La chute récente du gouvernement des Pays-Bas n’est pas fortuite. Comme plusieurs autres, le pays vient de rechuter en récession. Ces crises économiques créées par le libéralisme économique se transforment en crises politiques et, plus souvent qu’autrement, donnent une vigueur nouvelle à l’extrême-droite qui fait du libéralisme politique et des étrangers les boucs émissaires de la crise. Plusieurs pays de la zone euro sont maintenant rechutés en récession : la Slovénie, l’Italie, l’Irlande, la Grèce, le Portugal, la Belgique et l’Espagne. Pour se conformer au Pacte fiscal franco-allemand, ils ont tous adopté des plans de restrictions budgétaires. En dehors de la zone euro, le Danemark, la République Tchèque et le Royaume-Uni sont aussi retombés en récession sous le poids de leur plan d’austérité.
On parlera sûrement de ces politiques dans les ouvrages d’histoire économique, en particulier du cas de la Grande-Bretagne. Le pays est officiellement tombé en récession en avril, le PIB du pays s’étant contracté pour un deuxième trimestre consécutif : de 0,2% de janvier à mars 2012 après un repli de 0,3% lors des trois derniers mois de 2011. Le secteur des services n’a connu qu’un maigre 0,1% de croissance quand la production industrielle s’est contractée de 0,4% et le secteur de la construction s’est écroulé de 3%. Pour rien n’arranger, l’inflation a grimpé en mars à 3,5% après cinq mois de déclin consécutifs… Dans la foulée, la Banque d’Angleterre a
réduit ses prévisions de croissance et augmenté celles de l’inflation.
En raison de sa politique de rigueur ultraconservatrice pour rétablir rapidement les finances publiques, non seulement le pays devra faire face à une croissance du chômage, mais il a déjà commencé à être confronté à une … dégradation des finances publiques ! Les finances publiques du Royaume-Uni se sont à nouveau dégradées en mars, obligeant le gouvernement à emprunter 18,2 milliards de livres (22,3 milliards d’euros), un record depuis novembre 2010. Mais ça ne va pas mal pour tout le monde, heureusement. La richesse des riches britanniques s’est accrue comme jamais auparavant : selon la Liste 2012 du Sunday Times, les 1 000 personnes les plus riches du pays ont vu croître leur richesse à un niveau record de 414 milliards de livres.
En Australie, nous dit l’économiste Albert Edwards, l’économie se dirige vers une chute brutale. « Tout ce que nous avons en Australie, c’est une bulle de l’endettement permise par un boom dans les ressources naturelles, boom qui dépend, pour sa part, d’une encore plus grande bulle du crédit en Chine », déclare-t-il. L’immobilier est hors de prix et une décélération de la croissance devrait avoir, comme en Espagne par exemple, un impact désastreux sur l’économie du pays.
Aux États-Unis ça va peut-être mieux, mais les craintes sont vives suite à plusieurs indicateurs qui signalent un ralentissement de la reprise. Le PIB étatsunien a augmenté de 2,2% au premier trimestre 2012, après une hausse de 3% les trois mois précédents. Même l’OMC s’inquiète de la situation. Selon ses estimations, déjà l’année 2011 a marqué une décélération du commerce mondial (5%) par rapport à 2010 (13,8%). On projette une croissance de seulement 3,7% pour 2912. « More than three years have passed since the trade collapse of 2008-09, but the world economy and trade remain fragile. The further slowing of trade expected in 2012 shows that the downside risks remain high. We are not yet out of the woods, » affirme Pascal Lamy. Enfermé dans son monde abstrait, il accuse les politiques nationalistes d’être responsables de ces problèmes.
La Confédération syndicale internationale (CSI) semble mieux comprendre l’urgence de la situation que ces bureaucrates des organisations internationales, trop familiers de l’oligarchie mondiale, alors que les plans d’austérité sont partout susceptibles de provoquer une explosion du chômage. « Les ministres des Finances des pays du G20 doivent passer de l’austérité, qui fomente le désespoir, à la croissance et la création d’emplois. Remettre les gens et, plus particulièrement, les jeunes au travail est la seule façon d’éviter la détonation d’une bombe à retardement sociale », a déclaré John Evans, secrétaire général de la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE. La CSI a appelé les ministres des pays du G20 à affecter au moins 2% de leur PIB aux investissements dans l’économie verte. Selon une étude qu’elle a commandité, des investissements de 2% du PIB par an durant 5 ans, dans 12 pays seulement, pourrait contribuer à la création de jusqu’à 48 millions de nouveaux postes.
On verra dans un prochain billet que le Canada et le Québec ne sont pas immunisés contre les impacts de cette ‘épidémie’ de la rigueur.
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