Certains ténors de la droite laissent entendre que les processus décisionnels donnant droit de cité à la société civile sont contre efficaces et minent le dynamisme économique d’un territoire en mettant des bâtons dans les roues aux promoteurs potentiels du développement. D’autres, d’obédience plus progressive, avancent le contraire et mettent en œuvre des initiatives donnant une plus grande place à la population dans les processus décisionnels. La tentative de mise en branle d’un budget participatif dans l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal est, par exemple, à comprendre en ce sens.

Dans un article du Devoir daté du 26 février, Louis-Gilles Francoeur rapportait la publication récente d’un rapport de la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie (TRNEE) et du Forum des politiques publiques (FPP) s’intéressant aux processus de consultation. Ce document avance que les processus de consultations tels que nous les connaissons mènent trop souvent à l’affrontement de position ne pouvant pas s’entendre. Le manque de place que ces processus laissent aux leaders d’opinion de la société civile serait la principale source de frictions. David McLaughlin, président de la TRNEE, va même plus loin. Selon ce dernier, il ne faudrait pas uniquement consulter les citoyens sur des enjeux précis mais faire en sorte qu’ils aient leur mot à dire dans la définition d’objectifs sociétaux à long terme, comme l’élaboration de politique sur le climat ou la protection de la biodiversité.

Malheureusement, les processus de consultation publique ne sont bien souvent que des simulacres de participation servant de paravents à des décisions qui sont déjà prises d’avance. « La collaboration et la mobilisation peuvent être purement symboliques, conçues dans le seul but de répondre à la volonté des citoyens et des parties prenantes de faire entendre leur voix sans réelle intention de changer quoi que ce soit ou de mettre en œuvre les politiques qui en découlent » peut-on lire dans le rapport. Et la population n’est pas dupe… ces consultations factices alimentant d’ailleurs le cynisme ambiant. « Les gens sont généralement convaincus que plusieurs des processus actuels de consultation ne servent que les intérêts économiques traditionnels » expliquait en entrevue au Devoir David McLaughlin. Sans nier les difficultés d’une gouvernance ouverte à la société civile, le rapport argumente à propos de ce cynisme que « les véritables initiatives concertées découragent ce type de comportements, car elles peuvent aider à porter une question au-dessus de la mêlée des débats quotidiens ».

La notion d’autogestion est intéressante ici pour illustrer la portée de ces conclusions. Cette notion avance que les processus de prise de décision politique ou organisationnelle devraient impliquer les gens dans la mesure où les décisions qui seront prises dans ces instances auront une implication sur eux. L’application de ce concept à grande échelle, qui comporte plusieurs défis nous en conviendrons, pourrait aider à combattre le cynisme ambiant et mener à un système qui donnerait du pouvoir à un plus grand éventail d’acteurs.

Le rapport de la TRNEE conclue d’ailleurs en affirmant que « les enjeux du développement durable […] sont complexes, dans le sens où aucun ministère ou gouvernement ne peut en assurer seul la gestion. Une gouvernance efficace du développement durable doit comprendre la participation des intervenants et du public afin de trouver les bonnes solutions et de les mettre en œuvre ».