Soutenu par des parlementaires, des syndicalistes et des représentants des milieux culturels et scientifiques, le Manifeste pour une réorientation de la politique fiscale lance le débat sur la responsabilité de la Suisse au niveau national et international. Une centaine de personnalités suisses exigent la fin de l’évasion et de la sous-enchère fiscales organisée sur une base systémique par le système bancaire suisse.
Les organisations à l’origine du Manifeste – la Déclaration de Berne, Attac et le réseau de réflexion Denknetz – vont évaluer toutes les mesures possibles pour obtenir une réorientation de la politique fiscale suisse, jusqu’au lancement d’une initiative populaire. Pour l’instant, les personnalités suisses engagées demandent la suppression de la distinction entre fraude fiscale et évasion fiscale et réclame l’introduction de l’échange automatique d’information entre autorités fiscales d’États de droit démocratiques.
Depuis le lancement du Manifeste, plusieurs organisations – dont des ONG dédiées à l’aide humanitaire dans les pays en développement – ont manifesté leur appui à la démarche. Du côté des organisations politiques, le parti écologiste suisse et le parti chrétien-social ont pris parti en faveur de la campagne, alors qu’une proposition de soutien est actuellement pendante devant les instances du Parti socialiste suisse.
Malgré les concessions récentes faites sous la pression des Etats-Unis et de l’OCDE, la Suisse est restée fidèle à sa politique en matière fiscale. Le Conseil fédéral a maintenu sa position qu’il « n’est pas dans l’intérêt de la Suisse d’attirer des fonds étrangers qui n’ont pas été imposés ». Pourtant, nous disent les signataires du Manifeste, en refusant l’échange automatique d’informations, le gouvernement agit simplement dans le sens opposé. L’échange automatique d’informations est en effet la seule mesure permettant de garantir que l’argent déposé dans les coffres des banques suisses soit effectivement imposé selon les taux en vigueur dans le pays d’où il provient.
Les problèmes causés par l’évasion fiscale en provenance des pays du Sud et le secret bancaire suisse sont loin d’être réglés. Selon Olivier Longchamp, expert en fiscalité et finances internationales à la Déclaration de Berne, « l’argent que les pays en développement perdent chaque année à cause de l’évasion fiscale en Suisse permettrait la formation de 500 000 enseignants et financerait également la construction de 500 000 nouvelles salles de classe ».
La Suisse elle-même souffre de la distinction opérée entre fraude et évasion fiscale. « En Suisse, environ un quart des impôts sur le revenu sont soustraits au fisc et ce sont les consommateurs et les salariés qui supportent l’essentiel de la charge fiscale », précise Beat Ringger, membre de la direction collégiale du Denknetz.
Les organisations qui ont lancé le manifeste fiscal exigent une imposition plus forte des hauts revenus, de la fortune et des transactions financières et demandent l’ouverture d’un débat de fonds sur les inégalités fiscales. « Nous ne devons pas nous laisser influencer par la politique des caisses vides qui permet de justifier les mesures de démantèlement social », souligne Roman Kuenzler, membre de la commission fiscal d’Attac Suisse.
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