Atelier 3 : Il y a un consensus évident autour de la question de l’indépendance énergétique du Québec. On ne veut plus continuer à envoyer des milliards de dollars aux grandes pétrolières et aux pays exportateurs, des milliards qui sont appelés à littéralement exploser dans les années à venir. Mais le débat n’est pas terminé entre ceux pour qui cette indépendance passe par l’accélération du passage à une économie sans carbone et ceux pour qui cette indépendance énergétique passe plutôt par l’exploitation des ressources en hydrocarbure au Québec; entre les partisans et les opposants de la recherche pétrolière dans le golfe St-Laurent.
Nonobstant ce débat non épuisé, tous comprennent que le passage à une économie à faible intensité carbone serait une stratégie gagnante pour le Québec, étant donné notre potentiel énergétique propre et nos avantages dans les équipements de transport collectif. C’est un enjeu majeur autour duquel toutes les grandes puissances, ou celles qui veulent le devenir, se positionnent présentement. Si nous voulons faire de l’économie du Québec un axe à travers lequel les Québécois pourront participer aux grands défis actuels, c’est bien vers celui-là que nous devrions nous diriger. D’autant plus que dans ce domaine nous profitons d’opportunités exceptionnelles pour y parvenir. Je désire ajouter quelques arguments à ce propos.
Rappelons-nous que les projets de développement hydro-électriques, au début de la Révolution tranquille, ont donné au Québec un élan incomparable, ils en ont fait un pilier du développement. Sous la direction d’Hydro-Québec, ces projets ont marqué d’un sceau indélébile la période de la Révolution tranquille et les décennies suivantes. En plus de développer un patrimoine collectif pour les Québécois, ces projets ont permis le développement d’entreprises et de secteurs d’activités qui, encore aujourd’hui, font la force du Québec.
Pour les Québécois, les tarifs exceptionnellement bas de l’électricité représentent en quelque sorte un dividende dont tous les consommateurs profitent. C’est un retour sur les investissements collectifs que nous avons consenti depuis les années 1960. Lorsqu’on se compare à nos voisins, ces bas tarifs nous permettent de compenser en partie l’endettement et le fardeau fiscal plus élevés des Québécois.
Pourtant, dans un contexte nouveau, caractérisé par des prévisions d’augmentation importante des prix des ressources énergétiques dans le monde (pic du pétrole, taxe carbone), il est temps de se questionner sur la pertinence de continuer à utiliser le dividende du patrimoine hydro-énergétique uniquement en termes de bas tarifs. Des utilisations alternatives de cette rente permettraient d’obtenir des impacts économiques, sociaux et environnementaux beaucoup plus importants. Il est peut-être temps de proposer aux Québécois d’utiliser la rente de ce patrimoine pour un nouveau projet collectif de développement qui mobiliserait le Québec vers une économie verte, vers une indépendance énergétique au carbone pour 2030.
Selon les chiffres fournis par le gouvernement Charest, la rente potentielle due à l’écart de tarification au Québec par rapport à la moyenne canadienne représente 2,3 milliards $. Il serait difficile de s’avancer sur un chiffre précis, mais sur un horizon de 5 ans, en considérant les prévisions sur les prix des énergies fossiles, on peut prévoir que la rente potentielle, devrait être multiplier par deux ou trois. Donc, en augmentant graduellement les tarifs de l’électricité au Québec, tout en les conservant néanmoins sous la moyenne canadienne, le gouvernement pourrait obtenir assez rapidement une source additionnelle de revenu net d’une valeur supérieure à 1 milliard $ annuellement. On pourrait par exemple suivre la suggestion faite par Jean-François Lisée d’introduire dans la tarification d’Hydro une progression plus forte des tarifs selon la consommation des ménages.
Ce qui est important, c’est de ne pas utiliser la tarification hydroélectrique pour rendre le système fiscal plus inéquitable, en diminuant en même temps les impôts des plus riches. Tous les revenus nets dégagés de la hausse des tarifs devraient être alloués dans des programmes pour faciliter le passage à une économie propre. Une partie des programmes viserait à encourager les ménages à diminuer leurs coûts énergétiques (la hausse des tarifs constitue un facteur supplémentaire de succès de ces programmes) ou à passer aux énergies propres; une autre partie aurait comme objectif de faciliter la modernisation du système productif québécois.
Le projet de transition vers une économie propre, vers l’indépendance énergétique du Québec pour 2030, devrait se composer de deux grands axes d’intervention :
Des programmes vers les ménages :
- vaste programme de rénovation domiciliaire pour améliorer l’efficacité énergétique (objectif de diminuer la consommation de manière à compenser la hausse de la facture d’électricité);
- subvention aux ménages pour l’utilisation d’énergies renouvelables (solaire, géothermique);
- subvention à l’achat de voitures électriques (VE).
Des programmes vers les entreprises ou les organisations publiques :
- subventions pour le développement de projets innovateurs dans les technologies propres (centres de recherche ou de veille, vitrines technologiques, projets pilotes);
- politique de développement sectoriel dans les équipements de transport terrestre (batteries, moteurs électriques, projets d’adaptation aux autobus, camions et trains);
- politique de développement sectoriel dans les énergies renouvelables (éolien, géothermique);
- développement d’un réseau de bornes publiques pour la recharge des VE, avec un effort particulier pour les transports collectifs.
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