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Le samedi 23 avril 2022

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Maxime Bernier doit cesser de rabaisser le Québec pour essayer de se grandir aux yeux du Canada

Lors d’une conférence tenue devant les conservateurs de la Montérégie, Maxime Bernier a soutenu que les Canadiens ont bien raison de considérer les Québécois comme des enfants gâtés puisque depuis 40 ans, les gouvernements du Québec qui se sont succédés depuis Robert Bourassa ont mis en place « des politiques irresponsables », ont vécus « au-dessus de leurs moyens » et ont tenté d’« aller chercher toujours plus d’argent dans les poches de nos concitoyens du reste du Canada ».

En 3 phrases, Maxime Bernier, qui a siégé à peine 2 ans au cabinet des ministres avec le succès que l’on connaît, balaie du revers de la main (droite) l’héritage de toute une génération et fait la leçon à 8 premiers ministres québécois qui nous ont donné d’importantes politiques sociales citées en exemples partout dans le monde. Pensons seulement à l’assurance-maladie, à l’assurance-automobile, à la Charte de la langue française, à la loi de protection des consommateurs, aux centres de la petite-enfance, à l’assurance-médicaments et j’en passe.

L’épouvantail de Maxime ne fera peur qu’à ceux qui veulent avoir peur

Au centre de son argumentaire, un vieux refrain conservateur : le modèle québécois ne fonctionne pas, il est en faillite. La preuve ultime de notre irresponsabilité : le Québec serait la 5e société la plus endettée dans le monde industrialisé, pas loin derrière la Grèce.

Or, M. Bernier, qui tente de nous convaincre que notre filet social serait inabordable, se garde bien de dire qu’il utilise la « dette brute » du Québec pour faire sa démonstration. Or, lorsque l’on tient compte de la « dette nette » du Québec (ce que l’on doit, moins nos actifs, voir l’exemple de Stéphane Gobeil) le Québec est loin d’être une cigale frivole, mais plutôt une fourmi industrieuse pour reprendre l’expression de Jean-Francois Lisée. Selon les calculs de Jacques Léonard, ancien président du Conseil du trésor à Québec, au palmarès de la dette nette, celle du Québec est inférieure à celles de tous les pays du G7, sauf le Canada. Par ailleurs, notons que la « bonne performance » de l’État fédéral canadien s’explique en partie par le pillage de la caisse d’assurance-emploi et les coupes effectuées dans les transferts aux provinces dans les années 90.

Donc, s’il est vrai que la dette québécoise est importante, il serait plus juste de dire qu’elle est comparable à celle de nos voisins ontariens et de la plupart des pays industrialisés qui, pourtant, ont souvent un panier de services sociaux moins élaboré qu’ici. (Voir mes deux textes intitulés respectivement : Relever le vrai défi et Fiscalité : les idées admises et la réalité que l’on peut lire sur mon site internet).

Je n’accepte pas que l’on noircisse le bilan financier du Québec pour justifier le démantèlement de l’État québécois.

Le Québec l’enfant gâté de la fédération

Est-ce à dire que le niveau de vie des Québécois est « subventionné » par le Canada comme le soutien Maxime Bernier ? Il suffit d’étudier les dépenses structurantes du fédéral, celles qui créent des emplois et enrichissent la société : les subventions aux entreprises, les achats de biens et services, les dépenses en recherche et développement et la répartition des emplois fédéraux pour constater qu’il serait préférable pour le Québec d’obtenir sa juste part des projets structurants plutôt que de recevoir un chèque de péréquation.

Si le Québec recevait seulement une part des dépenses structurantes du gouvernement fédéral équivalent à son poids démographique, il compterait 15 500 fonctionnaires supplémentaires, en plus de recevoir un autre deux milliards générant 25 000 emplois, pour un total de plus de 40 000 emplois.

Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ?

Maxime Bernier souhaite un « Québec fier, responsable et autonome » qui s’attelle à la création de richesse. Ça tombe bien, c’est l’essence même du projet souverainiste. Nous proposons que le Québec contrôle toutes ses lois, tous ses impôts et toutes ses relations internationales. Je crois qu’il serait d’autant plus facile de créer de la richesse si l’État québécois n’avait pas à partager des demi-pouvoirs en recherche et développement, en agriculture, en développement régional et en environnement par exemple, avec un État fédéral contrôlé par une nation qui a des intérêts différents des nôtres, comme l’a illustré le vote sur la motion du Bloc Québécois sur le maintien du poids politique du Québec.

Par ailleurs, je note que Maxime Bernier souhaite « que toute question devrait être traitée par l’autorité compétente la plus petite ou la plus basse dans la hiérarchie, celle qui est la plus près des citoyens ». Je suis bien d’accord avec lui. C’est pour ça que je ne comprends pas qu’il y ait un ministère de la Santé à Ottawa. Est-ce à dire que Maxime Bernier souhaite, comme le Bloc Québécois, que le gouvernement fédéral se retire, avec compensation du Développement régional et de l’organisation du territoire?

Par ailleurs, je ne peux m’empêcher de grincer des dents en entendant Maxime Bernier proposer un fédéralisme respectueux des responsabilités québécoises alors que c’est son gouvernement qui propose d’éliminer la commission québécoise des valeurs mobilières (l’AMF) au profit d’une commission canadienne unique des valeurs mobilières. Maxime Bernier, qui a lui-même été vice-président à la Commission des valeurs mobilières du Québec, désapprouve l’ingérence de son gouvernement dans ce secteur, ce qui n’est que logique, mais ne fait rien pour changer les choses. Comme les autres députés conservateurs du Québec, il s’écrase devant le premier ministre Harper. Comme il espère à nouveau accéder au cabinet, il permettra que l’on dépouille l’AMF de ses responsabilités au profit de Toronto!

L’applaventrisme consternant de Maxime Bernier

Il est désespérant de constater que Maxime Bernier, comme les autres élus conservateurs, feint de ne pas comprendre que l’inflexibilité du gouvernement Harper est en partie responsable de la crise des finances publiques à Québec. Maxime Bernier « oublie » de mentionner que le manque d’envergure des députés québécois au sein du caucus conservateur fait en sorte qu’il y a pour plus de 8 milliards de dollars appartenant aux Québécois qui dorment à Ottawa. Prenons simplement l’exemple de l’harmonisation des taxes de vente. Alors que le Québec a harmonisé sa TVQ avec la TPS il y a 18 ans, le Québec n’a toujours pas été compensé. L’Ontario et certaines provinces maritimes qui viennent tout juste de compléter l’harmonisation des taxes de vente ont pourtant, elles, été compensées. Ce seul litige représente un manque à gagner de plus de 2 milliards de dollars pour le Québec. Alors, quand Maxime Bernier nous dit qu’il ne peut « rien faire pour régler les problèmes du gouvernement du Québec », qu’il commence par questionner le traitement injuste réservé au Québec par le premier ministre Harper.

A Québec, la crise des finances publiques est bien réelle. Des choix difficiles s’imposent. Cependant, l’endettement du Québec est actuellement raisonnable, mais l’accumulation de déficits pourrait précariser sa situation. Nous avons encore la liberté de choisir de protéger nos programmes sociaux. Les Québécois n’attendent pas de leurs élus fédéraux qu’ils importent des solutions de droite toutes faites. Les Québécois s’attendent plutôt à ce qu’ils livrent la marchandise concernant les 8 milliards de dollars qui dorment à Ottawa, qu’ils limitent une fois pour toutes le prétendu pouvoir fédéral de dépenser et qu’ils rééquilibrent l’espace fiscal afin que le Québec ait enfin accès à des revenus correspondant à ses responsabilités.

Si Maxime Bernier aspire à être à nouveau ministre et éventuellement chef de son parti, qu’il commence par livrer la marchandise à titre de député !

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