Le colloque de la fin de semaine étant maintenant terminé, je dois avouer ma perplexité devant ce à quoi j’ai assisté et ce que j’ai vu dans les médias. Ces derniers me semblent avoir fait une lecture assez unidimensionnelle de ce colloque. La diversité des débats auxquels j’ai assisté confirme, bien au contraire, l’idée que les non-initiés comme moi se font des débats au PQ : des discussions ouvertes, ancrées dans une riche diversité d’opinions, sauf celles provenant des milieux ultralibéraux. Les thèses de l’Institut économique de Montréal n’étaient pas représentées.
Je n’ai pas vu le « virage à droite » annoncé dans certains médias. Comment peut-on déclarer un virage à droite d’un parti qui propose, comme je l’ai mentionné dans mes billets précédents, de renforcer l’intervention de l’État pour le développement économique; d’un parti qui demande un nouveau programme d’aide pour le rachat d’entreprises par des coopératives de travail; ou encore d’un parti qui propose de constituer des caisses de retraite régionales obligatoires afin de mutualiser les risques pour les travailleurs et de faciliter la participation des petites entreprises ?
Néanmoins, « l’identité » du PQ n’est pas toujours claire. Loin de moi l’idée de proposer une « psychanalyse publique » à la Clotaire Rapaille sur l’identité du parti, mais il me semble parfois avoir parfois une « double personnalité ».
Par exemple, Daniel Turp, de la commission politique, a réaffirmé, dès l’ouverture, l’ancrage social-démocrate du PQ, en appelant à sa modernisation, en fonction des enjeux actuels. La seule faiblesse de son argumentation concerne cette référence à une phrase du discours de Mme Marois, qui me questionne sur la conception de cette social-démocratie : « Afin de créer une richesse durable, il est nécessaire de converger vers un partenariat entre l’individu et l’État ». Il me semble qu’on fait disparaître là, un peu trop rapidement, toutes les organisations de la société civile qui ont un rôle fondamental à jouer dans la social-démocratie. La dimension de démocratie sociale est à mon avis inséparable du modèle social-démocrate de la démocratie politique.
Mais sur la finalité du projet souverainiste, Pauline Marois réaffirme clairement la volonté de lier développement économique et développement social dans le respect de l’environnement : « Si elle se construit à partir d’une vision axée sur le développement durable, la richesse de la nation québécoise nous offrira les moyens de notre épanouissement collectif et individuel, d’une génération à l’autre. » Dans la mesure où on comprend le développement durable comme la conjonction des enjeux relevant de l’efficacité économique, de l’équité sociale et de l’intégrité écologique, cette volonté réaffirmée du projet souverainiste est rassurante.
La conférencière à l’ouverture du colloque, Martine Ouellet, bien connue pour son engagement à la coalition Eau Secours !, et maintenant candidate dans le comté de Vachon, a elle aussi clairement réaffirmer cette volonté. Pour elle, il semble clair que le virage vers une économie verte doit permettre une nouvelle phase de développement du Québec, plus durable. L’autorégulation défendue par les ultralibéraux est une vue de l’esprit, nous dit-elle. Le laissez-faire dans les domaines de la forêt, des pêcheries, de nos lacs et rivières nous a mené à la catastrophe environnementale, sociale et économique que l’on connaît dans ces secteurs. Autrement dit, si nous voulons canaliser les forces du marché dans un sens durable, il faut mettre en place une bonne réglementation.
Martine Ouellet a souligné ce que nous répétons depuis longtemps sur OikosBlogue : les taxes à l’importation sur les produits provenant de pays qui ne coopèrent pas dans la lutte aux changements climatiques, comme c’est justement le cas pour le Canada, vont être extrêmement dommageables pour le Québec. Nonobstant ce fait, sur lequel nous ne pouvons rien tant que nous resterons dans le cadre fédéral actuel, le Québec peut cependant améliorer son bilan en GES s’il fait un effort important d’investissement dans le domaine de l’électrification des modes de transport.
Finalement, elle a réaffirmé sa conviction que les ressources en eau du Québec, ainsi que la gestion du traitement des eaux usées, devaient obligatoirement demeurer le monopole de l’État. L’eau n’est pas une marchandise, conclut-elle, elle n’est pas à vendre. Un Québec indépendant devra travailler à exclure l’eau des négociations commerciales internationales.
Bref, ce fut un colloque riche et intéressant, traversé par plusieurs débats qui n’ont pas été épuisés. Le PQ a déjà programmé pour le mois de mai un colloque sur la mission plus spécifiquement sociale de l’État et pour l’automne un évènement de réflexion sur une stratégie de développement durable, le tout en prévision de son congrès de 2011. C’est à suivre.
Ton texte me confirme ce que j’ai malheureusement connu pendant les 6 années où j’étais conseillère au programme du PQ: les médias se contentent de réduire les débats politiques à une « ligne » simpliste et provocante. Merci de tes informations plus complètes sur la richesse et la complexité des réflexions qui ont eu cours à ce colloque.