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Le samedi 23 avril 2022

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Le paradoxe de la rigueur

L’auteur invité est Hélène Rey, professeur d’économie à la London Business School.

Les politiques budgétaires expansionnistes conduisent-elles ou non à une baisse du chômage et favorisent-elles la croissance ? On pourrait penser qu’une telle question est facile à trancher. Mais il n’en est rien.

Récemment, en 2008, une relance budgétaire importante a été réalisée par l’administration Obama aux États-Unis. Ce stimulus budgétaire se voit grandement critiqué en ce moment par les candidats républicains à l’investiture, qui prétendent que son effet sur l’économie a été nul. L’argument utilisé est simple. Si la relance budgétaire avait marché, l’économie américaine ne serait pas si faible, ni le chômage si élevé. De façon encore plus extrême, certains économistes soutiennent que les consolidations budgétaires peuvent être expansionnistes : consolider les finances publiques restaurerait la « confiance » et conduirait ainsi à plus d’investissement et de consommation. Il n’y aurait donc aucun avantage à faire une relance budgétaire : cela mettrait en péril la soutenabilité à long terme des finances publiques sans améliorer la situation à court terme. Devant une telle dissonance et au moment où toute l’Europe s’engage dans la voie de l’austérité, il paraît opportun de tenter de faire une synthèse d’études empiriques récentes sur les effets des politiques budgétaires sur la croissance.

C’est ce que vient de faire Christina Römer, professeur à Berkeley et ancienne conseillère économique d’Obama. Il est très difficile d’estimer de façon fiable l’effet des dépenses publiques sur l’économie. La raison est simple. Il faudrait pouvoir isoler l’effet des politiques budgétaires sur l’économie. Or, en pratique, il y a toujours d’autres chocs concomitants, affectant eux aussi l’économie. De plus, les relances budgétaires sont généralement effectuées lorsqu’une économie est en récession. Si l’on observe que la croissance est très faible après une relance budgétaire, cela peut donc être dû au fait que la politique n’est pas efficace, mais cela peut aussi vouloir dire que, sans la relance budgétaire, l’économie aurait été en dépression et que la politique menée a limité les dégâts.

Plusieurs études ont tenté d’isoler les effets de la politique budgétaire en recherchant des variations « exogènes » des dépenses publiques, c’est-à-dire non corrélées a priori avec l’économie, comme par exemple les variations du budget de la défense, observées en temps de guerre. D’autres études ont utilisé l’aspect aléatoire de certaines dépenses gouvernementales à travers les différents États américains (certains Etats ont par exemple historiquement plus de personnels militaires que d’autres et sont donc plus affectés par les variations du budget de la défense) ou la manière arbitraire dont les chèques du Trésor américain remboursant certains impôts ont été distribués. Ces études ont, en moyenne, identifié des effets positifs d’une relance budgétaire sur l’activité et l’emploi. Elles suggèrent donc fortement qu’a contrario les politiques d’austérité, mises en oeuvre en particulier en Europe, conduisent à une baisse de l’activité économique et à une hausse du chômage.

Cela semble être clairement le cas en Angleterre par exemple, où la politique agressive d’austérité a conduit à une baisse de l’activité économique au moment même où la crise de l’euro freinait elle-même l’économie anglaise. C’est le paradoxe de la rigueur : alors même qu’une politique de consolidation budgétaire est réalisée dans l’optique de restaurer la confiance et d’assurer la soutenabilité de la dette, elle peut conduire exactement à l’inverse. Quand l’activité diminue, les déficits se creusent et la dette augmente. Quand tout le monde joue l’austérité, la demande s’effondre, l’Europe entre en récession et la dette totale pourrait bien augmenter au lieu de diminuer.

Pour lire le texte original, on va sur le site du journal Les Échos

Discussion

Commentaire pour “Le paradoxe de la rigueur”

  1. C’est le principe keynésien d’investir pour soutenir l’économie en période de crise, mais pour que cela ai de l’effet il faut que l’injection soit massive, ce qui ne semble pas avoir été le cas de la relance faite par Obama, ce qui conduit à une mesure réduite de son effet.

    Écrit par affacturage | mars 16, 2012, 7 h 23 min

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