La Confédération syndicale internationale (CSI) estime dans un nouveau rapport que les recommandations du FMI dans le cadre de la troïka relatives au marché du travail sont une atteinte à la démocratie et font courir le risque d’une dictature économique en Europe et au-delà. Elles ne peuvent que générer plus de divisions et de troubles sociaux, sans bénéfices économiques certains.
Le rapport « Nouveaux Fronts » 2013 de la CSI, intitulé « Les assauts du FMI contre les négociations collectives : une posture idéologique sans fondement économique », sera publié à la veille des réunions de printemps du FMI, à l’heure où des taux record de chômage et des inégalités croissantes caractérisent l’économie mondiale.
Selon Sharan Burrow, secrétaire générale de la CSI, ce rapport montre qu’il n’existe aucune justification économique à ces attaques répétées contre les droits du travail, avec leur impact dévastateur sur les familles, les communautés et les économies.
« L’économie mondiale n’est en rien plus stable qu’elle ne l’était il y a cinq ans. Les institutions internationales sont en train d’échouer à réguler la rapacité spéculative et à prévenir une prochaine crise bancaire.
Des instruments de redistribution de la richesse comme le droit de négociation collective sont laminés – alors même que les faits montrent au contraire que les pays dotés de syndicats forts, d’une large couverture conventionnelle et de régimes de négociation collective synchronisés disposent d’avantages économiques certains.
Mettre en œuvre des réformes du marché du travail en affaiblissant les institutions qui le protègent, au moment même où la demande de main-d’œuvre a fortement décru et que le chômage atteint des sommets condamnera inévitablement de nombreux autres salarié(e)s à rejoindre les rangs des chômeurs », a indiqué Sharan Burrow.
Sharan Burrow rencontrera la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, lors d’un panel ; à cette occasion, elle soulignera combien la rigueur aggrave les inégalités.
« Les pays avec des régimes de négociation collective robustes ont systématiquement obtenu de meilleurs résultats en termes de baisse du chômage, en particulier grâce à une distribution des salaires davantage compatible avec une plus grande cohésion sociale et une croissance économique stable. »
Selon l’OCDE, les revenus des 10% des employé(e)s qui gagnent le plus ont rapidement augmenté, par rapport aux 10% les plus pauvres dans la plupart des cas, aggravant davantage la longue évolution vers un creusement des inégalités.
Les nouvelles données des États-Unis révèlent que la part des revenus des ménages après impôt du 1% qui gagne le plus a plus que doublé, passant de pratiquement 8% en 1979 à 17% en 2007. Durant la même période, le pourcentage des 20% les plus pauvres de la population est passé de 7% à 5%.
Les analyses des politiques de rigueur menées par le groupe Initiative for Policy Dialogue de l’université de Columbia et par le South Centre, en utilisant des données du FMI, ont révélé que 119 pays sur 181 vont entamer des compressions budgétaires en 2013. Selon les projections, ce chiffre devrait augmenter jusqu’au moins 2016, et avec lui, les inégalités.
La CSI en appelle à un nouvel ordre du jour fondé sur des preuves économiques réelles.
« La confiance a été rompue par les politiques de rigueur et des réformes draconiennes du marché du travail. Pour reconstruire cette confiance, les attaques contre la négociation collective et les droits du travail doivent cesser. Augmenter les salaires des travailleurs dans les pays qui ont systématiquement enregistré un excédent commercial, et garantir pleinement leurs droits – voilà qui stimulerait la demande globale et aiderait à ré-équilibrer l’économie mondiale », a indiqué Sharan Burrow.
Michael Sommer, président de la DGB/Allemagne et de la CSI, ajoute : « Ceux qui, en Allemagne, font fonctionner le pays et produisent sa richesse méritent d’en avoir leur part équitable ».
Le rapport de la CSI conclut que la croissance durable, des emplois décents pour tous, l’efficacité économique et une plus grande justice sociale constituent des ambitions communes qui exigent des régimes de négociation collective à large couverture et de robustes institutions du travail dans tous les pays.
John Evans, économiste en chef de la CSI, a déclaré qu’ « une plus grande égalité économique, et une mise au pas des intérêts privés, voilà l’impératif pour sortir de la Grande récession, exactement comme après la Grande dépression et la Seconde guerre mondiale ».
Pour lire le rapport « Nouveaux Fronts » 2013 de la CSI, on clique ici. Le rapport et son résumé seront disponibles en français, en espagnol et en allemand à partir de la fin avril 2013.
Le rapport passe en revue les droits de négociation collective en Australie, en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis et dans plusieurs pays d’Europe dont les pays scandinaves ; des chapitres sur la Roumanie, la Grèce, l’Espagne et le Portugal sont également inclus.
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