Les auteurs invités sont Yvan Allaire et Michel Nadeau, respectivement président du conseil et directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques(IGOPP). Ce texte n’engage que ses auteurs.
L’univers du placement a beaucoup changé au cours des cinq dernières décennies. Comme le démontrent Allaire et Firsirotu (Plaidoyer pour un nouveau capitalisme, éditions IGOPP, 2010), la période moyenne de détention des actions cotées sur les grandes bourses est passée de huit ans à moins de neuf mois. Plus de la moitié des transactions sur le parquet proviennent de « traders » qui veulent faire un profit rapide.
Les fonds de spéculation inventent de nouvelles entourloupettes financières pour réaliser des gains immédiats. Les dirigeants des fonds de couverture (hedge funds) et d’investissement privés (private equity funds) reçoivent de mirobolantes rémunérations, mais celles-ci sont considérées, et taxées, comme des gains en capital !
Dans cet univers d’« actionnaires-touristes de passage » et de « spéculateurs-joueurs de casinos », les marchés financiers exercent une pression énorme sur les directions des entreprises et leurs conseils d’administration pour obtenir des résultats financiers qui mousseront la valeur du titre à court terme, mais seront nuisibles à plus long terme.
Mesures aux effets pervers
Pour limiter l’impact de cette vision tronquée de l’entreprise, l’Institut sur la gouvernance propose (Propriété et performance des grandes entreprises canadiennes, Y. Allaire, IGOPP, 2008) que le droit de vote aux assemblées ne soit accordé qu’aux actionnaires propriétaires de leurs titres depuis au moins un an. Aussi, en ce qui concerne la fiscalité des gains en capital et des revenus de dividendes, Québec devrait innover en distinguant le spéculateur du chef d’entreprise qui bâtit avec son milieu des entreprises durables pour la croissance de l’économie du Québec.
Au lieu des mesures fiscales annoncées aux effets pervers, le nouveau gouvernement pourrait innover en ce domaine, par exemple, en taxant le gain en capital à 100% si le bien ou le titre faisant l’objet de ce gain a été détenu pour moins d’un an, incluant lors de l’exercice des options d’achat sur le titre accordées aux dirigeants d’entreprises.
Une telle taxe contribuerait à stabiliser l’actionnariat des sociétés cotées en bourses, corrigerait un tant soit peu certains excès de rémunération et recevrait l’appui d’une forte majorité de Québécois, même parmi les « nantis ».
Audace et courage
On devrait laisser au niveau actuel la contribution fiscale du chef de PME, qui a patiemment construit une entreprise performante dont il veut céder une partie ou tout le capital. Comme certains de ses prédécesseurs l’ont fait avec la création du régime d’épargne-actions ou la mise sur pied des fonds de travailleurs, le ministre Nicolas Marceau doit saisir l’occasion de faire preuve de courage et d’audace en adaptant les valeurs de son parti à la fiscalité du nouvel environnement économique et financier du Québec de 2012.
Pour lire le texte original, on va sur le site du Devoir.
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