L’auteure invitée est Laurène Fauconnier, pour Metis, correspondances européennes du travail.
Plus de 300 juristes issus de 28 pays européens adressent un manifeste aux dirigeants de l’Europe. Les signataires appellent à respecter et à promouvoir les droits sociaux fondamentaux mis à mal par la crise et les politiques d’austérité. Ces juristes sont universitaires pour la plupart et spécialisés en droit social ou en droit du travail.
Leur manifeste s’inscrit dans la droite ligne de la Déclaration de Philadelphie adoptée par l’OIT en 1944.
Ils en rappellent l’esprit et les principes :
« - le travail n’est pas une marchandise,
- les libertés d’expression et d’association sont essentielles pour un progrès durable,
- la pauvreté n’importe où dans le monde constitue partout un danger pour la prospérité. »
Ils soulignent que « cette déclaration est le point de départ de la construction du fragile modèle social européen. »
Dans son ouvrage ‘L’esprit de Philadelphie, la justice sociale face au marché total’, Alain Supiot, signataire du manifeste, s’était dès 2010 érigé en procureur pour dénoncer les trahisons de cet esprit de Philadelphie.
Les signataires protestent aujourd’hui contre l’accélération depuis 2008 des réformes fondamentales du droit du travail et contre le contournement des mécanismes de consultation collective, notamment avec les syndicats. Ils dénoncent de même les réformes structurelles imposées par la troïka (Commission, BCE, FMI). « Ces mesures loin de résoudre la crise économique et financière l’ont aggravée et menacent à présent la viabilité, non seulement de l’Europe sociale mais du projet plus large d’intégration économique et politique européenne ».
Ils rappellent que « les droits sociaux fondamentaux des travailleurs et de leurs représentants ne doivent pas être subordonnés aux libertés du marché intérieur et au droit de la concurrence, pas plus qu’aux mesures d’austérité, qu’elles soient basées sur la politique budgétaire ou sur une aide financière. »
« L’actuelle Commission européenne avec la troïka ne respecte pas pour l’instant les éléments fondamentaux du modèle social européen et l’esprit de la Déclaration de Philadelphie ».
Pour preuve, les mesures de flexibilité adoptées pour les entreprises qui ont conduit à modifier les droits nationaux du travail, les attaques à l’encontre de la négociation collective, par exemple l’interdiction de négociation collective sectorielle, ou encore la possibilité de déroger dans les contrats individuels aux normes minimales collectives du travail. Ils citent également les déréglementations « considérables et parfois radicales » des marchés du travail et de la protection sociale. Toutes mesures qui conduisent à « un rejet de l’Europe » et de ses valeurs, le développement de la xénophobie et qui « mettent en danger la paix de l’Europe ».
Seront-ils entendus ?
Pour en savoir plus, on peut trouver sur le site de l’ETUI (european trade union institute) le texte complet du manifeste et la liste des signataires.
Pour lire le texte original, on va sur le site de Metis, correspondances européennes du travail.
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