Tiré de La documentation française, une présentation du processus de consultation et de délibération pour des engagements en faveur de la mer, du littoral et de l’Outre-mer, dans une perspective de développement durable.
A la tête du second espace maritime mondial (après les États-Unis), la France peut-elle devenir un modèle en matière de gestion des pêches et de protection de la biodiversité marine ? Le Grenelle de la mer, qui s’est conclu le 28 juillet 2009 par la publication de 138 engagements recensés dans le Livre bleu, peut-il y contribuer ?
I. Le Grenelle de la mer, sur le modèle du Grenelle de l’environnement
Le Grenelle de l’environnement visait à définir de nouvelles actions pour assurer un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Le Grenelle de la mer prolonge cette démarche, en s’intéressant plus particulièrement aux secteurs des activités maritimes et côtières. A ce titre, il reprend la méthode du « dialogue à cinq » initiée lors du premier Grenelle.
Entre avril et mai 2009, les représentants de l’État, des collectivités locales, d’organisations non gouvernementales, de salariés et d’entreprises ont ainsi réfléchi ensemble aux évolutions de la politique de la mer et du littoral, en métropole et en outre-mer. Réunis en quatre groupes de travail, consacrés aux problématiques des zones côtières, des ressources et potentialités de la mer (alimentation, énergie, etc.), des métiers (pêche, marine marchande, etc.) et des niveaux de gouvernance (mondial, européen, national), ils ont élaboré 600 propositions. […]
II. Les engagements recensés dans le Livre bleu
Le Grenelle de l’environnement s’est jusqu’à présent traduit par la loi du 3 août 2009 qui fixe les premières orientations concernant la mise en place d’une trame verte et bleue, la création d’autoroutes de la mer ou le développement des aires marines protégées. Le « Livre bleu des engagements du Grenelle de la mer » dépasse ces pistes d’actions. Il est destiné à définir une stratégie maritime à long terme et à constituer « la boussole du Grenelle de la Mer et de la Nation toute entière pour les dix années à venir« . Il recense 138 engagements, déclinés en quatre rubriques principales : l’énergie, le transport, les ressources halieutiques (pour la pêche), les pollutions.
Le Livre bleu rappelle l’engagement de la France à intégrer 23 % d’énergies renouvelables dans sa consommation d’énergie finale à l’horizon 2020 (50 % en Outre-mer et 30 % à Mayotte). Dans ce scénario global, la contribution des différentes énergies marines est estimée à 3 % à l’horizon 2020. Le « plan énergie bleue » devrait permettre de produire plus de 6 000 mégawatts d’énergies marines en 2020 en utilisant l’énergie marémotrice, les éoliennes flottantes, la force motrice des courants avec les hydroliennes et l’énergie thermique des mers.
Dans le domaine des ports et des transports maritimes, le Livre bleu préconise la mise à l’étude du concept de « port durable » (économe en foncier, moins pénalisant pour l’environnement), ainsi que la création d’une filière française de démantèlement de navires civils ou militaires.
Concernant la protection des ressources halieutiques et de la biodiversité, la priorité doit être donnée à l’extension (notamment en Polynésie française) des aires marines protégées, qui devront représenter 20 % des zones économiques exclusives avant 2020. Elle doit s’accompagner du classement d’espèces commerciales menacées d’extinction (thon rouge, requins) parmi les espèces protégées et de l’amélioration des mesures de protection des mangroves (forêts de palétuviers des zones humides et marécageuses du littoral tropical) et des récifs coralliens. Enfin, afin de développer et de valoriser les procédés de pêche durables, le Livre bleu recommande la création d’un centre technologique des pêches travaillant à l’amélioration de la sélectivité des engins de pêche.
Pour lutter contre les pollutions marines, le Livre bleu recommande de réduire les rejets des navires (gaz d’échappement, carburant, déchets, cargaison, ballast) avec un objet de « zéro rejet », ainsi que les pollutions d’origine terrestre (nitrates et phosphates), avec un objectif de « zéro rejet urbain non traité en 2030″. Sont également visées les pollutions issues d’activités maritimes autres que le transport, comme l’interdiction notamment des rejets des boues de dragage polluées. Parmi les autres propositions avancées figurent la définition d’un objectif mondial de réduction des gaz à effet de serre émis par le transport maritime et l’adoption d’une initiative européenne contre l’exportation des navires hors normes vers les chantiers navals des pays du sud.
Enfin, le Livre bleu propose qu’un comité opérationnel soit créé afin de conduire, en 6 mois, une réflexion sur les différents instruments financiers susceptibles de soutenir les actions maritimes. L’hypothèse d’une fiscalité propre appliquée usagers de la mer et de l’éco-conditionnalité aux aides publiques (consistant à subordonner le paiement d’aides publiques au respect de normes environnementales) devrait être privilégiée. […]
Outre le respect du principe de gouvernance à cinq, les participants aux Grenelle de la mer se sont réjoui des consensus dégagés concernant la nécessité de revaloriser les métiers marins et de protéger les écosystèmes marins et littoraux. Réagissant aux mesures annoncées par le chef de l’Etat le 16 juillet, l’une des associations participantes, WWF France, a indiqué que la France, aujourd’hui considérée comme un mauvais exemple, serait à même de devenir « leader en matière de gestion des pêches et de protection de la biodiversité marine, si de telles mesures [étaient] effectivement mises en application« .
Une condition soulignée par d’autres participants : les engagements pris devront être fidèlement traduits en dispositifs législatifs ou réglementaires.
On trouve le texte complet sur le site Vie Publique, La documentation française
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