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Le samedi 23 avril 2022

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Développement du secteur manufacturier : pourquoi c’est crucial

Il y a quelques semaines, Louise Harel, la chef de Vision Montréal, s’élevait contre la désindustrialisation « galopante » de Montréal. En 10 ans, on parle de 60 000 emplois manufacturiers perdus, 20 millions de mètres carrés de terrains contaminés, des usines qui ferment les unes après les autres.

Plusieurs raisons militent en faveur d’un effort particulier au développement du secteur manufactiruer. La première est le haut niveau des salaires favorisé par un secteur manufacturier fort. Les salaires y sont supérieurs (35% plus élevés que le salaire moyen au Québec), en particulier pour les personnes peu qualifiées, pour qui l’emploi manufacturier est un moteur de promotion sociale. Par ailleurs, le manufacturier est une source majeure d’innovation, qui irrigue tout le reste de l’économie. C’est aussi la clé de la réduction du déficit commercial puisque les produits industriels représentent la plus grande part des échanges commerciaux. Et c’est d’autant plus important pour une petite économie ouverte comme celle du Québec, qui exporte 56% de tout ce qu’il produit (au Japon c’est seulement 21%). Enfin, le secteur manufacturier est essentiel à la promotion d’une économie verte.

En toute logique, il serait donc normal qu’une des premières mesures de relance du manufacturier à Montréal serait, comme le propose Vision Montréal, de donner un coup de pouce majeur en matière de décontamination. En 2009, un rapport de la Commission sur le développement économique a établi à 800 millions de dollars les besoins en la matière « pour une superficie équivalant à 6% de la ville ». Or, le plus récent programme de décontamination, ClimatSol, a disposé d’un budget de 50 millions entre 2007 et 2012 et il y aurait toujours 8 millions inutilisés. Pour faire bouger les choses, Mme Harel propose, dans la tradition des sommets de concertation de l’époque péquiste, la tenue d’un forum sur l’emploi manufacturier, auquel participeraient Québec et les partenaires socioéconomiques.

Rappelons qu’en début d’année, la firme Deloitte a publié une étude qui faisait ressortir les forces du secteur manufacturier québécois. On y constate que le déclin du secteur manufacturier québécois est relatif. La fabrication compte encore pour 16,5% du produit intérieur brut du Québec. C’est moins que l’Allemagne ou le Japon, mais plus que la Grande-Bretagne ou les États-Unis, qui sont autour de 10%. Le consultant responsable de la recherche note que les pays qui ont conservé le plus d’emplois manufacturiers sont ceux dont le gouvernement ne se gêne pas pour intervenir dans l’économie. Il souligne aussi qu’il faudrait penser au coût total de possession avant de décider de délocaliser sa production. Le coût total de possession est la somme des coûts de fabrication d’un produit, incluant le taux de change, le coût de transport, le coût environnemental et le coût des intermédiaires. Or pour lui, la nouvelle économie en émergence porte moins sur la compétitivité salaire que les autres facteurs (transport, innovation). La hausse durable des prix de l’énergie et des transports semblent aller dans le sens d’un potentiel de relocalisation des activités vers les pays développés.

La volonté d’agir du nouveau gouvernement sur les enjeux environnementaux a été mise en évidence en septembre. Il faut maintenant montrer que les partis d’opposition n’ont pas le monopole du développement économique. Nos attentes sont fortes, pas tant pour les résultats immédiats, que sur la vision que ce gouvernement voudrait offrir pour une relance de l’emploi. La politique industrielle du gouvernement devrait soutenir les entreprises et les secteurs en vue d’une réindustrialisation « par le haut ». Pour nous, cela passe obligatoirement par un plan de reconversion écologique de l’économie. Il faut consolider le secteur manufacturier traditionnel et aller au-delà en proposant le développement d’une économie verte : certes, des emplois manufacturiers dans la fabrication des équipements de transport collectif, mais aussi dans les services de transport, dans les énergies décarbonisées, dans les services de récupération et recyclage, etc.

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