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Le samedi 23 avril 2022

Recherche:

Les entreprises ont-elles le souci de l’approvisionnement responsable au Québec?

Voilà la question à laquelle tente de répondre la deuxième recherche menée par la Coalition québécoise contre les ateliers de misère (CQCAM), une table de concertation du Centre international de solidarité ouvrière (CISO). Oeuvrant dans la solidarité internationale, le CISO rassemble des organisations syndicales, des groupes populaires ainsi que des individus. La CQCAM élargit cette composition à des ONG et des groupes étudiants. Créée pour lutter contre la prolifération des ateliers de misère, cette coalition s’est peu à peu intéressée à la responsabilité sociale des organisations et plus spécifiquement aux politiques d’approvisionnement responsable (PAR), comme étant des outils potentiellement pertinents afin de contribuer à l’amélioration des conditions des travailleuses et travailleurs, au Québec comme à l’étranger.

Le mérite de cette recherche est d’offrir une analyse, bien que partielle, de l’état d’implantation des PAR dans le paysage québécois. Les PAR sont des outils relativement récents et les entreprises qui ont su, parmi les trente examinées, déployer des pratiques responsables liées à leurs achats, ont du défricher un domaine d’intervention où il n’existe pas de recettes magiques. Évidemment, la recherche permet de constater que toutes ne sont pas rendues à la même étape. L’écart des notes attribuées, entre 79.1% et 0%, pour une moyenne de 21.52%, en témoigne et indique qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. De même, il faut savoir que plusieurs organisations qui ne sont pas des entreprises privées au Québec, comme le CISO lui-même, ont mis en place des PAR dans leurs organisations. La première recherche de la CQCAM s’était d’ailleurs penchée sur le cas de certaines institutions publiques.

Mais cette recherche permet également d’élargir le débat public sur les éléments que l’on se doit de considérer dans une démarche réellement responsable. Premièrement, l’une des missions de la CQCAM est de faire valoir que l’objectif principal de développement durable, tel que définit dans le Rapport Bruntland en 1987, est de « satisfaire les besoins et les aspirations de l’être humain ». En conséquence, les PAR doivent aussi inclure des critères sociaux, dont minimalement, les droits fondamentaux reconnus par l’Organisation internationale du travail (OIT) qui porte la liberté syndicale, le travail forcé, les discriminations et le travail des enfants, en plus d’autres normes portant sur les conditions de travail, les heures de travail ainsi que le salaire.

Deuxièmement, seulement 20% de la l’évaluation des entreprises dans le cadre de la recherche de la CQCAM porte sur les contenus normatifs des PAR et codes de conduite, soit les critères sociaux, environnementaux et économiques. Le reste de l’analyse porte sur les aspects de gouvernance et gestion du risque (20%), l’engagement des parties prenantes (30%), la gestion (15%) et l’audit et reddition de compte (15%). Ainsi, le fait d’observer par exemple si des ressources sont dédiées à la formation des acheteurs ou si l’entreprise consulte et informe ses travailleurs de la démarche permet de déceler des pratiques plus authentiques parmi des démarches destinées au greenwashing ou socialwashing, par exemple des entreprises comme Wal-Mart, connue pour ses pratiques antisyndicales, qui inclus le droit d’association dans sa PAR. On remarque que les entreprises qui ont les meilleures notes sont celles qui effectivement recherchent la contribution de parties prenantes comme des ONG et des syndicats.

Enfin, la question de l’encadrement légal et effectif des entreprises doit rester à l’ordre du jour car la responsabilité du respect réel des personnes, des travailleurs et de la nature ne peut pas reposer uniquement sur des initiatives volontaires d’organisations et sur la vigilance des groupes de défense de la société civile. Néanmoins, cette recherche permettra d’en savoir un peu plus sur ces pratiques et fournira des clés d’interprétation de même que des leviers aux travailleuses et travailleurs afin d’examiner les pratiques de leurs employeurs et de revendiquer des améliorations réelles pour le respect de ces droits.

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