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Le samedi 23 avril 2022

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Désarmement : doctrine nucléaire pour un développement durable

L’auteur invité est Jacques Moulins, journaliste au Journal du Développement durable

Russes et Américains se [sont retrouvés] à Prague pour signer la nouvelle version du traité de désarmement Start. Un après son discours, dans la même ville, qui lui a valu le Nobel de la paix pour son engagement en faveur de la dénucléarisation, le président Obama a annoncé la nouvelle politique de son pays en la matière : limitation des conditions d’emploi de l’arme atomique, désactivation d’ogives nucléaires notamment en Europe, et réduction du budget militaire consacré à ce type d’armement. A ses côtés, Steven Chu, secrétaire d’Etat à l’énergie et penseur de l’entrée de son pays dans l’ère du développement durable.

Les acteurs et militants du développement durable avaient inscrit, dès la fondation de cette notion en 1972, la première des conditions pour un monde livré aux générations futures sans détérioration de l’environnement et des richesses naturelles : la paix. L’opinion publique européenne, qui depuis la fin de la seconde guerre mondiale n’a connu que la guerre de Bosnie à l’intérieur de ses frontières, a tendance à estimer acquise cette première condition. Or l’armement dit conventionnel augmente régulièrement dans le monde et, deux nouvelles armes sont désormais à la portée des budgets réduits : l’arme bactériologique et l’arme nucléaire.

Il n’est pas besoin d’avoir de grandes connaissances pour imaginer les conséquences pour les humains et pour l’environnement d’un bombardement de réservoirs de pétrole, d’une destruction de forêt à l’arme chimique, ou de la pollution volontaire des cours d’eau. Sans parler d’une attaque contre une centrale nucléaire. C’est dire l’importance du traité qui va être signé aujourd’hui à Prague entre la Russie du président Medvedev et les Etats-Unis du président Obama.

Restriction des possibilités d’attaque

Il y a un an, le 5 avril 2009, Barack Obama prononçait à Prague, lieu symbole s’il en est de l’affrontement entre l’Est et l’Ouest européen au XXème siècle, un discours de rupture avec l’administration Bush. L’ancien locataire de la Maison blanche n’avait jamais caché son ambition d’étendre l’armement atomique et la possibilité d’usage que se réservaient les Etats-Unis, pays qui fut le premier et le seul à l’employer contre des populations civiles. Ce discours, prônant à terme un monde dénucléarisé, avait été pris assez au sérieux pour que Barack Obama se voit distingué par le prix Nobel de la paix. Si nous sommes encore loin d’une telle utopie, Prague devrait être aujourd’hui le cadre d’un pas dans le bon sens.

Entouré de la secrétaire d’Etat Hillary Clinton, du secrétaire à la Défense, Robert Gates, du chef d’état major de l’armée américaine, Michael McMullen, et – présence hautement symbolique – du secrétaire à l’Energie, Steven Chu, le Monsieur Vert du gouvernement américain, Barack Obama a annoncé mardi à Washington les trois grands axes de la nouvelle doctrine nucléaire. D’abord, les Etats-Unis s’interdisent de faire usage de l’arme nucléaire contre un pays qui ne la possède pas. Avec deux exceptions cependant, qui rappellent que les Etats-Unis, avec leurs 9 400 têtes nucléaires (dont 5 200 activées) sur les 23 000 estimées dans le monde selon la fondation pour la recherche stratégique (5575 selon le gouvernement américain), n’entendent pas pour autant céder leur première place dans l’armement nucléaire. La première exclut les pays ne respectant pas le traité de non prolifération (TNP). Cette nuance est d’importance puisqu’elle vise principalement l’Iran et la Corée du Nord. La seconde concerne le cas « d’attaques bactériologiques dévastatrices » pour lequel les Etats-Unis se réservent toute possibilité d’intervention.

Réduction de l’arsenal nucléaire mondial

Ensuite, Barack Obama a confirmé l’accord passé avec son homologue russe pour une réduction importante d’ogives nucléaires. Start 1 prévoyait, à fin 2009, une réduction des ogives russes et américaines de plus de 10 000 à 6 000 pour chacun des deux pays. L’accord signé aujourd’hui les réduit à 1 500. Pour la seule Europe occidentale, ce sont 200 têtes nucléaires qui disparaîtraient, dont 50 en Turquie et entre 70 et 90 en Italie.

Enfin, les Etats-Unis s’engagent à ne pas développer de nouvelles armes atomiques. C’est dire si le budget de la défense va s’en ressentir. Pas à la réduction cependant, car l’agence de sécurité nucléaire va bénéficier d’un budget en forte augmentation, et les experts américains ont rappelé l’importance que leur pays accorde aux missiles intercontinentaux et à la défense anti-missile chère à Ronald Reagan et à Bush père et fils. Mais enfin, le cours est inversé, et les Etats-Unis reviennent en quelque sorte à la dissuasion, alors que l’équipe Bush avait introduit l’idée d’une utilisation « préemptive » de l’arme nucléaire.

Une année de rencontres internationales

Un an seulement après son discours, le président Obama peut donc s’enorgueillir d’avoir fait vite et bien. D’une part, l’accord avec la Russie était loin d’être gagné. Les traités précédents avaient pris fin en 2009 sans que l’administration Bush ait tenté quoi que ce soit pour les renouveler. Et la Russie faisait achopper l’accord sur les conditions de vérification. D’autre part, la nouvelle doctrine va rapidement pouvoir se décliner sur tous ses axes. Ainsi, du 12 au 14 avril, Washington accueille un sommet sur la sécurité nucléaire. Du 3 au 28 mai, toujours aux Etats-Unis mais à New-York cette fois, ce sera l’interdiction des essais nucléaires qui sera au menu de la conférence d’examen du TNP. Avec, en outre, une proposition d’engagement renforcée pour la non-prolifération de ce type d’armement (il est vrai que la dernière conférence en date, en 2005, avait échoué à établir un consensus).

Enfin, en novembre à Lisbonne, les pays de l’Otan se réuniront avec comme ordre du jour, le démantèlement d’un certain nombre d’ogives nucléaires en Europe.

On peut lire le texte sur le site du Journal du Développement durable

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