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Le samedi 23 avril 2022

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L’industrie, notre bien commun

L’auteur invité est Gabriel Colletis, professeur de sciences économiques à l’université de Toulouse I-Capitole.

Profitant d’une inquiétude grandissante et fortement médiatisée, le patronat français n’a cessé de clamer l’urgence d’un « choc de compétitivité » dont devraient bénéficier les entreprises, et l’impérieuse nécessité d’une baisse du coût du travail. Leurs attentes n’ont pas été vaines puisque le gouvernement leur a concédé, via un crédit d’impôt, une baisse de ce coût que l’on peut estimer entre 3 % et 4 % de la masse salariale.

Les entreprises ont pu obtenir cet avantage sans engagement de contrepartie de leur part, alors même que ses effets sur leur compétitivité sont incertains : le maintien, voire l’augmentation, des dividendes versés aux actionnaires pourrait être le principal résultat de cette baisse du coût du travail. Si cet avantage leur a donc été concédé, c’est que les entreprises et leurs actionnaires ont su endosser à leur profit les attentes des Français dans le domaine économique. L’équation économie = entreprises = actionnaires semble très largement admise.

Le temps est cependant venu de se poser une question : l’industrie peut-elle continuer d’être considérée comme un bien privé ? La seule alternative à la propriété privée est-elle la nationalisation ? D’autant que ces nationalisations sont, en fait, des opérations d’étatisation (transitoire) et ne constituent bien souvent qu’une opération de socialisation des pertes, prélude à une privatisation ultérieure des bénéfices…

Des secteurs, des produits, ou encore des réalisations phares, comme Airbus ou le TGV, constituent une part importante du patrimoine de la France et des Français. L’industrie, aujourd’hui, doit de nouveau être considérée comme le bien de tous les Français et non celui des détenteurs du capital, que ceux-ci soient privés ou publics.

L’industrie dispose en effet des caractéristiques principales d’un bien commun : elle doit être gérée dans le sens de l’intérêt général et non dans celui des détenteurs du capital et par eux ; cette gestion doit être pensée dans la durée et non surdéterminée par l’horizon de très court terme que lui imposent les marchés financiers ; les liens de production ne doivent pas occulter les liens sociaux entre producteurs. L’entreprise comme l’usine sont d’abord des organisations humaines. C’est bien d’ailleurs parce que nos voisins considèrent les choses ainsi que l’industrie allemande connaît des succès durables.

Si l’industrie était considérée comme un bien commun, comme une composante d’un patrimoine vivant, non seulement il deviendrait plus difficile de fermer des usines ou de délocaliser, mais le sens de notions comme la compétitivité, les charges et même la rentabilité serait interrogé. Le travail, toujours considéré comme un coût dans la vulgate actuelle, pourra être doté d’une représentation différente : celle d’un apport de connaissances et d’expériences, une « habileté ». L’entreprise, enfin, serait bien celle des parties prenantes et ne pourra plus fonctionner comme simple lieu de création de valeur actionnariale. La responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise prendrait alors tous son sens.

Pour lire le texte original, on va sur le site d’Alternatives Economiques n° 322 – mars 2013.

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