L’auteur invité est Nicolas Marceau, député de Rousseau et porte-parole de l’opposition officielle en matière de finances publiques
Le gouvernement libéral déposait la semaine dernière son budget 2010-2011. Les premiers coups de sonde sont unanimes, les citoyens en sont largement insatisfaits et avec raison. Et qu’on ne vienne pas dire que les contribuables sont des éternels insatisfaits ou encore qu’ils ne comprennent pas la complexe réalité des finances publiques.
Au contraire, les Québécois ont depuis longtemps montré leur adhésion à un État impliqué économiquement et socialement. Mais pour maintenir leur adhésion, ils exigent un État performant dirigé par un gouvernement qui donne l’exemple et qui gère avec le plus grand soin chacun des deniers qui lui est confié. Et c’est là que le bât blesse.
Les Québécois se sont rendus aux urnes il y a à peine 15 mois et ont élu un premier ministre qui leur répétait chaque jour qu’avec son gouvernement le Québec éviterait les déficits malgré la récession, que jamais il n’augmenterait leurs taxes et que même la dégringolade boursière n’affecterait pas la hauteur des cotisations qui financent les différents fonds gérés par la Caisse de dépôt et placement du Québec. Aujourd’hui, les Québécois se souviennent…
À l’aube du budget, les Québécois approchaient leurs élus avec un questionnement très légitime : «pourquoi je paierais plus alors que le gouvernement ne fait rien pour mettre fin au gaspillage?» Les contribuables ont remarqué ce que le gouvernement refuse de voir: un éléphant s’est installé au milieu du salon au cours des derniers mois avec les multiples scandales liés au secteur de la construction. Le gouvernement du Québec et ses entreprises injectent 13,5 milliards $ par année dans des projets d’infrastructures dont environ 30% des fonds alloués sont détournés par des activités de collusion et de corruption. Lorsque le gouvernement accepte de perdre ainsi plusieurs milliards $ par année et qu’il se refuse à tenir une enquête publique qui nous permettrait de s’attaquer à un système souterrain qui ronge nos finances publiques et nos institutions, il ne faut pas se surprendre de voir les Québécois refuser la facture de 6,5 milliards $ que le gouvernement leur a imposée la semaine dernière par l’application de nouvelles taxes et de nouveaux tarifs.
Les Québécois ont raison de questionner un gouvernement qui depuis sept ans a été incapable d’améliorer sa performance de gestion. C’est le même manège à chaque année alors que le ministre des Finances nous annonce dans son budget que le gouvernement s’engage à reprendre le contrôle de ses dépenses et de la dette publique sans jamais y arriver.
Prenons l’exemple du secteur de la santé qui accapare maintenant plus de 40% des dépenses de l’État. Le gouvernement a annoncé qu’il instaurait une nouvelle taxe sur la santé qui atteindra 200 $ par année pour la grande majorité des contribuables et qui s’accompagnera de l’imposition d’un ticket modérateur. Non seulement s’agit-il de taxes régressives qui frappent de la même façon un millionnaire et une famille qui possède un revenu net de 25 000$, mais cela survient alors qu’aucun effort n’a été fait pour améliorer la gestion du réseau de la santé.
Dans un système aussi lourd financièrement, le coût du laxisme se chiffre rapidement en milliards de dollars. Du choix idéologique de construire les mégahôpitaux universitaires en PPP jusqu’à l’absence de contrats de performance qui auraient dû être implantés depuis de nombreuses années, les gens n’en ont pas pour leur argent. L’informatisation du dossier de santé permettrait aux médecins de soigner 20% plus de patients, mais son implantation va de retard en retard. Le recours accru aux agences privées nous coûte des centaines de millions par année, l’ajout de 2000 cadres depuis 2003 ne donne aucun service additionnel aux malades, le coût des médicaments qui est sans justification plus élevé au Québec qu’en Ontario… Il y avait donc de nombreux gestes à poser avant d’imposer des taxes iniques sur la maladie.
Contrairement à ce que nous dit le premier ministre, le nouveau budget manque de courage et tombe dans la facilité. Le gouvernement avait l’opportunité de mieux faire sans appauvrir les Québécois. Les citoyens ont maintenant la certitude de payer plus cher pour leurs services publics. Et ils savent également que le gouvernement libéral a maintenant acquis le confort financier qui lui permettra de ne rien faire pour s’améliorer.
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