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Le samedi 23 avril 2022

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«Pourquoi je quitte Goldman Sachs»: la victoire du trader sur le conseiller

L’auteur invité est Matthew Yglesias, correspondant économique et affaires de Slate.com. Avant de rejoindre le magazine Slate, il a travaillé pour ThinkProgress, The Atlantic, TPM Media et The American Prospect. Son premier livre, Heads in the Sand, a été publié en 2008. Son second, The Rent Is Too Damn High, sortira en mars 2012.

Tout le monde parle du départ cinglant de Greg Smith de Goldman Sachs. Cet ancien directeur exécutif de la banque accuse l’entreprise de déclin moral et de ne porter plus aucune attention à la qualité du service rendu à ses clients. Ce qui me frappe, c’est que Smith évite de parler du problème de base.

Il fut un temps où Goldman était une compagnie dont le travail était en grande partie de conseiller ses clients. Difficile de réussir dans le business du conseil si vos clients n’ont pas l’impression que vous leur donnez des bons conseils justement.

Mais au cours de la période que décrit Smith, cet aspect de l’activité de l’entreprise a fondu au profit du trading. Cela signifie que la qualité du conseil, la satisfaction des clients ou le comportement éthique sont de moins en moins importants dans la gestion de l’entreprise.

Un phénomène normal

Les compagnies changent de stratégie en permanence et il serait on ne peut plus normal que les dirigeants qui s’occupent de la partie déclinante de l’activité supportent mal le changement. Certains cadres de Google démissionnent parce qu’ils sont mécontents de la place prise par Google+ dans la stratégie de l’entreprise, et il y a sans doute des gens chez Mac qui ne sont pas ravis par le fait qu’Apple se définisse comme une entreprise «post-PC».

De la même manière, les grands conseillers clientèle de Goldman Sachs ont toutes les raisons d’être mécontents du fait que leur employeur fasse de plus en plus de transactions boursières et de moins en moins de conseil.

Ce changement constitue-t-il en soi un déclin moral? Difficile à dire, mais c’est la toile de fond des reproches de Smith. Il écrit qu’il a « toujours tiré une grande fierté à conseiller mes clients pour qu’ils fassent ce que je pense être bon pour eux, même si cela signifie moins d’argent pour l’entreprise » mais prévient en même temps que la nouvelle attitude dont il se plaint va entraîner la mort de l’entreprise.

Du conseil au trading

C’est contradictoire. Le «vieux» Goldman ne préférait pas faire ce qui était juste et bon plutôt que de gagner de l’argent, mais gagnait de l’argent en donnant l’impression aux clients qu’ils obtenaient de bons conseils. Du «nouveau» Goldman, Smith écrit:

«Quels sont les trois moyens rapides de grimper les échelons?

a) travailler sur les « axes » de la firme, ce qui en langage Goldman signifie persuader vos clients d’investir dans les titres et autres produits dont nous essayons de nous débarrasser parce qu’ils ne représentent pas assez de profits potentiels.

b) « chasser des éléphants ». En français: faites en sorte que vos clients, dont certains sont avertis et d’autres non, échangent tout ce qui rapportera le plus gros profit à Goldman. Appelez-moi vieux-jeu, mais je n’aime pas vendre à mes clients des produits qui ne sont pas bons pour eux.

c) Retrouvez-vous dans un poste où votre boulot est d’échanger n’importe quel produit non-liquide ou opaque avec un acronyme à trois lettres.»

En clair, le point c) signifie que le trading est désormais le centre de l’activité. Les points a) et b) indiquent que la partie de conseil aux clients de l’activité est désormais compromise au profit de la partie de trading.

Si tout cela est vrai, Smith a sans doute raison: les clients vont quitter Goldman Sachs à long terme. Mais son affirmation selon laquelle cela signifie la fin de la banque est fausse. Cela signifierait simplement un changement de business model avec un basculement du conseil vers les transactions boursières.

Traduit par Grégoire Fleurot

Pour lire le texte original, on va sur le site de Slate France

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