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Le samedi 23 avril 2022

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Spécial compétitivité – Le « choc de compétitivité », une idée paresseuse à enterrer

L’auteure invitée est Pascal Riché, rédacteur en chef du journal en ligne Rue89.

La France est au bord du gouffre déflationniste, et les patrons des grandes entreprises ne jurent que par un « choc de compétitivité », une formule inventée par l’un des leurs, Louis Gallois, qui a remi son rapport au gouvernement. Comme si c’était l’alpha et oméga des solutions à la crise actuelle, la décision magique à la portée du pouvoir politique.

En réalité, la formule que proposent les patrons, une baisse des cotisations patronales de 30 milliards, ne serait un choc que pour les Français et leur consommation, car elle serait financée par l’impôt, TVA ou CSG.

Pour ce qui est de son effet sur la compétitivité, il resterait à démontrer. Les inconvénients d’une telle mesure sont certains, les avantages sont hypothétiques : on comprend les hésitations du gouvernement à s’engager sur cette voie…

Les succès allemands mal interprétés

Les défenseurs du « choc » font valoir que c’est par une telle réforme que l’Allemagne a réussi à contenir la hausse du coût du travail et regagner des parts de marché à l’exportation. Rien n’est plus faux.

Certes, en 2007, Angela Merkel a augmenté de 3% la TVA, mais la baisse des cotisations sociales qui a accompagné cette hausse était minime : une baisse de 0,55% des cotisations sociales patronales !

La vérité, c’est que les gains de compétitivité des entreprises exportatrices allemandes sont liés à bien d’autres facteurs :
• le positionnement de ses entreprises sur les biens d’équipement ou l’automobile haut de gamme ;
• l’effort mis sur la qualité ;
• la capacité des moyennes entreprises à chasser « en meute » sur les marchés étrangers ;
• la capacité de dialogue avec les salariés…

Certes, la maîtrise des coûts du travail a joué un rôle, mais elle n’est pas liée à la baisse des cotisations salariales : elle est le résultat d’accords passés avec les syndicats pour modérer la progression des salaires et elle n’a été possible que parce que les prix de l’immobilier allemand sont restés sages.

C’est une donnée qu’on oublie toujours de mentionner, et que le mensuel Alternatives Economiques vient opportunément nous rappeler dans son dernier numéro. Du fait du vieillissement accéléré de sa population, le nombre d’Allemands décroît, et les logements sont en surnombre. Résultat : alors que les prix et les loyers ont doublé en quinze ans en France, ils sont restés plats en Allemagne (un logement coûte 1 300 euros du m2 en Allemagne, trois fois moins qu’en France !).

Si la France a besoin d’un « choc », c’est chez Cécile Duflot, ministre du Logement, qu’il faut le préparer : une baisse des loyers aurait, en France, une véritable efficacité économique.

Une simple dose de produit dopant

Il n’est pas question de nier ici le problème des exportations : le recul des parts de marché des entreprises françaises à l’international est manifeste, avec des conséquences dramatiques en termes d’emploi. Mais réduire la résolution de ce problème à une formule mécanique – le déplacement de 30 milliards des entreprises vers les consommateurs – relève de la paresse intellectuelle. La compétitivité doit se gagner sur divers fronts : innovation, qualité, recherche, formation, éducation…

La baisse des cotisations dans les actions à entreprendre n’est rien d’autre qu’une petite dose de produit dopant, comparable aux dévaluations d’antan. Et cette dose a un coût élevé si elle est financée par les consommateurs.

Baisser les prélèvements pesant sur le travail, cette denrée de plus en plus rare, n’est pas une mauvaise idée. Mais le faire en ponctionnant, d’une autre main, les salariés ou les retraités, alors que la France vacille déjà au bord de la récession, n’en est pas une. D’autant qu’il existe d’autres pistes possibles pour y parvenir : réformer le financement de la protection sociale, par exemple, pour qu’il pèse moins sur le secteur industriel et davantage sur les entreprises peu exposées.

Pour lire le texte original, on va sur le site de Rue89.

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