L’auteur invité, Jean-Marc Fontan, est professeur de sociologie à l’UQAM et co-directeur de l’Alliance de recherche universités-communautés (ARUC) en économie sociale
Dans un éditorial dense, Paul Krugman livre une analyse riche et complète sur les raisons du désarroi des économistes face à la dernière crise économique. How Did Economists Get It So Wrong ? se penche sur l’inadéquation du point de vue qui fonde l’analyse économique contemporaine. La solution à une telle incompétence serait simple. Selon l’éditorialiste, elle reposerait sur l’adoption d’un angle d’analyse où les économistes seraient appelés à reconnaître que les marchés financiers sont imparfaits, qu’il importe de renouer avec la théorie keynésienne et qu’il est urgent d’intégrer la dimension financière dans l’analyse macroéconomique.
Est-ce vraiment suffisant ! La dernière crise, si elle n’a pas été anticipée par les économistes, elle a tout le moins été gérée de telle sorte qu’un atterrissage en douceur a été possible. Au prix certes d’une augmentation du taux de chômage et d’une recomposition des processus et des dynamiques d’appauvrissement. Au prix certes d’une reconfiguration de filières, telle le secteur automobile, et d’un changement de places et de positions de grands acteurs économiques. Au prix d’un retour des déficits publics, le cas québécois et canadien.
Somme toute, la situation se rétablit et, malgré l’appel de Krugman à un plus grand contrôle des activités du secteur financier, cette piste d’action est chose du passé.
Les économistes ont le devoir moral de se pencher sur les mécanismes « de création de la richesse et de la pauvreté », l’un ne va pas sans l’autre. Ce devoir leur incombe s’ils ne veulent faire de leur profession, non pas cette discipline au service du capital, mais une discipline partie prenante d’un processus complexe de production citoyenne des connaissances. Pour y arriver, il faudrait penser autrement cette « science ». Ne pas la cantonner aux propositions énoncées par Krugman. Les marchés, financiers ou autres, n’ont jamais été parfaits et ne le seront jamais. Le keynésiannisme constitue une approche visant le rétablissement d’un équilibre et non une façon alternative de penser le rapport « Économie – Société ». Enfin, l’intégration du secteur financier dans l’analyse macroéconomique demeure une mesure intéressante et nécessaire, mais combien insuffisante.
Cette autre pensée économique ne représente pas qu’un « débat entre experts ». Elle peut difficilement faire l’économie de se frotter au terrain. Des réflexions en ce sens sont présentes dans différents pays. Elles sont liées à des expériences terrain, par exemple celle menée à Montréal-Nord dans le cadre du projet de mobilisation par le logement social initié par Parole d’excluEs. Cette autre façon de penser l’économie doit forcément s’accrocher à des objectifs de transformations et de construction d’une société inclusive. L’IUPE contribue à sa façon au développement de cette autre façon de penser l’économie.
Tiré du Blog de l’incubateur universitaire Parole D’excluEs
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