Les jeunes québécois se sont mobilisés avec intelligence et inventivité pour s’opposer à la hausse inacceptable des droits de scolarité. Ils ont contribué à la victoire, certes fragile, mais importante du parti de Mme Marois, qui a d’ailleurs immédiatement annoncé qu’elle annulera par décret la hausse des droits ainsi que la loi 78. Mais il n’y a pas que les étudiants qui brassent la cage dorée des dirigeants de droite; même les jeunes gens d’affaires montréalais se distinguaient du courant de pensée réactionnaire du patronat québécois en demandant des États généraux sur l’éducation. Est-ce le signe d’une nouvelle génération qui arrive, qui partage une nouvelle vision des enjeux actuels ? Ce ne serait sûrement pas étranger au fait que cette génération est durement frappée par les politiques actuelles. Et je ne parle même pas du déficit écologique dont ce sera elle qui fera les frais. Je parle des politiques économiques stupides qu’on dit prendre en son nom (réduire les déficits publics pour les générations futures).
Dans les économies développées, ainsi qu’en Asie du Sud, peu de progrès ont été réalisés en vue d’atténuer l’impact de la crise économique mondiale. En Europe, le taux de chômage des jeunes reste bloqué à un niveau de crise (12,7 %). Dans les économies développées en général, la situation serait pire que ne le laisse penser le taux de 18 % du chômage chez les jeunes s’il n’y avait pas beaucoup de ces jeunes découragés qui ont décidé de rester dans le système éducatif. En Afrique du Nord, le taux de chômage des jeunes a fortement augmenté suite au printemps arabe, enregistrant une hausse de près de 5 points de pourcentage entre 2010 et 2011.
En tant que champion de la politique de rigueur, le Royaume-Uni est un cas à part. En 2010, la Fondation du Prince de Galles dédiée à l’accompagnement des jeunes en difficulté n’a pas hésité à parler d’une « génération perdue, dans le sens où l’irruption de la précarité et du chômage de masse laissera de profondes séquelles sur les revenus, le bien-être, la santé, la participation ». En 2011, le chômage des jeunes britanniques des 16-24 ans a atteint un taux record de 22,5 %. Ce taux a dépassé le record de 1993 sous l’ère Thatcher. Près d’un million de jeunes de moins de 25 ans sont au chômage ou dans une grande précarité. Selon des intervenants, lors des émeutes de décembre 2010, ce n’était pas tant la réaction à la mort d’un jeune aux mains de policiers, que de l’exaspération généralisée qui ont poussé les jeunes à participer. Ils ont constaté que dans la majorité des cas, les émeutiers vivaient en situation de pauvreté et de précarité. Plutôt que de donner une raison particulière à leur participation aux émeutes, ils ont dénoncé un climat généralisé d’injustice : les dépenses des députés, l’austérité et la monarchie.
Au Canada la situation n’est peut-être pas aussi tragique, mais elle est préoccupante. Alors que la conjoncture économique est fragile mais somme toute assez encourageante, le taux de chômage des jeunes reste stable autour de 15% (mais lorsqu’on tient compte de ceux qui ont un emploi à temps partiel non désiré il s’élève à 20%). Mais le taux d’emploi des jeunes a baissé de six points de pourcentage. La crise financière et les politiques conservatrices aggravent la situation : les travailleurs âgés doivent remettre à plus tard une retraite méritée parce que leur épargne a fondue comme neige au soleil; de nouveaux retraités doivent même retourner sur le marché du travail.
C’est dans ce contexte qu’a paru en France un manifeste signé par plus de 60 associations, fédérations et mutuelles, mouvements de jeunesse, organisations de jeunesse et d’éducation populaire, structures d’insertion, d’hébergement ou de santé constituant ensemble l’observatoire le plus exhaustif et expérimenté de la jeunesse française : Pour un Big Bang des politiques jeunesse. Il propose de rompre avec une logique de dispositifs et de mesures, pour passer à une logique de droit. Autour d’une idée centrale « Un droit pour tous à construire son parcours et à vivre dignement » le manifeste décline en 5 propositions :
• un droit à l’éducation-formation tout au long de la vie,
• la mise en place d’un service public de l’information, de l’orientation et de l’accompagnement des jeunes,
• une allocation versée directement à tous les jeunes en contrepartie de l’engagement que prend chaque jeune majeur,
• une refonte de la politique de l’emploi et du travail pour que chacun prenne sa place,
• une réelle prise en compte des jeunes à la vie collective pour en faire des acteurs du changement.
C’est justement ce que réclament les intervenants sociaux britanniques. Selon eux, « les dispositifs bâtis avec plus ou moins de succès par les travaillistes sont démantelés ou privatisés par le gouvernement conservateur ». Le fonds pour les emplois d’avenir avait créé 41 000 emplois en juillet 2010, il n’en existe plus que 900 fin 2011. On mentionne la fermeture de centre d’action sociale (Community center), des centres d’orientation professionnelle, ou encore la suppression de l’allocation de poursuite d’études accordée sur critères sociaux à partir de 16 ans. Pour le gouvernement, la suppression de l’EMA représente une économie budgétaire de 550 millions de livres. Or, dans un sondage de janvier 2011, sept étudiants sur dix affirmaient que sans l’EMA, ils devraient abandonner leurs études.
Discussion
Pas de commentaire pour “Les jeunes sont frappés durement par les politiques économiques actuelles”