Les médias ont fait grand bruit du rapport du Département d’État des États-Unis (maintenant dirigé par le ‘faucon climatique’ John Kerry) concernant le projet de pipeline Keystone XL, qui doit transporter le pétrole des sables bitumineux de l’Alberta vers les raffineries du sud des États-Unis pour être exporté partout dans le monde. Ce rapport, le Draft Supplemental Environmental Impact Statement (EIS), donnait vraiment l’impression que le Département d’État se montrait sinon favorable, du moins assez neutre, étant donné les impacts environnementaux du pipeline que l’on défini comme étant ‘négligeables’.
Or on apprend que le rapport ne provient pas du Département d’État mais plutôt d’une firme de consultants, Environmental Resources Management (ERM), qui aurait été payé par TransCanada, c’est-à-dire le promoteur du projet de pipeline Keystone XL ! ERM serait l’un des leaders du secteur des analyses d’impacts, ayant fait affaire avec toutes les grandes entreprises, en particulier avec les grandes pétrolières. Ce fait ne devrait pas nous surprendre, après ce que nous avons vu au Québec : un gouvernement qui coupe tellement dans la fonction publique qu’il doit faire appel au privé pour ses analyses parce qu’il n’a plus l’expertise à l’interne, ce qui ouvre la porte à tous les dérapages, collusion et corruption.
Il n’y a donc pas lieu de se surprendre, non plus, que les conclusions du rapport de la firme ERM sur les impacts environnementaux de Keystone XL signalent que « unlikely to have a substantial impact on the rate of development in the oil sands and will not likely result in significant adverse environmental effects ». Maintenant on comprend beaucoup mieux ces résultats : la firme qui a écrit ce rapport était en conflit d’intérêt majeur. Pour ne pas nuire à sa capacité d’obtenir de nouveaux contrats de l’industrie pétrolière (l’un des plus importants clients dans ce domaine) elle ne pouvait pas produire un rapport qui leur aurait déplu.
En l’occurrence, le rapport limite le périmètre de son analyse principalement aux impacts directs du pipeline. Ainsi, dit-elle dans le rapport, puisque le pipeline est enterré profondément, les impacts prévisibles sont négligeables… Là-dessus, faudrait demander aux résidents de Mayflower (Arkansas), qui vient de connaître un déversement de plusieurs milliers de barils de pétrole provenant des sables bitumineux, ce qu’ils en pensent ! Mais sur les impacts climatiques découlant de l’exploitation et du raffinage du pétrole provenant des sables bitumineux, le rapport souligne que l’approbation du pipeline par l’administration Obama n’aurait aucun impact puisque les décisions concernant le développement des champs bitumineux ont déjà été prises!
Or, c’est tout à fait faux. Si effectivement la décision de doubler (pour passer de 1,6 million de barils par jour à 3,1 d’ici 2020) ou même de tripler la production du pétrole issu des sables bitumineux (5 millions bpj d’ici 2030) a déjà été prise, la réalisation effective des pipelines qui transporteront ce pétrole vers les marchés extérieurs (principalement asiatiques, puisque c’est surtout là que la demande est en croissance) sera la condition ultime pour cette décision de réalise véritablement. Sans pipeline pour ajouter des voies d’exportation, on estime que le développement des sables bitumineux s’arrêterait à ce qui est présentement en développement, soit autour de 2,5 millions bpj. À lui seul, Keystone XL représente un potentiel de près de 1 million de bpj.
Pour conclure, on peut se réjouir de la décision récente de Placements NEI (le fonds de placement responsable détenu conjointement par Desjardins et les credit unions du ROC) d’exclure les actions de la firme Enbridge de ses fonds de placement responsable. Faute d’entente avec le conseil d’administration par rapport aux risques que le projet d’oléoduc Northern Gateway représente pour les investisseurs (en raison de l’opposition des Premières Nations), Placements NEI a vendu ses actions de l’entreprise basée à Calgary.
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