Depuis trois décennies, on parle et on écrit beaucoup à propos de la crise de l’État-providence. Certains (ceux qui voudraient voir les État réduits à leur plus simple expression) s’en réjouissent, mais d’autres la déplorent, craignant à juste titre de voir revenir une période de croissance des inégalités et de crises sociales. C’est pour mieux comprendre la situation qu’une nouvelle étude publiée par le Cepremap (le Centre pour la recherche économique et ses applications, Paris) intitulé L’État-providence en Europe : performance et dumping social propose une mesure de la performance des États-providence européens.
Réalisée par Mathieu Lefebvre, docteur en économie et chercheur à l’université de Liège et Pierre Pestieau, docteur en économie de Yale University, cette mesure vise à permettre de comparer la performance des pays de l’Europe des quinze avec celle des douze nouveaux membres. Elle donne aussi la possibilité de tester l’hypothèse d’un éventuel dumping social à l’œuvre dans ces pays, souvent dénoncée de part et d’autre. Pour les deux chercheurs, le débat sur la crise supposée de l’État providence, ses causes et les éventuels remèdes qu’elle appelle, se déroule le plus souvent sans s’appuyer sur de bonnes mesures de performance. D’où l’objet de l’étude de présenter une évaluation de la performance des États-providence européens fondée sur une construction d’indicateurs synthétiques communs. Ces indicateurs mesurent le degré avec lequel chaque État-providence réalise cinq objectifs fondamentaux : la réduction des inégalités, la lutte contre la pauvreté, la réduction du chômage, la qualité de la santé et de l’éducation.
Sans surprise, les pays nordiques présentent les meilleurs résultats. En revanche, l’entrée des douze nouveaux membres a eu un effet contrasté. Il ressort en effet de leur analyse que les pays de la vieille Europe, et tout particulièrement l’Allemagne et la France, ont des États-providence qui sont performants, moins cependant que les pays nordiques. En dépit de la mondialisation, nous disent les auteurs, ils n’observent pas (du moins jusqu’à présent) de réduction des performances des États-providence européens. Par ailleurs, certains des nouveaux membres de l’Union européenne, telles la République Tchèque ou la Slovénie, font aussi bien que les meilleurs de l’Europe des quinze, alors que d’autres, la Roumanie et la Bulgarie en particulier, sont à la traîne. Néanmoins, ils observent un processus de rattrapage parmi les nouveaux pays membres au cours des quinze dernières années. Les pays qui, initialement, étaient les moins performants ont connu une hausse de leur performance plus élevée que la moyenne. Selon les deux auteurs, il serait faux de dire qu’on observe un dumping social suite à l’inclusion des nouveaux pays provenant de l’ex-bloc soviétique.
Ces résultats confirment en quelque sorte les conclusions de l’étude de Pierre Gouin et Gabriel Sainte-Marie Les services publics: un véritable actif pour les ménages québécois, publié l’an passé par l’IREC. Dans cette étude, les auteurs constatent que les services publics permettent une redistribution de la richesse pour la grande majorité des contribuables, dont les moins favorisés, ou qui ont des besoins spécifiques.
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