L’auteure invitée est Rita Dionne-Marsolais, ancienne députée de Rosemont, durant quatre mandats. Économiste de formation elle a assumé plusieurs portefeuilles ministériels entre 1994 et 2008, dont ceux du Tourisme, du Revenu, de l’Énergie, et de l’Industrie et du commerce.
C’est fou ce qu’une campagne électorale peut faire dire à certains. Cette dernière semaine nous a présenté un François Legault prêt à toutes les promesses pour aller chercher des votes. Mais comme François n’est pas complètement fou, je me suis demandée ce qu’il cachait derrière toutes ces promesses. Et surtout comment il entendait les réaliser.
Il m’a fourni la réponse quand il a dit qu’il savait gérer les « égos », qu’il savait « compter », qu’il savait « gérer ». C’est vrai que François Legault sait gérer. Il sait aussi compter. Il sait que l’argent ne pousse pas dans les arbres. Il sait aussi qu’il ne doit pas tout dire durant une campagne électorale.
Alors je me suis mise à sa place pour trouver les ressources financières qui pourraient fournir les liquidités dont un gouvernement de la CAQ aurait besoin. Tous les gens d’affaires autour de lui nous fournissent la réponse.
On sait que la dette du Québec incluant celle d’Hydro-Québec est très élevée. On sait aussi que le gouvernement libéral l’a fait augmenter très fortement depuis 10 ans. Cela étant dit, il faut la réduire, c’est ce que le chef de la CAQ a promis. Il parle de réduire ou couper des postes, en santé et dans les sociétés d’État, à Hydro Québec notamment. Cela va réduire un budget d’exploitation mais pas la dette. Alors, comment réduire la dette du Québec quand on sait que celle d’Hydro-Québec atteint 40 milliards de $.
François Legault ajoute aussi qu’il faut entre 2 et 5 milliards $ de plus pour rencontrer la facture des engagements pris à ce jour.
La façon rapide et peut-être la plus simple, dont la majorité des « hommes d’affaires » parle régulièrement, c’est de se défaire de certains actifs. Cela veut dire ou vendre des actifs ou des actions au « privé ». Vendre en tout ou en partie des actifs ou des composantes de nos sociétés d’État, surtout d’Hydro-Québec, est un vieux rêve des gens d’affaires. On privatise en tout ou en partie et le « cash rentre ». Voilà la solution rapide pour obtenir des liquidités et pour, en même temps, réduire la dette du Québec.
Évidemment tout le monde ne parle que de la dette brute (sans jamais la nommer) et non la dette nette, à savoir la dette brute moins les actifs qu’elle a permis d’acquérir.
Donc, on vend en tout ou en partie Hydro-Québec et le « privé » va gérer mieux, c’est bien connu, jusqu’à ce que ce dernier vide la caisse. Cela s’est fait ailleurs dans le monde. Il faudrait au moins se servir de ce que les autres ont appris, il me semble. Il faudrait apprendre de ces pays qui ont cédé au secteur privé leurs joyaux et qui ont dû les reprendre à gros prix. Cela fut un échec lamentable dans la majorité des pays où cela a été fait. Dans le cas de l’électricité, ce fut plus grave. Les sociétés privées n’ont pas investi en planification de leurs équipements de remplacement et ces pays ont vécu des crises énergétiques importantes.
Mais cette opération réduirait la dette du Québec de façon importante et procurerait des liquidités tout aussi importantes au gouvernement de François Legault.
Dans le cas de la santé, encore là on parle de tout régler rapidement. La solution est facile et rapide. On sait qu’il y a beaucoup de médecins au Québec et que nous pouvons soigner tout le monde. Mais pour soigner tout le monde, il faut augmenter le nombre d’heures travaillées par les médecins. La limite au nombre d’heures travaillées, c’est le budget du Ministère de la santé. On augmente le budget du ministère de la santé et on demande aux médecins d’augmenter leur nombre d’heures de travail. Plus de plafond de revenus pour les médecins! Plus de travail pour eux et plus de patients soignés.
Il y a deux façons de faire cela. D’abord avec plus d’argent à la santé. Dans la marge de manœuvre de nos ventes d’actifs il y aura des milliards pour la santé. Le chef de la CAQ l’a d’ailleurs clairement dit. Ensuite, on aura recours davantage au privé pour financer certaines infrastructures. Les cliniques de radiologie, que le Dr. Barette connaît bien car il était actionnaire dans l’une d’elles, en sont un bel exemple. On envoie plus de patients se faire soigner dans le privé sans frais, car les frais seront payés par le gouvernement évidemment. Le patient ne sentira rien! Mais il n’ira plus attendre des heures dans les hôpitaux. Il ira dans une clinique privée qui sera sûrement plus rapide.
On réduit de cette manière les investissements en immobilisation du Gouvernement et donc on limite son endettement, mais on augmente le budget d’exploitation du Ministère. Et comme le secteur privé est plus efficace, cela devrait nous coûter moins cher. Peut-être même que le secteur des assurances sera mis à profit!
Tout cela ne relève pas de la pensée magique. Cela relève d’une pensée à court terme. Si on vend des actifs d’Hydro-Québec par exemple, nous avons assez d’argent pour financer durant quelques années plusieurs services aux citoyens. Mais après dix ans, il faudra probablement reprendre certains actifs et réinvestir à nouveau et cela coûtera plus cher. Si l‘expérience des autres est un guide, les investissements requis pour garder les réseaux aux normes n’auront pas été faits et l’État devra réinvestir comme cela s’est passé ailleurs. Et cela a coûté très cher.
Après tout, François Legault a dit qu’il s’engageait pour dix ans. Après, ce ne sera plus son problème! Et tous les financiers seront très riches.
Il est temps que la CAQ se fasse poser des questions précises sur la manière dont elle va financer tous ses engagements. Il et temps de nous dire ce qu’un gouvernement de François Legault va vendre pour « mieux gérer » le Québec!
Pour lire le texte original, on va sur le site Indépendantes.org.
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