L’auteur invité est Robert Laplante, directeur de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IREC).
Résumé
Le rapport du comité consultatif sur l’économie et les finances publiques [créer par le ministre des Finances du Québec] devait être éclairant, rassembleur et mobilisateur. Il n’atteint pas cet objectif.
1) Le mandat survient après une série de positions gouvernementales contradictoires concernant les finances publiques. Après des baisses d’impôts, des discours électoraux prétendant que l’équilibre budgétaire serait maintenu, voilà que le comité nous apprend que le Québec vit au-dessus de ses moyens, que son déficit est structurel et que sa dette est alarmante.
2) Le rapport dresse un état de situation qui ne laisserait le choix qu’entre deux consentements : ou bien consentir à régresser ou bien consentir au seul plan qui s’impose. C’est un faux dilemme, contraire à l’esprit et à la lettre de tout ce que nous savons de la construction des politiques publiques. Il n’y a jamais qu’une seule voie, mais bien des choix entre des moyens combinés diversement selon le rythme des changements souhaités et la nature des résultats attendus.
3) Le diagnostic porté par le rapport souffre d’un déficit de crédibilité qui sème la controverse au lieu de faire consensus sur une lecture partagée.
4) L’évaluation globale de la situation ne souffre pas seulement des débats de méthodes de calcul et des guerres de chiffres. La situation des dépenses ne peut s’apprécier correctement si l’on ne peut situer la pertinence de ces dernières par rapport à celles du gouvernement fédéral où sont dirigés plus de la moitié de nos impôts. Les dépenses de santé et d’éducation sont-elles plus importantes que les dépenses pour la guerre? Est-il raisonnable de songer à comprimer là d’abord? Une lecture partielle et faussée des défis économiques marque l’ensemble de la démarche.
Cette lecture se fait sans prendre en compte les résultats scientifiques.
1) Le déterminisme démographique est présenté comme absolu alors qu’il y a des marges sur lesquelles le gouvernement du Québec pourrait agir pour atténuer voire contrer certains des effets de la diminution appréhendée de la population en âge de travailler.
2) Le portrait tracé des enjeux dans les services de santé est totalement inadéquat. Des écarts colossaux sont observés entre la lecture que fait le Comité consultatif des dépenses de santé au Québec et ce que révèlent les données les plus crédibles sur le sujet. Le rapport ne tient pas compte des avancées scientifiques probantes en ce qui concerne le rôle et la place du privé et les effets de la tarification sur l’organisation et la consommation des services de santé. Ses recommandations vont dans le sens contraire de celui que suggère la littérature scientifique.
3) La recommandation d’accroître la concurrence et la place du privé en éducation va à l’encontre des observations empiriques les plus récentes. La concurrence du privé est d’ores et déjà en train de saper l’école publique, de transformer le secteur public en voie de relégation. La vision du comité pave la voie à une école à deux vitesses.
4) La réduction des débats sur la hausse des tarifs d’électricité à une quelconque vérité de la valeur marchande passe à côté de l’essentiel. Ce n’est pas tant du côté de la tarification résidentielle que s’ouvre l’espace des solutions structurantes que du côté des tarifs industriels. Et cela renvoie d’abord à des enjeux de développement et des objectifs de politique industrielle. La question de la tarification de l’électricité ne peut être posée dans la seule perspective de l’équilibrage des dépenses, elle se pose d’abord et avant tout dans une problématique de développement, dans une logique d’investissement.
Ce n’est pas d’une révolution culturelle dont le Québec a besoin, mais bien d’un changement de paradigme. La crise n’a pas été provoquée par l’explosion des dépenses publiques, mais bien par un secteur privé trop dérèglementé. Il faut mettre à contribution ceux à qui la crise a profité : les pétrolières, et les institutions financières. Il faut revoir la fiscalité et introduire un quatrième palier d’imposition.
Le ministre avait « demandé aux membres du comité d’aller au fond des choses et de travailler sur les faits », ce que le rapport ne fait pas, ignorant des acquis de connaissance de la plus haute importance. Le comité nous propose un pacte qui n’a rien d’un véritable contrat puisqu’il ne repose pas sur le réel, mais bien sur une lecture tronquée, ignorante des connaissances que nous en avons, mais satisfaite des fétiches idéologiques dans lesquels on veut la voir tenir.
Ses préoccupations pour le relèvement de la productivité et l’amélioration de la qualité des services ne sont au service d’aucune vision renouvelée de ce que pourrait être l’État social du XXIe siècle.
L’occasion est ratée.
Le rapport « Il faut voir les choses autrement » contient des études de neuf chercheurs : Jean-Guy Blais, Gilles L. Bourque, Pierre-David Desjardins, Pierre Gouin, Pierre J. Hamel, Paul Lamarche, Robert Laplante, Claude Lessard et Gabriel Ste-Marie. Elles portent sur les finances publiques, la démographie, la santé, l’éducation, l’énergie et le budget. Un texte de présentation signé par Robert Laplante dresse un portrait d’ensemble de l’ouvrage.
On peut lire le communiqué de presse ou le rapport complet sur le site de l’IREC
Notons aussi que certains postulat sont absurdes. Par exemple la population va diminuer. De 1800 à 2010 la population mondiale est passée de 1 milliards à près de 7 milliards. C’est une sacré diminution.
Ensuite si on fait les ratios des finances publiques on s’aperçoit que 38% des sorties d’argent vont aux particuliers et 62% aux entreprises. Ces dernières ne payent que 15% des impôts sur le revenu. Ils ont donc 4 fois ce qu’ils investissent. C’est un bon ratio.
Dans le dernier budget on mentionne près de 30 milliards qui sera versé pour des immobilisations. Où est la perte? Une immobilisation dure au minimum 40 ans…Et surtout pourquoi devrait-on la payer avant qu’elle soit construite?
Une estmation de coût ne se met pas dans les livres comptables. Le faire serait écrire un roman comptable plutôt que d’exercer la science comptable. Cette dernière se fie à des faits et des dénombrements que tous peuvent faire…