L’auteur invité est Jeffrey D. Sachs, directeur de l’Institut de la Terre à l’université de Columbia, conseiller spécial du secrétaire général des Nations unies pour les objectifs du Millénaire pour le développement. Cet article est publié en collaboration avec Project Syndicate, 2011.
La mondialisation économique a engendré un certain nombre d’effets bénéfiques importants dans le monde, comme la propagation rapide des technologies avancées de type Internet et téléphonie mobile. Elle a également fortement réduit la pauvreté dans de nombreuses économies émergentes – raison qui, à elle seule, suffit à justifier l’existence d’une l’économie mondiale ouverte et interconnectée.
En revanche, la mondialisation a également causé plusieurs problèmes majeurs auxquels il est important de s’atteler. Tout d’abord, elle a multiplié les possibilités d’évasion fiscale, en raison d’une prolifération rapide de nouveaux paradis fiscaux à travers le monde. Par ailleurs, elle a engendré la coexistence de perdants et de gagnants. Dans les pays riches, notamment aux Etats-Unis, en Europe et au Japon, les plus grands perdants sont les travailleurs dont l’éducation est insuffisante pour concurrencer efficacement les travailleurs à bas salaires issus des pays en développement. Les plus durement touchés sont les travailleurs des pays riches qui ne disposent d’aucune formation universitaire. Ils ont été des millions à perdre leur emploi. Quant à Ceux qui ont eu la chance de le conserver, ils ont vu leurs salaires stagner voire diminuer.
La mondialisation catalyse également la contagion. La crise financière de 2008 a commencé à Wall Street, puis s’est rapidement propagée à l’ensemble de la planète, soulignant la nécessité d’une coopération mondiale en matière de banque et de finance. Le changement climatique, les maladies infectieuses, le terrorisme, et autres maux ignorant les frontières imposent une réponse tout aussi mondiale.
Ce que la mondialisation exige, ce sont donc des politiques gouvernementales intelligentes. Les gouvernements devraient promouvoir un enseignement de haute qualité, afin de faire en sorte que les jeunes soient prêts à affronter la concurrence mondiale. Ils devraient accroître leur productivité en bâtissant des infrastructures modernes tout en promouvant les sciences et la technologie. Les gouvernements devraient enfin coopérer au niveau mondial pour réglementer des pans de l’économie comme l’environnement ou la finance.
Depuis trente ans, les Etats-Unis s’orientent dans la mauvaise direction, en réduisant le rôle du gouvernement dans l’économie nationale plutôt que de promouvoir les investissements nécessaires à la modernisation de l’économie et de la main-d’oeuvre. Les riches en ont bénéficié sur le court terme, en obtenant des allègements fiscaux massifs. Les pauvres en ont souffert par la perte de leur emploi et la diminution des services publics. L’inégalité économique a atteint un niveau jamais vu depuis la Grande Dépression.
Après trois années au cours desquelles son administration a dorloté les lobbyistes d’entreprise, Barack Obama a finalement commencé à insister sur la nécessité de voir les riches payer plus d’impôts. Plusieurs gouvernements européens, dont l’Espagne, le Danemark et la Grèce, semblent également prendre la même direction. L’Espagne a récemment imposé un nouvel impôt sur la fortune des contribuables à haute valeur nette. Le Danemark a élu un gouvernement de centre gauche, engagé dans une augmentation des dépenses du gouvernement financée par de nouveaux impôts sur la richesse. Et la Grèce vient de voter une nouvelle taxe foncière pour aider à combler son lourd déficit budgétaire.
Aujourd’hui, les économies les plus prospères du monde se situent en Scandinavie. En ayant recours à des taxes élevées pour financer un niveau élevé de services publics, ces pays sont parvenus à équilibrer prospérité élevée, justice sociale et durabilité environnementale. Telle est la clef du bien-être dans l’économie mondialisée d’aujourd’hui. Peut-être de plus en plus de pays dans le monde – en particulier les jeunes générations -commencent à admettre cette nouvelle réalité.
Pour lire le texte, on va sur le site du journal Les Echos
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