Le 27 septembre dernier, le Groupe Intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié la première partie de son cinquième rapport qui fait le bilan des connaissances scientifiques actuelles relatives à l’évolution du climat. Il faut savoir que les rapports du GIEC ne s’appuient pas sur des collectes de données, mais produisent plutôt un bilan des connaissances scientifiques actuelles par le biais d’une recension exhaustive des écrits. Le document publié est la synthèse adressée aux décideurs politiques, la version complète de ce premier rapport suivra sous peu. Alors, quelles sont les conclusions principales de ce rapport? Confirme-t-il les rapports précédents?
Avant de présenter les grandes conclusions contenues dans le rapport, il est important de mentionner un élément de contexte important : les données ainsi que les modèles climatiques développés sont plus précis que lors des derniers rapports comme les technologies qui supportent les collectes de données s’améliorent sans cesse. Ainsi, les rapports les plus récents du GIEC deviennent de plus en plus précis et les conclusions sont aussi de plus en plus solides.
Des changements climatiques et une contribution humaine confirmés
Le rapport du GIEC va tout à fait dans le sens des rapports précédents. D’abord, il confirme que les changements climatiques sont réels et que, depuis l’après-guerre, des changements observés dans la température des océans, la fonte des glaciers, les niveaux de la mer ou les concentrations de gaz à effet de serre sont d’une ampleur inégalée dans le présent millénaire. Le rapport souligne que chaque décennie a été plus chaude en moyenne que la précédente depuis 1850 et que la période de 1983-2012 est la plus chaude depuis 1400 ans.
L’existence des changements climatiques fait rarement l’objet de contestations sérieuses. Ce qui est questionné plus fréquemment est la contribution des activités humaines à ces changements. Le rapport du GIEC est sans équivoque : il souligne que : « L’influence humaine sur les changements climatiques est claire. […] Il est extrêmement probable que l’influence humaine soit la cause principale du réchauffement observé depuis les milieux du 20e siècle [traduction libre] ».
Finalement, une des conclusions les plus inquiétantes du GIEC est le fait que la plupart des conséquences du réchauffement se poursuivront pour plusieurs centaines d’années, et ce, même si on arrêtait complètement les émissions de CO2. Par exemple, la fourchette d’élévation prévue du niveau de la mer (au niveau des émissions actuelles) est de 25cm à 1 mètre.
En somme, le rapport indique que : les changements climatiques sont confirmés, l’influence humaine sur ceux-ci est avérée et les effets se feront sentir même si on mettait en place des mesures extrêmes pour éliminer les émissions de CO2.
Des conclusions exagérées ou minimisées?
Au cours des prochains jours, on entendra certainement les voix des climats-sceptiques qui critiqueront les modèles utilisés ou qui feront peut-être un certain procès d’intention aux signataires du rapport. D’un autre côté, certaines personnes soulignent déjà que les conclusions de ce rapport sont volontairement conservatrices afin de suivre « un « principe de moindre étonnement », selon lequel une hypothèse ou un résultat a plus de chances d’être accepté s’il ne heurte pas par ses aspects spectaculaires ou dramatiques » (Le monde, 28 septembre 2013). À notre avis, la quantité d’informations qui ont été synthétisées, le profil des signataires et ce dernier principe de précaution scientifique font en sorte que ce rapport doit être pris au sérieux et intégré à la fois aux politiques publiques et aux pratiques des organismes sociaux.
L’injustice climatique
Un des motifs importants pour lequel ce rapport doit être pris au sérieux, en plus des effets probables sur l’ensemble de la planète, est l’aspect fondamentalement inéquitable des effets des changements climatiques. Bien que les modèles régionaux soient beaucoup moins précis que les modèles globaux, il apparait que les effets seront différenciés selon les régions et que celles touchées seront les régions intertropicales ainsi que les zones plus fragiles du globe (montagnes, régions polaires, littorales, etc.). Le creusement des inégalités nord-sud, le phénomène des réfugiés climatiques ou encore l’aide internationale d’urgence nécessaire en cas de catastrophe climatique seront des effets incontournables qui affecteront à la fois les politiques des États, mais aussi les pratiques des organismes internationaux. Les injustices climatiques sont une réelle menace à notre capacité collective d’améliorer la situation globale des populations.
Et après? Des rapports plus thématiques?
Certains observateurs critiquent la formule des rapports du GIEC qu’ils considèrent comme étant trop général et pas assez fréquent (le processus est très lourd). On encourage plutôt le groupe à travailler sur des enjeux précis et de publier des rapports plus fréquemment dans le futur. Par exemple, on propose de se pencher sur des thématiques comme la question alimentaire spécifiquement ou le niveau des océans. Ces approches thématiques seraient aussi un outil beaucoup plus efficace de prise de décision et de plaidoyer pour les organisations de la société civile qui agissent autour d’enjeux spécifiques. Si le rapport du GIEC est un incontournable en ce qui a trait à la richesse de son contenu et sa capacité de sensibiliser les décideurs et la population aux effets des changements climatiques, il demeure que certaines améliorations sont encore souhaitables par rapport à son format et la fréquence de publication.
[...] réduire les émissions de GES. Cependant, comme le soulignait mon collègue Jean-Frédéric Lemay dans son billet de la semaine dernière, ce rapport est contesté par des écologistes de renom (je ne réfère pas ici aux nombreux [...]