L’auteur invité est Patrick Artus, responsable des études économiques de Natixis.
La croissance de la production industrielle chinoise est actuellement de 9 % sur un an, contre 16 % à 18 % dans le passé. Et si le produit intérieur brut était mesuré correctement, on s’apercevrait qu’il ne progresse que de 5 % environ cette année, contre 9 % en 2011. De même, l’Inde, le Brésil, l’Argentine et la plupart des pays d’Europe centrale connaissent un ralentissement très net de leur croissance, et en particulier de leur croissance industrielle. Seuls quelques pays émergents conservent une croissance rapide (Indonésie, Pologne, Turquie), en raison d’une demande intérieure dynamique.
Pourquoi ce ralentissement aussi net en 2012 ? Il existe bien sûr une cause évidente : le fléchissement du commerce mondial, en progression de 4 % sur un an en valeur, contre 15 % à 20 % en période normale. Cette quasi-stagnation qui trouve son origine dans la récession en Europe et dans une croissance lente aux Etats-Unis affecte tous les pays, surtout les petites économies très ouvertes (Singapour, Malaisie, Slovénie…).
Mais ce ralentissement de la croissance a aussi des causes structurelles profondes et indépendantes du cycle des pays de l’OCDE. En Chine, il s’agit de l’échec de la politique de soutien de la croissance par les salaires. Leurs fortes hausses (15 % par an en moyenne) devaient doper la consommation et rééquilibrer la structure de la demande au profit de la consommation des ménages. Mais il n’en a rien été, car le taux d’épargne des ménages a continué à augmenter, compte tenu de l’insuffisance de la protection sociale et du niveau très élevé des prix de l’immobilier. L’effet principal des hausses de salaires a été de dégrader la compétitivité-coût de la Chine et de limiter la production de biens industriels peu sophistiqués : textile, cycles, équipement de la maison, électronique de base… La Chine est devenue un pays cher pour la fabrication de ces biens, avec un coût salarial unitaire dans l’industrie égal à 67 % de celui des États-Unis.
En Inde, les difficultés proviennent de l’incapacité de l’industrie à trouver des salariés supplémentaires, en raison du faible niveau d’éducation de la population (55 % d’analphabétisme). De ce fait, la capacité de production de l’industrie stagne, les salaires augmentent très rapidement (20 % par an) et la hausse de la demande intérieure pour les produits industriels n’est satisfaite que par les importations. D’où l’énorme hausse du déficit extérieur (250 milliards de dollars sur un an) ainsi que celle du taux de change et l’instabilité financière.
Au Brésil, enfin, le recul de l’investissement des entreprises et de la production industrielle est attribuable à la surévaluation du change : le real reste en effet surévalué de 30 % au moins en termes réels, ce qui ronge la capacité industrielle du pays.
Pour lire le texte original, on va sur le site du magazine Alternatives Economiques.
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