Dans notre rapport de recherche sur les services publics, Pierre Gouin et moi-même avons amplement démontré que les Québécois reçoivent, en contrepartie des taxes et des impôts qu’ils paient aux divers niveaux de gouvernement, des prestations monétaires ou des service que nous avons évalué à 16 668 $ par individu. Ça représente l’équivalent de 68% des revenus gagnés par les Québécois. Mais les entreprises aussi bénéficient de l’effet redistributif de l’État. Nous l’avons calculé !

Selon différentes études, québécoises, canadiennes ou internationales, le Québec offre un cadre très concurrentiel pour les entreprises. L’étude annuelle produite par KPMG le confirme. À l’aide des statistiques disponibles, nous avons établi un portrait des subventions que reçoivent les entreprises établies au Québec et nous les avons mis en perspective avec ce qu’elles paient en impôts et taxes aux différents niveaux d’administration, autant que faire se peut étant donné la disponibilité des statistiques. Nous avons pu clairement établir que ces entreprises reçoivent beaucoup de service et paient peu d’impôt. Précisément, elles reçoivent plus de subventions qu’elles ne paient d’impôts directs.

Il y a quelques années, la Chaire d’études socio-économiques de l’UQAM a produit une étude portant sur la fiscalité des entreprises. Elle mettait en lumière le déplacement du fardeau fiscal des entreprises vers les particuliers au cours des dernières décennies. Par exemple, que la part des impôts directs et de la taxe sur le capital payée par les compagnies au gouvernement provincial représentait 6,8 % du PIB en 1964 et seulement 1,5 % en 2004. Au fédéral, cette part serait passée de 5,2 % du PIB à 2,4 % pour les mêmes années.

Malgré le fait que les organismes statistiques compilent peu de données qui portent sur les entreprises (absence de microdonnées qui permettraient de développer une analyse détaillée) nous avons pu tracer un bref portrait des entreprises au Québec en regard des subventions reçues et des impôts payés.

Nos résultats apparaissent dans les deux tableaux suivants. D’une part, les entreprises québécoises ont reçu plus de 7 milliards $ en subventions des gouvernements en 2008. Il s’agit de l’année la plus récente pour les données. De ce montant, près de 6 milliards $ proviennent du gouvernement du Québec. Le Québec est la seule province à avoir retenu une telle politique de subventions aux entreprises. Par exemple, en Ontario, c’est 2,5 milliards $, en Alberta, 1,1 milliard $ et en Colombie-Britannique, 1 milliard $.

En comparaison, l’impôt payé par les entreprises est peu élevé, comme l’indique le tableau 5. À titre d’exemple, les subventions versées aux entreprises par le gouvernement du Québec sont plus importantes que l’impôt direct et la taxe sur le capital qu’elles lui ont versés. L’écart dépasse 1,1 milliard $.

Les entreprises versent d’autres impôts et taxes aux administrations. Il y a par exemple l’impôt foncier au niveau local. Ici encore, les données ne sont pas ventilées pour distinguer les ménages des entreprises. Globalement, ce montant représente un peu moins de 10 milliards $ au Québec. Il y a aussi les cotisations d’assurance-emploi au fédéral. Encore une fois, ce montant n’est pas ventilé entre entreprises et individus. Même chose pour les licences, les droits, les permis et les taxes sur le transport aérien, etc. Enfin, les taxes et permis provenant de l’exploitation des ressources naturelles n’ont été que de 16 millions $ en 2008 et que les impôts sur l’exploitation minière et forestière ont été de 90 millions $.

Malgré tout, il est évident que les subventions qu’elles reçoivent sont très élevées par rapport aux divers impôts payés.