« La faible position du Canada à Copenhague n’est qu’un symptôme seulement des lacunes du modèle d’affaires dans le secteur de l’énergie ». C’est de cette façon que s’ouvre le communiqué de presse du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) présentant leur nouvelle étude sur le secteur pétrolier au Canada.

Le nouveau document Public Interest or Private Gain: Reforming Canada’s Oil and Gas Industry signale qu’un modèle d’affaires basé sur la maximisation des profits et de la valeur des actions produit une industrie qui crée d’importants problèmes environnementaux, sociaux, économiques et politiques. Pour les auteurs, l’incapacité du Canada à jouer un rôle de premier plan dans le domaine du changement climatique international n’est qu’une des nombreuses conséquences négatives de la domination du secteur de l’énergie par les grandes sociétés à but lucratif, et au premier plan la place qu’y tient l’industrie de l’extraction du pétrole et du gaz. Pour eux, il est clair qu’il faut commencer à explorer d’autres modèles d’affaires pour l’industrie. C’est là le message clé que fait passer le document dévoilé par l’Institut Parkland de l’Alberta en collaboration avec le CCPA.

« Qu’elle finance ceux qui nient les changements climatiques et leurs campagnes de lobbying et de relations publiques ou qu’elle résiste aux augmentations des redevances toujours faibles qu’elle paye, l’industrie ne sert pas le meilleur intérêt des Canadiens », déclare le coauteur du rapport, David Thompson. « Le Canada devrait tenir une discussion sur d’autres modèles qui pousseraient l’industrie à chercher avant tout à contribuer à l’intérêt public plutôt qu’aux gains privés des actionnaires. C’est ce que vise ce document. »

En soi, il n’y a aucun obstacle juridique ou financier qui empêche de réorienter l’industrie du pétrole et du gaz vers un mandat d’intérêt public. D’une part, la constitution et les accords commerciaux du Canada le permettraient et il y a des précédents quant à la propriété publique dans le secteur de l’énergie, sous la houlette tant du gouvernement fédéral que de celui de l’Alberta et chez des investisseurs étrangers. D’autre part, c’est le Canada, avec les autres pays du monde anglo-saxons où le modèle de l’entreprise privée fait foi d’un dogme absolu, qui représentent l’exception à la règle concernant la propriété publique des ressources énergétiques.

Comme le signale bien les auteurs du document, dans la plupart des cas d’acquisition d’entreprise, les bénéfices à venir couvrent généralement le prix de départ. Les entreprises acquises pourraient alors se voir confier un nouveau mandat d’intérêt public qui leur permettrait de cesser de miner les objectifs reliés à la conservation, à l’environnement, aux questions budgétaires, à l’emploi et à la sécurité énergétique.

Il est plus que temps que les Canadiens questionnent la propriété de ces ressources stratégiques, qui ont un impact non seulement sur eux, mais aussi sur tous les habitants de la planète, y compris les générations futures. Le document du CCPA n’explique pas que la rente pétrolière qui est siphonnée actuellement par des intérêts privés, et par les populations de l’Ouest canadien, n’est rien d’autre qu’un vol qualifié du bien commun. On tire un profit substantiel de la pollution d’un habitat commun, en laissant tous les autres payer la facture pour en corriger les impacts. Pour les Québécois, ça veut tout simplement dire que nous devons payer une double prime : les coûts globaux du réchauffement + la perte des bénéfices que nous devrions retirer (si nous étions un pays) du fait de notre respect du protocole de Kyoto. Tout ça pour avoir l’immense honneur de partager la citoyenneté canadienne !