CESD-Oikos-989x90

Le samedi 23 avril 2022

Recherche:

Lutte contre la pauvreté ou lutte contre les inégalités ?

participation_globalL’auteur invité, Louis Favreau, est titulaire d’une Chaire de recherche en développement des collectivités (CRDC) depuis 1996 à l’UQO

La planète Terre : un fond de scène d’inégalités et une sérieuse fracture Nord-Sud

En raccourci, le problème social numéro un à l’échelle de la planète se résume ainsi : 600 millions de riches et 6 milliards de pauvres. De plus les deux dernières décennies de mondialisation néolibérale ont vu l’économie informelle (petits boulots, « travail au noir »…) devenir prévalente dans la plupart des pays du Sud. À l’échelle internationale, le travail salarié s’affaissant et l’économie informelle progressant, du coup, l’État social, là où il y en avait un, s’est affaibli et même littéralement dissout là où il n’était encore qu’en émergence. […]

Finalement, dans la dernière décennie, un troisième enjeu est devenu plus visible sur la scène publique internationale : la mondialisation en cours a favorisé un tel débridement de la finance que les séquelles au Sud n’ont fait que s’amplifier : du krash boursier au Mexique en 1994 en passant par celui des pays de l’Est en 1997 et celui de l’Asie au tournant de l’an 2000 alors que l’on venait tout juste de s’aligner sur les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), sorte de pacte entre les pays pour vaincre la pauvreté. Et, aujourd’hui, crise financière internationale partie des E.U. (2008)…. Bref, un troisième défi majeur, celui de la maîtrise de l’économie mondialisée.

La crise alimentaire, révélatrice d’une crise profonde à l’échelle de la planète

37 pays sont menacés de crise alimentaire selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Un peu partout dans le monde, le prix de certaines denrées alimentaires de base a explosé notamment celui des céréales. La crise alimentaire est une crise à l’échelle de la planète au sens le plus fort de ce terme. Des enjeux en apparence très locaux sont aussi très internationaux et sont redevenus majeurs aujourd’hui. Responsables : des multinationales et les principaux gouvernements des pays du Nord, États-Unis en tête. Menace sur la gestion de l’offre au Québec et au Canada qui garantit pourtant, malgré tous ses défauts, aux consommateurs comme aux producteurs, un minimum d’équité quant au prix et à la qualité pour certains produits comme les œufs, le lait et la volaille. Menace encore plus marquée pour de nombreux pays du Sud dont l’agriculture locale a été orientée vers l’exportation mettant du coup à mal la diversité de leurs produits. Menace aussi pour les agricultures nationales car la concentration autour de quelques pôles d’agriculture industrielle et le contrôle par les transformateurs et les grandes chaînes alimentaires risquent de s’accentuer. Bref, ici et encore plus au Sud, la souveraineté alimentaire est à l’ordre du jour. […]

Que faire : lutte contre la pauvreté ou lutte contre les inégalités ?

Au plan international, la façon d’aborder cette question nous renvoie au choix suivant : l’humanitaire ou le développement ? C’est depuis près de 50 ans que la notion de développement fait l’objet d’importants débats et de visions fort différentes, opposées même au sein de toutes les institutions internationales. Après l’échec fortement ressenti des coopérations étatiques des pays capitalistes du Nord dans le Sud et celui démoralisant des mouvements de libération nationale et de leur modèle « développementiste », qu’est-il resté ? Le concept a été mis à mal et ramené par le FMI et la Banque mondiale à la seule question de la lutte contre l’extrême pauvreté.

En près de 50 ans, nous sommes passés de la décolonisation, et des espoirs qu’elle suscitait alors, à une mondialisation ultralibérale. Ce début de basculement du monde n’a-t-il provoqué que du désenchantement ? Point culminant du désenchantement : l’abandon à toute fin pratique du thème du développement dans les années 90, simultanément à l’effondrement du bloc socialiste. La seule perspective alors présente : la montée des droits de l’Homme et plus largement la montée de l’humanitaire devenu la quasi-exclusive finalité légitime dans les rapports entre nations par ces temps d’incertitudes. Et avec l’an 2000 la grande initiative des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). […]

Les objectifs du millénaire pour le développement : grande hypocrisie ou ouverture à une redistribution de la richesse ?

Les OMD entrent donc en scène en l’an 2000. La mobilisation devient majeure. Longtemps banalisée par les grandes institutions financières internationales (FMI, BM et OMC), les agences et programmes spécialisées de l’ONU (FAO, OMS, OIT, PNUD…) vont progressivement organiser tout au long des années 90 des conférences internationales auxquelles un certain nombre d’ONG seront invités à prendre place pour contrer la force montante du FMI et consœurs.

C’est dans cette foulée que vont émerger les OMD qui deviendront alors les incontournables lignes de force de la lutte internationale contre la pauvreté (malheureusement confondue avec celle du développement). Mais si les premières années de cette mobilisation canalisent les énergies de presque toutes les institutions internationales et d’un nombre considérable d’ONG, les objectifs de ce discours obligé apparaissent dépourvus de moyens mais surtout dépourvus de capacité de s’attaquer aux inégalités derrière cette pauvreté. […]

En somme, au plan international, la grande impensée demeure la lutte contre les inégalités, perspective qui échappe presque totalement aux grandes institutions économiques internationales portées par le credo néolibéral, credo qui n’exclut pas de son univers des objectifs humanitaires pourvu qu’on en reste à ceux-ci. Le développement durable est également une notion qui peut s’avérer efficace dans le traitement des questions climatiques, énergétiques, alimentaires notamment au chapitre des coûts de transport, de l’efficacité énergétique, de la délocalisation de la production, etc. C’est actuellement le meilleur point d’entrée alternatif à la croissance tout azimut au sein des institutions internationales.

Reste la grande question : avons-nous des alternatives à ce néolibéralisme mondialisée ? Le Forum social québécois réunissait en cet automne 2009 des milliers de militants et de dirigeants d’organisations s’interrogeant à ce propos. Début de quelque chose de neuf à savoir que des groupes locaux et nationaux du Québec s’internationalisent peu à peu dans l’action collective qu’ils ont entreprise.

On peut lire le texte complet sur le blogue de Louis Favreau

Discussion

Pas de commentaire pour “Lutte contre la pauvreté ou lutte contre les inégalités ?”

Commentaire

Inscrivez votre courriel ci-dessous pour recevoir le bulletin hebdomadaire:

Agenda Public

Un code est requis pour ajouter des evenements a l'agenda.
Appuyez sur "Obtenir un code" ci-dessous pour s'inscrire.

Si vous avez un code, inserez votre code ci-dessous:

Votre compte étant nouveau, s'il vous plait enregistrer vos informations:











Informations sur l'evenement a ajouter: