Réunis à Beloeil le 8 septembre dernier les responsables du Fonds Solidarité Sud ont décidé de mener leur campagne de 2013-1014 par un soutien à une organisation paysanne sénégalaise. Rappelons que le Fonds Solidarité Sud est une association de solidarité internationale et un outil financier : il dispose depuis l’an dernier de deux catégories de fonds: a) un fonds de dotation de capital inaliénable dont seuls les intérêts peuvent être utilisés pour soutenir des projets au Sud ; b) un fonds de soutien à des projets dans le Sud, appelé Fonds «Club des 100». La campagne publique est coprésidée par Laure Waridel, Gérald Larose, André Beaudoin (trois amis du Fonds) et deux agriculteurs québécois délégués par UPA DI qui sont partis récemment au Sénégal, une agricultrice de Bedford et un agriculteur de Mont-Saint-Hilaire. Thème de la campagne: agriculture familiale durable, sécurité alimentaire et organisations paysannes. Le tout dans le cadre de 2014 Année internationale de l’agriculture familiale telle qu’adoptée par l’ONU comme ce fut le cas des coopératives en 2012. La campagne se régionalisera au cours de l’automne et de l’année 2014. Dans plusieurs régions du Québec, notamment en Estrie, à Québec et au Saguenay de même que dans l’Outaouais (et d’autres en préparation, notamment Montréal et la Montérégie) se tiendra soit une conférence, un dîner-causerie ou un 5 à 7. Le tout parfois croisé avec un encan silencieux ou une exposition photos.
L’enjeu de la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest
La tragédie des terres en Afrique de l’Ouest dont le Sénégal est celle de terres arides. Année après année les différentes agences humanitaires de l’ONU ou de grands pays du Nord y reviennent avec des milliers de tonnes de riz. Est-ce une fatalité ? La sortie de ce cycle continue d’urgence humanitaire est possible affirment d’entrée de jeu les dirigeants de organisations paysannes de ce sous-continent qui répondent sans hésitation NON ce n’est pas une fatalité ! C’est le cas de l’Union des groupements paysans sénégalais de Meckhé dans la région de Thiès à deux heures de la capitale Dakar que le Fonds soutiendra. Elle n’est pas la seule.
Mais quel est le pourquoi de cette situation commune à une douzaine de pays d’Afrique de l’Ouest? Au premier banc des accusés, la spéculation sur les prix des produits agricoles à la bourse de Chicago. Puis le changement climatique modifie les conditions de production de l’agriculture des ces pays fortement dépendants des aléas de la pluie qui ne vient qu’une fois l’an en combinant sécheresses et inondations selon les saisons. L’absence de politiques publiques en matière d’agriculture et d’alimentation et le recul marqué de l’aide publique au développement de ce secteur n’ont fait qu’empirer les choses.
Résultat, les crises alimentaires se sont enchaînées (2005, 2008, 2010, 2012…) étant donné la hausse des prix des aliments, les difficultés de stockage et de commercialisation et la faiblesse des moyens pour affronter à la source les sécheresses récurrentes. Bref, si on voit un peu la chose dans sa globalité, un des enjeux de la prochaine décennie sera de nourrir leur population, particulièrement dans les zones plus sensibles et sortir du cycle de l’urgence pour en finir avec l’insécurité alimentaire. Le dernier rapport du GIEC qui a fait la manchette récemment confirme le diagnostic. Au rythme où l’activité humaine – basée essentiellement sur l’énergie fossile – bouleverse le climat de la planète, la hausse des températures risque de provoquer de graves pénuries alimentaires qui frapperont de plein fouet les plus démunis d’ici à peine deux ou trois décennies,……L’inaction internationale nous conduit vers une hausse qui pourrait…déclencher une cascade de changements cataclysmiques, dont des vagues de chaleur extrême, une chute des stocks alimentaires et une montée du niveau de la mer frappant des centaines de millions de personnes rapportait récemment Alexandre Shields dans le journal Le Devoir (un dossier de grande qualité de samedi le 28 septembre Rapport du GIEC – Le péril climatique s’accentue).
La situation au Sénégal et les efforts des paysans pour s’organiser
Le développement d’une caisse d’épargne et de crédit rural, l’électrification de 90 villages au solaire entrepris depuis quelques années, la commercialisation collective de leurs produits par la mise sur pied de coopératives, la formation de jeunes agriculteurs (en collaboration avec UPA DI), un système de prêt rotatif pour soutenir le développement de nouvelles terres, voilà ce que l’UGPM fait depuis 1985, une organisation exemplaire et bien déterminante pour cette région. L’UGPM a 5000 membres. Elle réunit pas moins de 2050 exploitations familiales dans une région de 200 000 habitants. Et dans un proche avenir, grâce en partie à l’appui du Fonds Solidarité Sud, l’UGPM disposera d’une banque de semences paysannes. Pour ceux et celles qui s’intéressent de plus près à la chose, on peut visionner une vidéo de 5 minutes d’une autre organisation partenaire de l’UGPM, l’OCI Terre solidaire/SIDI de France.
À coup sûr tout ce travail se situe dans une perspective où il y a nécessité que ces initiatives locales soient également relayées au niveau national par une politique de souveraineté alimentaire. C’est précisément ce que l’UGPM fait : elle se déploie sur plusieurs fronts pour améliorer le sort des exploitations familiales de leurs membres tout en s’inscrivant dans une démarche globale de souveraineté alimentaire. Grâce à l’UPA DI qui a fait connaître cette organisation et quelques autres d’Afrique de l’Ouest (notamment au Burkina Faso, en Guinée, au Mali et au Sénégal), la FAO a découvert ou redécouvert les vertus de l’agriculture familiale durable sécurisée par des organisations paysannes bien ancrées dans leurs villages. Notamment, l’enjeu du stockage des produits agricoles et de services semenciers collectifs pour assurer la sécurité alimentaire. Bref si les petits paysans demeurent isolés et laissés à eux-mêmes ils ne sont pas en mesure de se donner des services et ne seront jamais capables de rivaliser avec l’agriculture industrielle, ce que nous appelons l’agrobusiness» de dire André Beaudoin secrétaire général d’UPA DI, organisation avec laquelle le Fonds a développé un partenariat comme il l’avait fait l’an dernier pour son soutien à une coopérative forestière au Honduras avec SOCODEVI.
La solidarité des Québécois avec des agriculteurs sénégalais n’est pas banale
Quand on sait que 70% de la production mondiale de riz est le fruit de l’agriculture familiale, l’enjeu devient celui de la mise en marché. L’UPA DI qui aide localement cette mise en marché fait de cette pratique un axe stratégique : appuyer la mise sur pied de systèmes collectifs de mise en marché permettant à de petits exploitants de dégager des surplus et donc de sortir de la pauvreté et d’une économie exclusivement de subsistance. C’est le sens de l’appui proposé à l’UGPM et de la collaboration du Fonds Solidarité Sud avec UPA DI. La question alimentaire, tant dans sa dimension locale que planétaire, est/sera plus que jamais à l’ordre du jour. Pas seulement en 2014. Pour plus d’informations on va sur le site du Fonds, rubrique du bulletin de septembre.
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