CESD-Oikos-989x90

Le samedi 23 avril 2022

Recherche:

La campagne du lobby pétrolier pour exporter son pétrole sale

Machiavel écrivait (en 1505) que « l’innovateur a pour ennemis tous ceux qui s’enrichissent sous les anciennes conditions, et pour défenseurs ceux qui pensent améliorer leur sort avec les nouvelles. » L’industrie du gaz et du pétrole sont les ennemis de l’innovation. Autant pour les innovations technologiques (les technologies vertes), parce qu’elles sont censées entraîner une diminution du marché des énergies fossiles, que pour les innovations sociales nécessaires pour faciliter le passage à une reconversion écologique de l’économie, parce qu’il s’agit d’une attaque frontale contre le pouvoir de nuisance de cette industrie. Aujourd’hui, le lobby pétrolier représente les forces réactionnaires les plus dangereuses du fait qu’il finance tous les négationnistes et autres groupes qui font obstacles au changement.

Puisqu’il est très étroitement lié à l’industrie du gaz et du pétrole, il faut conclure que le gouvernement canadien actuel est un ennemi de l’innovation. On l’a d’ailleurs constaté dans le dernier budget.

Même le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, s’invite dans cette campagne du lobby du pétrole sale en appuyant l’idée d’investir dans les infrastructures et les pipelines, pour supposément réduire la différence de prix du baril (les consommateurs de l’est du pays paieraient plus que ce qu’obtiennent les producteurs de l’Ouest pour des raisons de transport de l’essence et du mazout), ce qui, évidemment, serait bénéfique pour tout le monde… Et il a le culot de présenter ça comme une exploitation plus rapide, efficace et durable des ressources.

Mais cette argumentation selon laquelle les prix élevés du Brent de Londres, comparés au bas prix du WTI de New York, justifieraient économiquement la construction d’un pipeline pour alimenter les raffineries de l’Est du Canada en pétrole sale est une supercherie, relayée par tous les médias et par tous nos journalistes économiques. Qui peut raisonnablement penser que les raffineurs de Pétro-Can et d’Ultramar achètent tout leur pétrole brut sur le marché spot ? C’est tout à fait ridicule. Le pétrole est acheté sur la base de contrats de long terme, la plupart du temps avec les grands pays producteurs. D’autre part, la faiblesse du prix spot du WTI est conjoncturel : la faiblesse de la reprise étatsunienne a augmenté les réserves de brut aux États-Unis. Mais il ne faut pas non plus négliger le fait que la faiblesse du prix WTI indique que le pétrole échangé sur ce marché n’a pas la même qualité que le pétrole Brent. Et dans la mesure où le pétrole sale de l’Alberta va de plus en plus devenir important, les prix risquent de rester fort longtemps plus bas puisqu’il est de moins bonne qualité, qu’il implique donc des coûts de raffinage plus élevés, ce qui explique qu’il se vend moins cher. À l’inverse, le Brent voit son prix dopé par l’affaiblissement de la production dans la mer du Nord. Les prix spots sont des prix spéculatifs : ils sur-réagissent aux faiblesses conjoncturelles et aux écarts dus aux contrats de long terme.

Ces prix vont s’équilibrer graduellement, sans qu’il ait besoin de pipelines vers l’est du Canada. Le réel enjeu derrière cette idée de pipeline canadien, n’est pas de diminuer les prix de l’essence pour les pauvres consommateurs de l’Est, mais d’augmenter la demande pour le pétrole sale, donc par le fait même de justifier l’augmentation de l’offre et le développement des sables bitumineux. Il faut s’y opposer de toutes nos forces.

Discussion

Pas de commentaire pour “La campagne du lobby pétrolier pour exporter son pétrole sale”

Commentaire

Inscrivez votre courriel ci-dessous pour recevoir le bulletin hebdomadaire:

Agenda Public

Un code est requis pour ajouter des evenements a l'agenda.
Appuyez sur "Obtenir un code" ci-dessous pour s'inscrire.

Si vous avez un code, inserez votre code ci-dessous:

Votre compte étant nouveau, s'il vous plait enregistrer vos informations:











Informations sur l'evenement a ajouter: