la mobilité durable et limiter l’étalement urbain, ce qui constituerait une solution efficace et durable à la congestion.
Selon TRANSIT, dans le contexte de vétusté des infrastructures et de gestion serrée des finances publiques, le gouvernement doit arrêter le développement autoroutier dans les grandes villes et plutôt investir les sommes dans la réfection des routes et le développement des transports collectifs. Cette demande fait d’ailleurs l’objet d’un vaste consensus autant dans les milieux d’affaires, de santé, des ingénieurs que des groupes environnementaux.
Mais la gestion de la réfection du complexe Turcot est du même acabit. Le Conseil régional de l’environnement (CRE) de Montréal ne cesse depuis le début de cette démarche de condamner l’inconscience et l’improvisation du MTQ dans ce dossier. Récemment, le CRE de Montréal demandait de ne pas déplacer vers le nord les voies ferrées et les voies de l’autoroute 20, tel que proposé dans le projet du MTQ, ce qui lui permettrait de sauver des sommes importantes, des centaines de millions $. Comme nous le rappelle le CRE, avec la réfection de Turcot, « le gouvernement a entre les mains le projet autoroutier le plus cher du Québec et un chantier qui conditionnera nos transports pour plusieurs générations ».
La Direction de la santé publique de Montréal (DSP) est intervenu il y a quelques jours pour opposer un refus catégorique à l’idée du MTQ d’aménager des aires de jeux pour enfants et des jardins communautaires à proximité du futur échangeur Turcot. Le Dr Louis Drouin a souligné que les impacts néfastes de la pollution routière sur la santé de la population étaient maintenant bien documentés, ce que les spécialistes du MTQ ne semblent pas savoir ! Selon lui, il vaudrait mieux se contenter de planter des végétaux aux abords de Turcot de manière à créer une zone tampon entre les voies autoroutières et les habitations…
Le problème avec le MTQ ne se situe pas seulement sur le plan des pratiques frauduleuses : c’est aussi le nécessaire et indispensable changement de paradigme qui alimente ce ministère !
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