L’auteur invité est la Coalition QuébecKyoto
Le gouvernement du Québec vient d’annoncer ses objectifs de réduction de GES de 20 % sous le niveau de 1990 pour la période 2013-2020. Pourtant, un vaste front commun de groupes environnementaux, syndicaux et autres réclamait l’adoption d’une cible et d’un plan d’action qui permettraient de réduire d’au moins 25% les émissions de GES d’ici 2020. Ces groupes rappellent au gouvernement du Québec les recommandations émises par la communauté scientifique réunie au sein du GIEC : les pays et nations industrialisés du monde entier doivent s’engager à réduire de 25% à 40% leurs émissions de GES d’ici 2020 pour contrer les changements climatiques. Ils estiment que si le Québec veut développer davantage son leadership dans la lutte aux changements climatiques en Amérique du Nord, il devra sans plus tarder s’attaquer à la source no1 des émissions de GES au Québec, le secteur des transports. Dans le texte qui suit, nous publions des extraits de la première partie du mémoire de la Coalition QuébecKyoto présenté la Commission des transports et de l’environnement tenues du 22 octobre au 4 novembre.
1. LES PRINCIPES DIRECTEURS SOUS –JACENTS À LA DÉTERMINATION DE LA CIBLE DE RÉDUCTION
1.1 Premier principe – Respecter les recommandations du GIEC
Le principe fondamental qui doit sous-tendre l’action du Québec comme d’ailleurs l’action de la communauté internationale et celle du Canada découle du quatrième rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat).
Selon ce rapport, pour éviter un réchauffement global dangereux, la limitation de la température mondiale ne doit pas excéder 2 degrés centigrade au dessus du niveau pré-industriel. Les réductions de GES généralement admises scientifiquement pour les pays industrialisés sont de 25% à 40% d’ici 2020 par rapport à l’année de référence 1990. En considérant une réduction de 25%, les émissions de GES au Québec en 2020 seraient de 62.5 Mt1, soit une réduction des émissions de GES pour la période 1990-2020 d’environ 22 Mt.
Fixer une cible moins ambitieuse que celle de moins 25% pour le Québec reviendrait à ignorer les préconisations des scientifiques sur le climat et celles de la communauté internationale […]
1.2 Deuxième principe – Limiter les conséquences non désirables résultant de la réduction des émissions de GES
Selon le document gouvernemental de référence, l’impact macroéconomique de la réduction de GES est fort limité. Ainsi pour un scénario de réduction de GES de 20 %, la variation du PIB sera de l’ordre de -0.16 % et la variation du revenu disponible réel sera de l’ordre de 0.07 %.
On peut raisonnablement conclure que pour un scénario de réduction de 25 %, l’impact sur le PIB serait de l’ordre de -0.2 %, sur le revenu réel de l’ordre de zéro et sur l’emploi de l’ordre de -0.04 % à l’horizon 2020.
Ainsi, selon le document gouvernemental, l’impact macroéconomique non désirable en terme de PIB, le revenu disponible et l’emploi est très faible voire non significatif, et ne devrait pas constituer un frein pour une action ambitieuse dans le domaine de la réduction des GES à l’horizon 2020.
1.3 Troisième principe – Augmenter les bénéfices et avantages associés à la réduction des émissions de GES
Le document gouvernemental précité analyse essentiellement les impacts macroéconomiques non désirables. Or il existe plusieurs avantages et bénéfices fort diversifiés résultants d’une dé-carbonisation vigoureuse de l’économie québécoise, que nous illustrons brièvement ici par quelques exemples.
1.3.1 Impacts sur le développement industriel et l’emploi
La lutte contre les changements climatiques offre plusieurs perspectives de développements industriels durables (technologies propres, efficacité énergétique, conservation de l’énergie, fabrication de matériel de transport, production d’énergie durable, etc.) Un nombre considérable de nouveaux emplois pourraient être créés dans ces domaines. Une politique industrielle audacieuse pourrait ainsi contribuer à l’émergence d’une industrie dite ‘durable’ qui pourrait revitaliser l’économie du Québec dans les grands centres urbains ainsi que favoriser un vigoureux développement régional.
1.3.2 Impact sur le commerce extérieur du Québec
Une réduction vigoureuse des émissions de GES aura un impact fort avantageux sur la nature du commerce extérieur du Québec.
Le Québec importe la totalité des combustibles fossiles utilisés sur son territoire. Il doit également importer la presque totalité de son parc de véhicules automobiles. Ces importations pèsent lourdement dans la balance commerciale du Québec. Une réduction de la dépendance du Québec aux énergies fossiles au profit des mesures de conservation et d’efficacité, de l’électrification des transports et de la production d’énergies renouvelables contribuera positivement à la balance commerciale.
D’autre part, l’émergence au Québec d’un secteur industriel dit ‘durable’ offrira d’importantes perspectives d’exportation d’équipement et de savoir-faire du Québec (secteur de consultation industriel, implantation d’industrie propre, etc.) Assemblée Nationale du Québec, Commission des transports et de l’environnement Quelle cible de réduction d’émissions de Gaz à effet de serre à l’horizon 2020 ?
La diminution de la circulation routière aura un impact favorable sur la réduction de la congestion dans les centres urbains. Le remplacement progressif du camionnage par le transport des marchandises par rail ou par voies maritimes aura aussi un impact favorable sur la qualité des routes du Québec : la durée de vie du réseau routier sera ainsi prolongée, ce qui contribuera à une diminution des frais d’entretien et de réfection. […]
1.4 Quatrième Principe – Promouvoir l’esprit de solidarité et le leadership sur le plan canadien et international
Par le passé, l’utilisation à grande échelle des énergies fossiles a contribué grandement à l’industrialisation et à l’enrichissement du Québec. Même si au Québec, les émissions de GES par habitant sont les plus basses de la fédération canadienne, elles demeurent plus élevées que celles de certains pays européens, et largement supérieures à celles des pays en développement tels la Chine et l’Inde. Dans ce contexte, le Québec, qui est historiquement responsable des changements climatiques à l’échelle mondiale, au même titre que de nombreux pays industrialisés, devrait manifester sa solidarité avec les pays en développement les plus pauvres et les plus menacés par les changements climatiques, en réduisant ses émissions aux niveaux prescrits par la communauté internationale pour les pays industrialisés.
Le Québec a manifesté son intention d’agir comme leader au plan canadien et sur la scène internationale. Il sera fort difficile de prétendre exercer un tel leadership tout en n’adhérant pas aux réductions proposées pour les pays industrialisés à l’horizon 2020.
On trouve le texte complet du mémoire de la Coalition QuébecKyoto sur le site de l’Assemblée nationale du Québec
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