Machiavel en aurait sûrement fait un cas d’étude. Ce gouvernement corrompue (dont les membres quittent le bateau les uns après les autres, qui pour s’être fait prendre la main dans le sac ou plutôt pour aller piger dans le sac avant la fin de régime, pendant qu’il en est encore temps) a trouvé avec le refus des étudiants d’accepter cette explosion des droits de scolarité l’enjeu qui pourrait faire changer tous les pronostics, qui pourrait lui donner une nouvelle chance de garder son pouvoir de nuisance sur le Québec.
Au-delà de la recette conventionnelle d’un gouvernement libéral, cette augmentation démesurée des droits de scolarité devient l’enjeu idéal pour affaiblir l’opposition péquiste qui a traditionnellement fait du gel de ces droits l’emblème de nos efforts collectifs pour l’accessibilité des Québécois aux études postsecondaires. Mais en cherchant ainsi à toucher ce qu’il y a de plus banal dans ce citoyen « payeur de taxe » qui réclame l’égalité de tous face à l’effort pour (supposément) rétablir les finances publiques, le gouvernement Charest affaibli l’un des principes de solidarité qui nous distinguait depuis une quarantaine d’années. Car en voulant ramener les droits de scolarité à ce qu’ils étaient dans les années 1960, il ne fait pas que rétablir la ‘juste part’ des étudiants; il élimine quarante ans d’efforts collectif à créer une plus grande équité, pour toutes les classes de citoyens, à accéder aux postes de pouvoir économique, politique, culturel. C’est l’effort le plus méritoire du modèle québécois à créer une social-démocratie exemplaire.
Le machiavélisme de ce gouvernement est tel qu’il a misé sur le pourrissement de la situation, savamment calculé (‘une pièce de théâtre’ nous dit M. Bureau-Blouin), pour provoquer la violence, créant ainsi de toute pièce une situation qui ne pouvait que devenir intolérable pour la grande majorité de la population. En manipulant avec soin l’opinion publique grâce aux faiseurs d’opinion proche de la famille libérale, ou de cette merde de démagogues de droite qui polluent les ondes, le gouvernement Charest dresse la table pour une campagne électorale au cours de laquelle l’opposition devra marcher sur des œufs, s’obliger à utiliser la langue de bois, soupesant chaque mot pour ne pas dire celui que les médias pourraient se réapproprier qui ferait tout capoter.
Pourtant, les fédérations étudiantes étaient prêtes à proposer à leurs membres un règlement raisonnable qui aurait constitué l’équivalent d’un moratoire, le temps de laisser aux Québécois décider démocratiquement, lors d’une prochaine élection, du véritable projet d’éducation proposé par les différents partis. Mais la ministre Line « amie de la mafia » Beauchamp, Jean « ami des Desmarais » Charest et les recteurs des universités ont torpillé l’entente et créé une impasse qui devenait infranchissable. Cette sinistre farce de négociation ne pouvait que provoquer la division des organisations étudiantes : le mépris et l’arrogance du pouvoir ne pouvait que radicaliser les étudiants. Néanmoins l’explosion n’a pas eu lieu. Au plus, une petite action d’imbéciles.
Faut vraiment être prêt à tout pour accuser de terrorisme ce petit groupuscule de jeunes radicaux, en plein délire de lutte anticapitaliste!!! Mais la réponse répressive du pouvoir, elle, n’est pas du délire : c’est le calcul politique d’un gouvernement prêt à tout, y compris à la surenchère, pour dramatiser la situation. Comme le signale Jean-François Lisée, dans le chemin qui est tracé par le pouvoir, l’affrontement est inévitable. On le veut, on le désire afin de cristalliser la prochaine élection autour de ces enjeux. « Cela pose la question du calendrier électoral. On le sait, le gouvernement libéral a toujours en tête une plage de déclenchement de l’élection à la mi-août pour une élection à la mi-septembre. Un retour des affrontements à la mi-août pourrait lui donner l’occasion de jouer la carte de la loi et de l’ordre. »
Lorsque Charest semblait dire aux journalistes que cela était GROTESQUE de prétendre qu’il utilisait ce conflit à des fins électorales, il fallait plutôt entendre que tout ça n’était finalement que des GROS TESTS : chacun des gestes qu’il pose représente un test à grande échelle des thèmes qui augmenteront sa probabilité de gagner les prochaines élections. Fini les focus group, c’est maintenant le temps des analyses en temps réel. Or le ‘peuple’ semble bien réagir à cette manipulation.
Ce serait bien la pire des catastrophes si les Québécois devaient faire fi du bilan de ce gouvernement pour l’appuyer dans ce conflit. Pourtant, chaque affrontement violent délibéré nous rapproche de ce scénario catastrophe. Mais jusqu’où sont-ils prêts à aller pour encourager l’irréparable ? Maintenant que les actions de perturbation économique (qui ont été très utiles pour créer cette situation) sont à toute fin utile rendues illégales, va-t-on passer à des actions de perturbation politique ? C’est la gageure du gouvernement. Une mort d’homme avec ça ? Ce serait une finale bien dramatique qui en assurerait le succès incontestable ! Mais c’est la part d’improvisation de cette pièce de théâtre irresponsable.
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