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Le samedi 23 avril 2022

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La taxe carbone apparaît de plus en plus comme une partie de la solution

J’ai déjà abordé dans un billet l’utilité de pouvoir considérer tous les instruments utiles permettant d’intégrer dans les prix des biens les externalités négatives, c’est-à-dire principalement leurs impacts environnementaux. Dans le domaine de la lutte aux changements climatiques, la capacité d’intégrer les impacts négatifs des émissions de GES dans le prix des énergies fossiles reste encore aujourd’hui l’un des principaux enjeux à résoudre. Deux grandes solutions sont possibles : le marché du carbone qui s’adresse principalement aux grands émetteurs; la taxe carbone qui s’applique plutôt directement à tous ceux qui consomment une énergie fossile, lorsqu’ils réalisent une transaction.

Dans le rapport de recherche de l’IREC sur la mobilité durable que nous avons dévoilé il y a quelques semaines, nous questionnons la stratégie du gouvernement Charest qui, dans son Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques, décidait de financer la lutte au réchauffement à partir des revenus issus en totalité de la vente de droits d’émission de GES sur le marché du carbone. En soi, la création d’un tel marché n’est pas une mauvaise nouvelle. Il en coûtera davantage aux grandes entreprises pour émettre une tonne de GES et si les estimations sont exactes, les revenus associés à la vente de permis d’émission s’élèveraient à 425 millions $ par année à partir de 2015-2016, ce qui dépasse largement les revenus de 200 millions engendrés par la redevance actuelle sur les émissions. Pourtant, à voir le fonctionnement du marché des quotas d’émission de l’Union européenne, il semble périlleux de faire reposer la politique sur le seul marché du carbone. Il y a quelques semaines, le prix de la tonne de carbone a atteint un prix plancher historique de 2,81 euros en Europe.

Thomas Crocker, l’économiste à l’origine de la théorie du plafonnement et de l’échange des droits de pollution, est lui-même sceptique quant à l’efficacité d’un système de marché comme solution au réchauffement climatique. Dans ce contexte, affirme-t-il, une taxe sur le carbone serait un moyen plus efficace pour régler ce problème. Le débat est loin d’être clos. D’autant plus que, dans un article récent paru dans La Presse, on affirme que la taxe carbone mis en place en 2008 en Colombie-Britannique n’aurait eu qu’un très léger impact négatif sur l’activité économique de cette province. Par contre, du point de vue environnemental, c’est un succès : « La consommation moyenne [des carburants assujettis à la taxe] par des Britannico-Colombiens a chuté de 15,1% depuis 2008, tandis que les ventes par personne dans le reste du Canada ont augmenté de 1,3% ». Le gouvernement libéral de la Colombie-Britannique a donc décidé de garder la taxe en place, qui lui rapporte environ 1,2 milliard $ par année, mais de ne pas l’augmenter au-delà de 30$ par tonne (niveau actuel).

Ce qui est tout à fait nouveau, par ailleurs, c’est que le plus grand émetteur de GES, la Chine, aurait récemment décidé de mettre en place un ensemble de nouvelles taxations pour protéger l’environnement, y compris une taxe carbone, alors que gouvernement actuel de l’Australie, un autre pays qui fait partie (comme le Canada) du club des grands émetteurs de GES par capita, a lui aussi décidé en 2012 (comme 29 autres pays du monde selon l’OCDE) de mettre en place une taxe carbone au prix de départ de 23$ la tonne. Pour couronner le tout, même le pdg d’ExxonMobil, Rex Tillerson, se prononce en faveur. À la question d’un journaliste du BusinessWeek, il répond : « At some point policymakers will get around to dealing with additional policies around climate in ways to incentivize certain behaviors. There are different models, one of which is cap-and-trade, which Europe has been trying now with not a lot of success. If you’re going to undertake a policy with those characteristics, a carbon tax is much more straightforward. It’s much simpler to administer, and it doesn’t leave itself open to as much gaming. »

Selon une recherche publiée dans la revue Nature, le retard dans la lutte aux changements climatiques va faire exploser les coûts, donc par le fait même le prix du carbone dans le futur. Un prix mondial (ou une taxe) de 20$ la tonne de CO2, aujourd’hui, permettrait d’avoir 60% de chance d’éviter une hausse de température de plus de 2oC. Or, si nous attendons jusqu’en 2020 avant de prendre une telle mesure de taxation du prix du carbone, c’est au prix mondial de 100$ la tonne que nous pourrions avoir le même 60% de chance d’éviter une hausse de température de plus de 2oC.

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