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Le samedi 23 avril 2022

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La nécessaire refonte du Plan Nord

L’auteur invité est Harvey Mead – Ancien commissaire au développement durable du Québec, l’auteur a participé au forum « Ne perdons pas le Nord

La refonte doit véritablement être le fruit d’un processus participatif, transparent et démocratique, avec l’ensemble des populations touchées, autochtones et non autochtones.

L’empressement et l’insouciance du gouvernement de Jean Charest dans sa quête quasi maladive d’une croissance du PIB du Québec basée sur l’exploitation minière du Nord risquent de lui jouer un mauvais tour. La description du Plan Nord comme « le plus grand projet de développement durable jamais entrepris au Québec » est une moquerie du concept et doit être refondée. L’extraction de ressources non renouvelables par l’exploitation minière est tout sauf durable.

En 2008-2009, j’ai participé à l’enquête du vérificateur général du Québec sur la gestion du secteur minier par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec (MRNF). Publié en avril 2009, le rapport concluait sur de sérieuses « préoccupations » quant à la capacité réelle de ce ministère de remplir sa mission de conservation et d’exploitation des ressources minières du Québec selon les principes de la Loi sur le développement durable du Québec.

Or, au même moment, Jean Charest faisait fi de cette réalité en affirmant candidement, lors de ces nombreux discours, que le Plan Nord serait « le plus grand projet de développement durable jamais entrepris au Québec ».

Développement durable

La Loi sur le développement durable du Québec (LDD) est pourtant un « cadre de gestion » pour la mise en oeuvre du développement par l’administration publique, complétant les deux autres cadres de ce type dans le corpus législatif du Québec, soit la Loi sur l’administration publique (LAP) et la Loi sur l’administration financière (LAF). Le cadre de gestion annoncé par la LDD de 2006 doit normalement favoriser la réussite du développement, que l’on veut « durable » dans le sens noble du terme. Normalement, il doit également servir de cadre au contenu de ces deux autres lois, à caractère plus administratif.

En théorie, le gouvernement du Québec a donc en main tous les outils administratifs nécessaires pour forger un Plan Nord qui réponde véritablement de l’intérêt collectif des générations actuelles et futures. Il nous apparaît urgent que le gouvernement actuel (sinon le futur gouvernement élu du Québec) se saisisse de ces outils législatifs pour refondre et réorienter le Plan Nord.

Et contrairement à l’élaboration du plan actuel, cette refonte doit véritablement être le fruit d’un processus participatif, transparent et démocratique, avec l’ensemble des populations touchées, autochtones et non autochtones.

Par ailleurs, une telle refonte doit s’attaquer de front à des questions de fond, trop souvent évacuées dans ce genre d’exercice. Par exemple : comment justifier l’exploitation de davantage de ressources naturelles pour alimenter des marchés de surconsommation comme le nôtre, ou encore ceux émergents, alors que l’un des principaux défis actuels de l’humanité est précisément de réduire notre empreinte écologique globale ?

L’empreinte écologique du Québec est de « trois » ; autrement dit, si toute l’humanité vivait, exploitait et consommait des ressources comme le fait le Québec, il faudrait trois planètes pour la soutenir. C’est le calcul et la conclusion à laquelle j’en étais arrivé en 2008 à titre de commissaire au développement durable du Québec.

Bien entendu, le Québec n’est pas seul dans cette situation. Le Canada, les États-Unis, l’Australie et, dans une moindre mesure, l’Europe sont dans le même bateau (représentant environ 800 millions de personnes ensemble).

La Chine, par son empreinte écologique, se classait jusqu’à récemment à peu près exactement au niveau de la capacité de support de la planète. Mais tout indique que cette situation va changer rapidement avec l’effort du pays pour suivre le modèle des pays riches et atteindre notre « niveau de richesse ». Avec une empreinte écologique mondiale déjà en dépassement, on ne peut que rester songeur devant la contribution à venir de 1,4 milliard de Chinois aux crises planétaires en cours, sans mentionner celle des quelque 1,2 milliard d’Indiens qui ont les mêmes visées.

Sans boussole

Clairement, notre modèle de civilisation n’est pas « durable », et il y a fort à parier que les pays émergents ne réussiront pas leur lancée en matière de développement en suivant notre modèle ; en tout cas, pas sans que d’autres nations et populations en souffrent, que ce soit sur le plan écologique ou socio-économique.

Nous sommes donc confrontés, comme société faisant partie de l’humanité, à un devoir de réflexion et d’action pour changer les choses ; pour changer la façon de concevoir et de faire le développement. Le Québec dispose d’atouts et d’outils exceptionnels pour procéder à cette réflexion, et peut-être même de montrer la voie au reste du monde.

Malheureusement, le Plan Nord tel que proposé actuellement ne va pas du tout en ce sens. On a l’impression de naviguer à vue, sans boussole. Il est peut-être temps de retrouver le nord en revoyant complètement le plan.

Pour lire le texte original, on va sur le site du quotidien Le Devoir.

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