L’auteur invité, Andre Damon, collaborateur au WSWS
Leçon de libéralisme : aux Etats-Unis, le gain moyen des 400 plus hauts revenus a augmenté de 36 % en 2007, pour atteindre 345 millions de dollars, contre 263 en 2006. Ensemble, ces 400 ménages ont perçu 185 milliards de dollars, chiffre comparable au PIB du Chili. Depuis 1993, les revenus de cette tranche ont été multipliés par 8 en dollars courants. Et le taux d’imposition effectif est passé de 29 % en 1995 à 16,6 % en 2007. Les trois quarts de ces gains proviennent de plus values.
Le revenu des américains les plus riches a augmenté de façon phénoménale entre 1992 et 2007, alors que leur taux d’imposition chutait dans le même temps, indiquent les statistiques récemment publiées par l’administration des impôts (IRS).
Les chiffres ont été publiés sur le site Web de l’IRS en décembre 2009, sans rencontrer beaucoup d’écho, car ils n’ont été accompagnés d’aucune annonce. L’existence de ce document n’a été connue que lorsque Tax Analyst, une publication spécialisée dans le domaine fiscal, l’a découvert et a écrit à ce sujet sur son site web, tax.com.
Ce rapport indique que le revenu moyen des 400 familles ayant les plus hauts revenus, exprimé en dollars de 1990, est passé de 17 à 87 millions de dollars, soit une multiplication par cinq en termes réels. Pendant ce temps, le pourcentage du revenu national total qui est allé à ces 400 familles a triplé, passant 0,52 % en 1992 à 1,59 % en 2007.
Les données montrent que ces familles ont vu leurs revenus augmenter de 31 % uniquement entre 2006 et 2007, tandis que le revenu moyen de chaque famille atteignait 345 millions de dollars [soit environ 945 000 dollars par jour - ndlr]. Les sommes perçues par ce groupe ont plus que doublé par rapport à 2001, où ses membres avaient reçu en moyenne 131,1 millions de dollars. En 1993, les 400 déclarations de revenus les plus élevées étaient en moyenne de 46 millions de dollars. Ce qui signifie que, en dollars courants, les gains moyens de ce groupe ont été multipliés par huit entre 1993 et 2007.
Parallèlement, le taux d’imposition effectif sur ce groupe – c’est-à-dire le montant réellement versé aux impôts – est tombé à 16,6 %, chiffre le plus bas enregistré par l’IRS depuis 1992.
Les Démocrates au Congrès ont tenté de faire porter le blâme aux réductions d’impôts décidées par l’administration Bush. Mais les chiffres de l’IRS montrent que le taux d’imposition effectif sur les 400 plus hauts revenus a de fait baissé plus rapidement durant la dernière partie des mandats de Clinton qu’à tout autre moment ultérieur.
Le taux d’imposition effectif a atteint un point culminant de près de 29 % en 1995. À la fin de l’administration Clinton, ce taux était tombé à 22 %. La tendance s’est poursuivie sous l’administration Bush, avec un taux d’imposition effectif tombant encore de 6 points de pourcentage entre 2001 et 2007.
L’administration Bush a réduit la taxe sur les gains en capital de 5 points de pourcentage, la faisant passer à 15 pour cent, en 2003. Mais cette politique de Bush n’a été que la continuation des lois adoptées sous l’administration Clinton, lorsque les taxes sur les plus-values ont été abaissées de 28 à 20 % pour les tranches supérieures de revenu.
Les hauts revenus ont perçu un revenu total de 138 milliards de dollars en 2007. Ce chiffre est plus important que le PIB annuel de la plupart des pays du monde, et est presque aussi élevé que le PIB du Chili. Sur ce montant, ce groupe n’a acquitté que 23 milliards de dollars d’impôts.
Si les 400 plus hauts revenus avaient été imposés en 2007 au taux de 1995, ils auraient dû payer un montant supplémentaire de 18,4 milliards, suffisant pour couvrir le déficit 2010 du budget de l’État de Californie. Environ les trois quarts du revenu pour les contribuables de cette tranche d’impôt proviennent de gains en capital, qui ont été taxés à 15 pour cent, alors que le revenu classique est imposé à un taux de 35 % pour la tranche supérieure.
Les 400 premières familles ont payé des impôts moins élevés comparativement aux 1 % des contribuables aux revenus les plus élevés. En 2005, le Congressional Budget Office a constaté que ce 1 % dans son ensemble avait un taux d’imposition de 19,7 %. Les 20 % des foyers situés autour de la médiane des revenus sont imposés en moyenne à 12,5 %, en y incluant les prélèvements de la Sécurité sociale, qui sont négligeables pour les plus riches.
Le rapport de l’IRS sur ces 400 ménages les plus aisés a d’abord été publié régulièrement sous l’administration Clinton, mais l’administration Bush a mis fin à cette pratique, comme le rappelle sur Tax.com l’article de Cay Johnston, professeur de droit fiscal à l’Université de Syracuse. L’administration Obama a repris la publication de ces chiffres, et les données de 2006 ont été publiées il y a un an.
Johnston note également qu’« au moins trois gestionnaires de fonds spéculatifs ont reçu 3 milliards de dollars en 2007. » Il ajoute que « seuls 33 des 400 plus hauts revenus ont eu un taux d’imposition effectif de 30 à 35 %, qui est le taux maximum de l’impôt fédéral. »
Les données corroborent en outre les conclusions largement médiatisées des économistes Thomas Piketty et Emmanuel Saez, qui ont montré que les deux tiers des augmentations de revenu entre 2002 et 2007 sont allés aux 1 % les plus riches ; et que les revenus perçus par cette tranche ont augmenté 10 fois plus rapidement que ceux des 90 % les moins payés. Piketty et Saez ont constaté que la part des revenus perçue par la tranche du 1 % supérieur était en 2007 la plus importante depuis 1928.
La publication de ces derniers chiffres survient au moment où la Maison Blanche et le Congrès appellent sans cesse à effectuer des coupes dans les programmes sociaux afin d’équilibrer le budget. Le gouvernement fédéral, nous dit-on, a été ruiné par la « débauche » de programmes sociaux et la proportion atteinte par les aides sociales. Mais les chiffres les plus récents montrent que c’est le contraire qui est vrai. Ce sont les riches qui ont ruiné l’État, avec l’entier concours des deux partis qui sont tous deux favorables aux grandes entreprises.
Tiré du site de Contre Info, Publication originale WSWS, traduction Contre Info
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