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Le samedi 23 avril 2022

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PDG : des revenus excessifs selon l’IGOPP

Dans mon billet de veille sur la finance responsable qui va paraître vendredi, je souligne la campagne de gestionnaires de fonds de placement responsable concernant les lacunes à la base des régimes actuels de rémunérations des dirigeants. Comme ils le signalent eux-mêmes, tout porte à croire que la maximisation de la valeur actionnariale nuit aux sociétés, car elle favorise les décisions à court terme en plus d’accentuer l’inégalité des revenus et l’instabilité politique propre aux sociétés polarisées. Le revenu médian des PDG de Wall Street a connu une croissance de 20% en 2011 par rapport à l’année précédente, alors qu’en Europe les salaires des patrons ont bondi de 17%.

Ces pratiques sont de plus en plus reconnues comme politiquement, économiquement et socialement nuisibles. On sent que le moment est venu pour définitivement changer les règles du jeu dans ce domaine. En ce sens, on peut dire que les travaux réalisés par Yvan Allaire dans le cadre de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP) apporte un cadre de légitimité renforcé à ces demandes dans la mesure où ils permettent de nous appuyer sur des arguments solides et clairs. Par exemple, le 22 mai dernier, l’IGOPP a rendu public une étude intitulée « Payer pour la valeur ajoutée: Trancher le nœud gordien de la rémunération des dirigeants » dans laquelle Yvan Allaire propose une série de cinq recommandations de politiques et de pratiques à l’intention des conseils d’administration. Entre autres, l’IGOPP recommande l’élimination graduelle des options d’achat d’action, la remise en question de la pratique courante d’établir la rémunération à partir de comparaisons avec les dirigeants de sociétés dites « comparables », le maintien de la rémunération des dirigeants à un multiple raisonnable de ce qui est payé aux autres employés de la société.

Cette prise de position en faveur d’un changement de règle doit être comprise comme une prise de conscience de la part des dirigeants actuels que le modèle qui s’est développé depuis 20-30 ans commence à dégénérer de façon dramatique dans une ploutocratie irresponsable. Qu’en outre, étant donné que le modèle de développement qu’il soutient est insoutenable, il soit urgent d’agir pour redonner au libéralisme cette dose de progressisme qu’il a en bonne partie laisser tomber en chemin. « Quels que soient les arguments invoqués pour expliquer et justifier les sommes considérables versées aux dirigeants, la criante disparité des revenus au sein de la société et au sein même des entreprises fait de cet enjeu, au mieux, un cri de ralliement pour ceux qui veulent une société plus équitable et, au pire, une plateforme pour démagogues. »

La prise de position des chercheurs de l’IGOPP va donc bien au-delà de la règle de la rémunération. Elle s’attaque à un modèle libéralisation à outrance, de financiarisation de l’économie, où « les marchés financiers en viennent à dénaturer les entreprises et infecter d’une cupidité contagieuse nos sociétés ». Cette idée est d’ailleurs au cours d’un ouvrage conjoint d’Yvan Allaire et Mihaela Firsirotu, « A Capitalism of Owners », dans lequel les auteurs proposent un plan d’action pour changer fondamentalement le fonctionnement du capitalisme : ramener un certain niveau de confiance et de loyauté au sein et autour des sociétés commerciales ; adopter une perspective à long terme dans leur gestion et leur gouvernance ; favoriser une prise en compte de toutes les parties prenantes dans le processus de prise de décisions.

Leur nouveau livre raconte des « contes financiers » pour expliquer comment les marchés financiers mettent les dirigeants d’entreprises à leur service et comment ils contaminent par une cupidité contagieuse les moindres racoins de la société civile. Ils décrivent et illustrent de plusieurs exemples la logique corruptrice des marchés financiers. Les auteurs s’attaquent directement aux politiques ultralibérales (des gouvernements faibles et des marchés dérèglementés) en démontrant qu’une société fonctionne mieux quand elle comporte des formes variées de propriété des entreprises, allant d’entreprises familiales, de coopératives, etc. En d’autres mots, ils sont favorables au développement d’une économie plurielle. Mais ils sont conscients qu’ils confrontent des forces politiques et économiques puissantes.

« Les politiques que nous proposons vont sans doute engendrer de grandes résistances, écrivent les auteurs, et être accueillies avec scepticisme ou fatalisme. Mais dans un système politique vraiment démocratique, ces politiques, si mises en œuvre, pourraient ramener un peu de bon sens et d’équité dans notre système économique. »

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