Je me répète souvent sur ce sujet, et je le ferai tant que la chose ne deviendra une évidence pour tous : les banques canadiennes sont solides parce qu’elles profitent d’un marché oligopolistique qui fait en sorte que, quoiqu’il arrive, elles ont la capacité d’imposer les tarifs qu’elles veulent aux usagers. En outre, leur pouvoir de nuisance sur l’économie canadienne est tel qu’elles peuvent réclamer des aides publiques lorsque la situation s’aggrave (114 milliards de dollars entre octobre 2008 et juillet 2010). Remarquez que, ceci étant dit, je ne suis pas favorable pour autant pour un système de laissez-faire ou de concurrence effrénée dans ce secteur. Bien au contraire : l’État devrait profiter du modèle oligopolistique pour s’imposer dans l’industrie (avec une banque publique), pour interdire l’utilisation des paradis fiscaux et imposer davantage le surprofit des banques !

Les annonces récentes des banques montrent que, malgré la situation économique qui se détériore, leurs profits explosent. Les cinq principales banques canadiennes ont dévoilé des profits cumulés imposants de 7,8 G$ pour le troisième trimestre. Cette performance a de loin dépassé les attentes prudentes des analystes, alors que les profits ont bondi de 45 % par rapport aux 5,38 G$ affichés au même trimestre de l’an dernier. Les cinq principales banques ont fait état d’une augmentation significative des dividendes versés aux actionnaires. Rappelons que les six grandes banques (les cinq grandes banques du ROC en plus de la Banque nationale) ont également cumulé un bénéfice net au-dessus des 7 milliards pour le deuxième trimestre, en hausse de 7,5 % sur un an. Pour les neuf premiers mois, le bénéfice cumulé de ces institutions approche donc les 22 milliards $.

Or, dans quel contexte se produit cette situation d’embellie des banques ? Malgré des avertissements du ministre des Finances Jim Flaherty et du gouverneur de la Banque du Canada Mark Carney, les Canadiens s’endettent à des niveaux records. L’endettement atteint des niveaux vus aux États-Unis avant la crise financière. En outre, la profitabilité des entreprises en général ne suit pas la même évolution que celle des banques. Les bénéfices d’exploitation des sociétés canadiennes se sont chiffrés à 71,9 milliards $ au deuxième trimestre, en baisse de 4,9% par rapport au trimestre précédent. Les bénéfices d’exploitation ont reculé dans 15 des 22 industries. Dans le secteur financier, la baisse au deuxième trimestre était attribuable à l’industrie de l’assurance. D’une année à l’autre, les bénéfices d’exploitation des sociétés canadiennes étaient 1,5% plus élevés au deuxième trimestre par rapport au deuxième trimestre de 2011. Dans le secteur non financier, les bénéfices ont diminué de 0,9%, alors que dans le secteur financier, ils ont progressé de 8,6%.