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Le samedi 23 avril 2022

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ÉSS et Rio+20 (1) : le défi de l’action politique et du développement durable

Dans bien des organisations de l’économie sociale et solidaire (toutes familles confondues), on a souvent choisi la neutralité politique dans les deux dernières décennies. Mais la question écologique et du développement durable, dans les dernières années, a fait bouger les lignes. En effet, l’omniprésence des lobbies des pétrolières, minières et gazières, la perspective de développer à grande échelle le gaz de schiste (20,000 puits en perspective mais 16,000 terres agricoles menacées), le parti-pris du gouvernement libéral en faveur du secteur privé dans le développement des énergies renouvelables (l’éolien en particulier) font dire à plusieurs organisations que le temps est venu d’exercer leur influence socio-politique sur les gouvernements. Où en sommes-nous à cet égard ?

Dans ce premier billet, nous prenons à témoin le président de la Caisse d’économie solidaire Desjardins, également membre de la direction des Rencontres du Mont-Blanc (RMB), Gérald Larose. Avant de quitter le Québec pour Rio, ce dernier nous accordait une entrevue sur quelques thèmes qui nous titillent tous aujourd’hui : les avancées des initiatives d’ÉSS en matière de développement durable à l’heure de Rio+20; la difficile question du virage écologique de l’économie; le renouveau de l’action politique au sein de l’ÉSS; le mouvement coopératif et sa critique du capitalisme. Voici quelques extraits de cet entretien paru dans la Revue vie économique.

Le virage écologique de l’économie

Peut-on parler de virage écologique de l’économie? D’entrée de jeu, Gérald Larose nous dit que « l’ÉSS est en mode de production et de consommation verte : recyclage d’ordinateurs, friperies, agriculture «écologiquement intensive», ressourceries et bien d’autres pratiques. Sans compter le cheminement de nombreuses fédérations coopératives (à l’initiative du CQCM) et de syndicats (sous l’influence des organisations du Carrefour financier solidaire…). Tout çà commence à donner des résultats concrets dans certains secteurs comme les coopératives forestières investies dans la biomasse ou des coopératives agricoles engagées dans la bioénergie (comme alternative au pétrole) et le transport par train (alternatif au camionnage). Donc attention! Nous ne sommes pas contre la croissance et pour la décroissance. Le débat est mal posé! La question est plutôt celle-ci : que faisons-nous croître et que faisons-nous décroître? »

Et d’ajouter : « …Il y a de bonnes pratiques vertes et solidaires, mais cette thématique est en passe de s’élargir étant donné l’envergure internationale du défi écologique et son urgence que ce soit l’affaiblissement de la biodiversité, la pollution de l’air et des océans ou encore le réchauffement climatique… Or l’ESS nous semble, aux RMB comme à la Caisse d’économie solidaire et dans d’autres organisations, être l’économie la plus capable d’anticiper l’avenir et de contrer les menaces qui pèsent à cet égard. De plus les écologistes ne sont plus seuls sur cet enjeu. On observe que la plupart des mouvements sociaux (de travailleurs, d’agriculteurs, des femmes, de la coopération internationale, des jeunes, etc.) sont, à des degrés variables, en train de s’en emparer. »

Oui mais Écologie et économie, n’a-t-on a pas plutôt tendance à opposer les deux choses? Et le président de la Caisse solidaire de répondre : « On disait il n’y a pas si longtemps que «si c’est vert, çà coûte plus cher et c’est néfaste pour la croissance». Or l’ÉSS est en voie de démontrer que dans nombre de secteurs, loin d’être néfaste à la croissance, c’est plus rentable, plus intensif en emplois, favorisant le «vivre ensemble» au sein des communautés et de façon générale un «mieux être» sur tous les plans. Bref, …c’est aujourd’hui très clair pour nous : la transition écologique de l’économie s’impose!…D’où une hypothèse de travail sérieuse pour l’automne prochain: la tenue d’un colloque réunissant de tout ce beau monde pour donner des mains à ce virage écologique. »

La critique du capitalisme qui émerge

Beaucoup de coopératives se sont adaptées à l’économie capitaliste de marché. Leur banalisation est-elle réversible? « Les entreprises capitalistes, nous dit-il, sont dominantes dans l’économie générale du marché. Mais elles ne sont pas les seules à occuper ce marché. C’est le fameux 10/10/10 du BIT : les entreprises collectives dans le monde représentent 10% du PIB, 10% des emplois et 10% de la finance. Sans compter tout le secteur des entreprises publiques et semi-publiques et, du côté du secteur privé, les regroupements d’artisans, les entreprises familiales, la TPE (très petite entreprise) et la PME locale et régionale bien ancrées sur des territoires, dans leur communauté. Avec cette diversité des formes d’entreprises, avec cette «biodiversité entrepreneuriale»…, nous sommes capables de surmonter le capitalisme dans ses objectifs de lucrativité maximale où en dernière instance la seule logique qui prévaut, c’est la logique du profit….Autrement dit, pour employer une image, sans faire tomber de son cheval le cavalier fou du capitalisme financier et du capitalisme intransigeant des multinationales du pétrole, du gaz, de l’agroalimentaire, ces multinationales risquent de nous retrouver sur leur chemin… »

L’action politique de l’ÉSS à Rio

Rio + 20, est-elle une occasion réelle d’initier une action politique de l’ÉSS ? Gérald Larose, actif depuis longtemps à la direction des Rencontres du Mont-Blanc nous répond ceci : « Nous misons sur certains États capables de porter la perspective que nous avançons : le Brésil, pays d’accueil de cette grande Conférence qui a une sensibilité forte à l’égard de l’ESS, l’Algérie (à titre de représentant du groupe des 77), l’Équateur qui a une politique explicite en la matière. Sans compter l’Union européenne, notamment les pays scandinaves (Suède et Danemark) et la France. Puis, il y a tout le travail auprès des institutions internationales (PNUE, PNUD, OIT, FAO, etc.) qui ne fait que s’amorcer. »

Pour la version intégrale de cet entretien, le dernier numéro de la revue Vie économique dont l’intitulé est Le capitalisme en crise, quelle réponse des coopératives ? est disponible en ligne. L’entretien avec Gérald Larose figure parmi un ensemble de 15 articles dont plusieurs contributions internationales : de la France, l’économiste et écologiste Alain Lipietz ; le sociologue Jean-François Draperi de la Revue internationale d’économie sociale, la RECMA ; l’économiste Denis Clerc, fondateur de la revue Alternatives économiques ; d’Italie, Enzo Pezzini, politologue représentant le mouvement coopératif de son pays à Bruxelles ; d’Afrique de l’Ouest (Sénégal), le sociologue Abdou Salam Fall et pour l’Amérique latine, le sociologue Ernesto Molina. Sans compter le tour d’horizon de la nouvelle dynamique internationale des coopératives (Louis Favreau) et d’autres textes de chercheurs québécois. Un numéro qui, en sciences économiques et sociales, comble un vide abyssal sur ce thème. À l’heure de l’Année internationale des coopératives, ce numéro thématique s’imposait.

Dans un prochain article, nous aborderons le défi de l’action politique de l’ÉSS discuté à chaud de Rio avec René Lachapelle, président du GESQ.

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