Le premier ministre Stephen Harper a prétendu qu’il avait prorogé le parlement afin de se donner du temps pour préparer un Discours du Trône et un nouveau budget. Eh bien, le résultat est plus que décevant et il est clair que le mois supplémentaire qu’il s’est donné était injustifié. C’est bien la preuve que la prorogation ne visait qu’à museler l’opposition et à ne pas avoir à répondre aux questions légitimes de la population. Ce budget que le gouvernement intitule abusivement « Tracer la voie de la croissance et de l’emploi » est une tromperie monumentale. On peut même dire qu’il a un air de déjà vu puisqu’il est présenté comme la deuxième phase du plan d’action économique de l’année dernière. En bonne logique ce sont donc les mêmes qui récoltent les bonbons. C’est donc l’industrie automobile de l’Ontario et les pétrolières de l’Ouest qui se taillent la part du lion. En effet, les deux budgets prévoient 9,7 milliards pour l’industrie automobile de l’Ontario et un maigre 170 millions pour l’industrie forestière soit 56 fois moins que pour l’auto.
Dans le budget 2010-2011, pas un sou pour l’industrie aéronautique alors que le gouvernement fédéral annonce 1 milliard de dollars pour le nucléaire en Ontario et en Alberta et des miettes pour l’énergie verte et zéro pour l’énergie hydroélectrique. L’économie québécoise comme l’État québécois devront se contenter encore des restes.
Rien n’est prévu pour compenser le Québec pour l’harmonisation de la taxe de vente, ce qui représente un manque à gagner de 2,2 milliards. Le gouvernement confirme son intention d’envahir les champs de compétence du Québec en annonçant la création d’une commission des valeurs mobilières pancanadienne et s’immisce dans l’éducation en consacrant 300 millions de dollars dans une panoplie d’initiatives destinées directement aux étudiants, et ce, par-dessus la tête du gouvernement du Québec. Au même moment, le transfert pour l’éducation post-secondaire est gelé au niveau de 1994-1995. C’est 800 millions de dollars de manque à gagner pour le gouvernement du Québec. Malgré les promesses de Harper, le gouvernement fédéral n’a rien prévu pour encadrer le pouvoir fédéral de dépenser, au contraire ils ont les deux pieds dans les pouvoirs du Québec. Les faiblesses de ce budget se répercutent aussi sur la population. Qu’on en juge. Ce sont encore les plus faibles et les plus démunis qui seront mis à contribution. Ce sont les travailleurs et les PME qui vont payer parce que le budget nous annonce que le gouvernement entend piller 19,2 milliards dans la caisse de l’assurance-emploi entre 2011 et 2015 pour sa lutte au déficit budgétaire. Les privilégiés s’en tireront encore puisque les banques, les nantis et les pétrolières ne seront pas mis à contribution pour éliminer le déficit. On gèle l’aide internationale alors que les dépenses militaires vont continuer d’augmenter. Il est difficile de suivre la logique qui a prévalu dans l’élaboration de ce budget quand on sait que les troupes canadiennes doivent se retirer d’Afghanistan en 2011. De plus, le gouvernement a les retraités dans sa mire puisqu’il annonce des consultations ce printemps afin de procéder à un examen des options stratégiques lors de la rencontre des ministres des Finances au mois de mai.
Ce budget qui prétend se préoccuper de croissance et d’emploi laisse dans l’ombre de grands oubliés. Il y a tout un pan de mesures sociales qui sont absentes notamment le logement social et l’itinérance. Il y a aussi les travailleurs âgés qui sont laissés pour compte et que le gouvernement s’obstine à ignorer en dépit des demandes répétées des syndicats et du Bloc Québécois qui réclament depuis des années un programme de soutien du revenu s’adressant aux travailleurs âgés entre 55 et 64 ans victimes de licenciements collectifs et qui sont incapables de se reclasser et à qui il faut venir en aide pour qu’ils puissent faire le pont avec leur retraite.
Le gouvernement a totalement ignoré les demandes de bonification du régime de Supplément de revenu garanti qui permettrait aux aînés démunis de recevoir un revenu tout juste au-dessus du seuil de pauvreté. Les femmes sont encore les grandes oubliées de ce budget. Outre les femmes autochtones, l’aide à l’intention des familles monoparentales est minime et ne totalise que 5 millions de dollars annuellement sur un budget de près de 300 milliards de dollars alors que les besoins sont criants.
Ce gouvernement a fait du Canada le cancre de l’environnement à Copenhague alors qu’il avait une belle occasion de corriger le tir. Qu’est-ce que le projet prévoit pour améliorer son désastreux bilan environnemental ? Rien. Rien pour le ferroviaire, rien pour la voiture électrique, rien pour le transport en commun.
Et pour finir ce plat indigeste, le budget confirme le plafonnement unilatéral de la péréquation qui fait perdre 1 milliard de dollars au Québec uniquement pour 2009-2010 sans parler de la prise en compte dans le calcul de la péréquation d’une partie des revenus d’Hydro-Québec qui prive le gouvernement québécois de 250 millions additionnels. Bref, en un mot comme en mille, ce budget ne répond pas aux besoins économiques, sociaux, environnementaux et financiers du Québec. C’est un budget conçu pour les besoins du Canada qui démontre que le fédéralisme canadien n’est pas rentable pour la nation québécoise.
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