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Le samedi 23 avril 2022

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2014, reprise du cours « normal » de la crise systémique globale

L’auteur invité est le Laboratoire européen d’anticipation politique (LEAP). Extrait du bulletin GEAB no 82.

L’avalanche de liquidités issue du quantitative easing de la Fed a permis en 2013 aux logiques du monde d’avant de se réveiller : endettement, bulles, mondialisation, financiarisation… Mais il a suffi d’un léger ralentissement dans les montants astronomiques injectés chaque mois par la banque centrale américaine pour que la crise rampante, enfouie sous ces monceaux de liquidités, reprenne ses droits. Comme anticipé, la méthode consistant à « résoudre » la crise en accentuant les excès qui l’ont causée est inopérante, provoquant au contraire une crise au carré. On peut y trouver tout de même un avantage réel : elle permet de gagner du temps que tout le monde utilise au mieux.

Tout au long de l’année 2014, nous allons à nouveau assister au déploiement « normal » de la crise systémique globale, phase de transition majeure entre deux systèmes d’organisation mondiale, une crise historique qui va bien au-delà d’une crise économico-financière, on commence à le voir clairement. C’est pourquoi aux côtés des graves dangers pesant sur les bourses, les banques, l’immobilier et plus généralement l’économie, l’ordre du jour comprend également l’amplification de la colère des peuples et du rejet des systèmes politiques en place, l’aggravation des tensions géopolitiques et le repli des blocs sur eux-mêmes.

La courroie de distribution de ce renouveau de la crise est mue en premier lieu par le taper (réduction du programme de QE de la Fed) qui a immédiatement entraîné les secousses que l’on sait sur les monnaies émergentes. Outre l’impact néfaste que cela a sur l’économie mondiale, notre équipe anticipe que ces chocs vont provoquer un effet boomerang sur les États-Unis et enclencher pour finir l’engrenage de la dévaluation massive du dollar, déstabilisant tout ce qu’il reste de l’ancien système dont il est le pilier.

Plan de l’article complet :
1. LE MAUVAIS CALCUL DU TAPER
2. FIN DES LOGIQUES DU PASSÉ
3. FAIRE SAUTER LA BANQUE ?
4. COLÈRE DES PEUPLES

Nous présentons dans ce communiqué public un extrait de la partie 1.

LE MAUVAIS CALCUL DU TAPER

Derrière la décision de la Fed d’arrêter progressivement son programme d’assouplissement quantitatif se cachent plusieurs réalités. La première est évidemment son inefficacité envers l’économie réelle et surtout les risques de plus en plus grands qu’il fait courir en créant bulles et addictions diverses, et en distordant toute capacité d’appréhension de la réalité. La deuxième tient sans doute à la volonté de « montrer » que la situation s’améliore et que la Fed peut se désengager sans risque. La troisième est moins avouable : consciente de l’addiction créée en 2013 des pays émergents envers les liquidités de la Fed, son annonce ne pouvait manquer de faire trébucher ceux-ci. Ils font donc maintenant les gros titres de la presse économique, tandis que la situation américaine passe au second plan. Qui se rappelle en effet que le Porto Rico est en train d’exploser (comme anticipé au GEAB n°77) ? Ou que Chicago ne se sort pas de ses dettes, ou que les foodstamps, pilier de l’aide sociale américaine, continuent d’être rabotés alors que de plus en plus de ménages en dépendent ? Ou enfin que la pauvreté infantile atteint des niveaux difficilement imaginables pour un pays prétendu développé ?

Pourtant – on nous excusera la reprise facile d’une publicité devenue célèbre – il y a un deuxième effet KissCool. Pour le voir, nous devons prendre de la hauteur et revenir aux fondamentaux quitte à simplifier une situation mondiale que personne actuellement ne comprend vraiment.

Le quantitative easing de la Fed a eu pour conséquence une surabondance de liquidités sur les marchés financiers qui sont allés investir cet argent là où de vraies dynamiques productives fournissent des opportunités d’investissements et de fructification : dans les pays émergents. Bien évidemment, cette inondation d’argent facile a soutenu artificiellement la croissance de ces pays, qui aurait dû être moins élevée en ces temps de crise. Pis, en 2013, cela a provoqué un regain de logiques du monde-d’avant, monde dans lequel l’argent n’est utilisé que pour emprunter plus d’argent, avec au programme re-financiarisation, ré-endettement, ré-addiction au dollar, ré-intrication de la planète, re-mondialisation effrénée ignorant les intérêts des populations (fournissant par exemple un ballon d’oxygène aux fastidieuses négociations des traités de libre-échange trans-pacifique TPP et transatlantique TTIP), etc.

Cette absorption de dollars par les seuls pays ayant une croissance suffisante pour pouvoir les utiliser explique en grande partie l’absence de dévaluation du dollar ou d’inflation aux États-Unis malgré la politique de la Fed : la dévaluation qui aurait dû aller de pair avec une telle création monétaire, a été absorbée par le dynamisme économique du reste de la planète.

Mais quelque chose a fait que la Fed ne pouvait plus continuer. Probablement le fait que pour avoir un quelconque impact sur l’économie américaine, les quantités d’argent créé auraient dû augmenter constamment, ce que de plus en plus de monde dans les cercles de la Réserve Fédérale elle-même renâclait à faire. Rester au même niveau de 85 milliards de dollars par mois, correspondait de fait déjà à un ralentissement. Dans ce cas, autant rétrograder et tenter de sortir du piège.

Depuis début janvier, la Fed a ainsi réduit de 10 milliards de dollars le rythme mensuel de ses achats, et à nouveau de 10 milliards début février, soit à présent des achats de 30 milliards de titres hypothécaires et 35 milliards de bons du trésor par mois. Or cette baisse du soutien signifie que le quart de « l’aide » indirecte aux pays émergents s’est envolée… Il est donc logique que l’activité économique de ces pays baisse, et par conséquent aussi leur monnaie.

C’est là que commence l’effet boomerang. Premièrement, les investissements occidentaux dans les économies émergentes valent d’autant moins que la monnaie se dévalue, donc une part des actifs des investisseurs a bel et bien disparu, provoquant une forte tension sur les marchés financiers. Mais, plus important, pour enrayer la baisse de leur monnaie, les banques centrales des pays émergents vendent leurs réserves de dollars pour racheter leur propre monnaie sur les marchés, résultant en un surplus de dollars et une hausse de la demande de monnaie locale, ce qui fait mécaniquement monter la monnaie locale. Par exemple, dans ce genre de période la Turquie, l’Inde, le Brésil, l’Indonésie entre autres, se délestent chacun de l’ordre de dizaines de milliards de dollars par mois.

Cela signifie que d’acheteurs de dollars, les émergents sont devenus vendeurs. En d’autres termes, les seuls pays capables d’absorber les dollars excédentaires les rejettent maintenant. Récapitulons : la Fed et le trésor continuent d’inonder la planète de 65 milliards de dollars par mois, mais plus personne n’en veut… Où peuvent-ils s’écouler dorénavant ? Dans les quelques pays producteurs de pétrole qui le vendent encore en dollar, mais surtout aux États-Unis bien sûr. Et que peut en faire l’économie atone de ce pays ? Pas grand-chose… certainement pas autant que ce qu’en faisaient les émergents. [...]

Pour lire le texte original, avec les nombreuses références, on va sur le site de LEAP.

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