Personnellement, je ne m’attendais pas à ce qu’ils aillent si loin. Mais puisqu’après tout M. Charest en est à son dernier mandat, il n’a personnellement plus rien à craindre du verdict de l’électorat. Il en profite donc pour tenter de parachever ce qu’il avait commencé en arrivant à la tête du gouvernement du Québec : démolir le modèle québécois de développement. Comme le souligne Jean-Robert Sansfaçon dans Le Devoir, c’est effectivement au retour du Jean Charest de 2003 qu’on assiste.
Prise une par une, à l’exception de la taxe sur la santé qui est par essence totalement régressive, les mesures contenus dans budget du ministre Bachand ne sont pas condamnables. C’est l’ensemble de l’œuvre qui l’est parce que, globalement, le régime fiscal en ressort moins équitable. En fait ce budget devrait représenter un tournant important dans l’évolution de la société québécoise parce qu’il affaiblit significativement l’une des composantes du modèle québécois de développement. En effet, comme nous le signalions dans le premier numéro de la Revue vie économique, le modèle québécois est caractérisé par une action plus redistributive. Le Québec connaît les taux de pauvreté les plus bas au Canada, comme le montre clairement l’indice de Gini, où le Québec se distingue par la plus faible inégalité après la prise en compte de l’intervention publique (impôt et transfert aux particuliers). Ce sera de moins en moins le cas dans le futur si les mesures régressives du budget 2010 se poursuivent sur plusieurs années.
Effectivement que le Québec fait face à une crise des finances publiques causées par des années de diminution des capacités d’agir de l’État, qui s’est posé dans toute son ampleur, comme on pouvait s’y attendre, dans un contexte de ralentissement économique. Mais il y a d’autres politiques possibles pour résoudre cette crise. Le Parti Québécois et Québec solidaire nous proposent une vaste panoplie de mesures qui auraient permis d’éviter un budget si régressif. Il fallait tout simplement une autre vision politique au poste de commande, une vision qui refuse les dictats d’une science économique désincarnée. L’impôt sur le revenu, nous disent-ils, aurait des impacts catastrophiques sur l’économie ! C’est une autre de ces supercheries intellectuelles des penseurs ultralibéraux qui depuis trente ans cherchent à justifier des politiques qui creusent les inégalités sociales. D’autres économistes, parmi les plus respectés de notre temps, proposent au contraire d’augmenter la progressivité du régime fiscal pour « le traitement des causes structurelles de la crise ».
Je partage en bonne partie de l’analyse du budget faite par Jean-François Lisée sur son blogue. Je l’ai mentionné dans des billets précédents, je suis favorable à une récupération des 2 points de % de la taxe à la consommation pour redonner à l’État sa capacité d’agir, avec des mesures compensatoires pour les plus faibles revenus. Je suis aussi pour une taxe sur le carbone pour décourager les pratiques nuisibles à l’environnement et financer le transport collectif. Je serais même favorable à une utilisation différente de la rente collective issue des bas coûts de la production hydroélectrique patrimoniale du Québec, dans la mesure où cette utilisation alternative est porteuse d’un nouveau projet social mobilisateur, comme le fut celui de la Révolution tranquille. Par exemple pour un Québec sans carbone. Mais je suis contre l’utilisation de cette rente pour compenser les baisses d’impôts concédées aux plus riches depuis 2003.
Pour sauver quelques dollars ici et là, le gouvernement annonce qu’il va éliminer un vaste ensemble de lieux de concertation, qui seraient supposément rapatriés dans les ministères sectoriels. Mais en même temps il coupe la croissance des dépenses de ces derniers. C’est un autre pan du modèle québécois qui risque d’être jeter à terre avec ce budget.
Un dernier p’tit coup de barre!
Il a eu droit à toutes les allégories: les deux mains sur le volant, les deux mains sur la bouche, les deux mains sur les oreilles, les deux mains dans nos poches et maintenant, ladies and gentlemen, le voici avec la tête sur le billot.
LA Question qui se pose en ce moment? Bachand réussira-t-il, avec son discours arrogant et paternaliste – Ben là, cher peuple, c’est pas gratis un système de santé! Ah non??? – à nous mettre à genoux? À moins que nous ne soyons en pleine crise d’adolescence? I wish! Maudit que’j nous l’souhaite! Fort, fort…
Je laisse les calculs au « économistes » à cravates, aux politiciens à cravates, à tous ces cravateux-cravaté. Ces temps-ci, les chiffres tombent comme peau de chagrin, ça va déborder. Et ce qui me chagrine, c’est que je sais que vous (Gouv. Charest) savez que l’on sait. Nous savons fort bien que vos mains sont trop occupées dans des ailleurs meilleur, mais ayez l’intelligence de nous écouter! Vous en apprendrez des choses pourtant… Sur vous même également, qui sait?
Alors je vous prie de prendre bonne note de ceci: nous serons unis, défendant des valeurs chères aux Québécois, leurs « vaches sacrées ». Tradition Social démocrate, progressisme, solidarité, équitabilité. On le sent bien: out le néolibéralisme qui aspire tout sur son passage laissant nos économies et structure affaiblies et affamées! Le mot « tranquille » sera loin derrière… et vive la démocratie!
Charest s’élance, retiens son souffle…. et nous aussi!
Merci de cette analyse transparente et nuancée. Merci des renvois à d’autres chercheurs. Quels reculs de nos choix collectifs nous sont imposés! Par ailleurs, le budget a l’avantage d’être transparent ! Ce qui provoque fort heureusement de nombreuses réactions et un début d’opposition non encore suffisamment organisée.