Les auteurs invités sont Louis Favreau, Lucie Fréchette et René Lachapelle
C’est en septembre 2008 que l’UQO recevait 375 personnes dans le cadre d’une conférence internationale sur les initiatives des communautés locales et sur le renouvellement des États sociaux au Sud comme au Nord. L’ouvrage Sortir du capitalisme : un new deal écologique et social et ces extraits s’inspirent de cette conférence. Dans la même veine, s’ouvrira, en septembre prochain à Lévis (les 22 et 23), une conférence internationale du mouvement coopératif lequel convie d’autres mouvements sur un sujet qui lui est très apparenté : Quel projet de société pour demain ? Coopératives, mutuelles et territoires. Enjeux, défis et alternatives ? L’air du temps de la crise globale du capitalisme appelle une réflexion nouvelle sur l’avenir que nous voulons bâtir. Voici donc quelques extraits de cet ouvrage.
Le 20e siècle a vu surgir un « new deal » entre le capitalisme et le mouvement ouvrier, ouvrant ainsi une série de compromis qui ont sorti les pays du Nord du capitalisme sauvage au bénéfice de régulations sociales, notamment la reconnaissance de la légitimité des mouvements sociaux : mouvement des travailleurs, organisations de producteurs agricoles, mouvement coopératif et mutualiste ainsi que des associations de consommateurs. La mobilisation de ces mouvements et les régulations mises en place ont permis de transformer la condition ouvrière en condition salariale permettant à tous les travailleurs de disposer d’une citoyenneté, avec les pleins droits que cela confère, et d’une protection sociale de base universelle.
Et si on allait vers un new deal écologique et social à l’échelle de la planète. Autrement dit, si le 20ième siècle d’« une nouvelle utopie, une sorte de New Deal écologique, d’une entente générale entre les États visant un développement durable mais cette fois-ci à l’échelle mondiale ». Tels sont les propos que tient depuis quelques années Alain Lipietz, économiste et chercheur au CNRS, député pendant 10 ans au Parlement européen et figure bien connue du Parti vert en France. Il ne suffit pas en effet d’agir localement et de penser globalement. Il faut aussi agir globalement. Un new deal écologique et social implique beaucoup de choses, comme l’annulation de la dette des pays les plus pauvres, le développement sans précédent d’un commerce international de produits écologiquement sains dont le commerce équitable n’est qu’une amorce, la protection de la biodiversité à l’échelle de la planète par un organisme international doté de pouvoirs afférents, la démocratisation de l’économie, son virage au vert, le renforcement des États sociaux, une solidarité internationale accrue, une lutte contre la concentration des activités économiques dans quelques grands centres urbains par le développement des économies des régions, etc. Il s’agit donc bien d’une action collective de longue durée. Le changement ne peut venir d’un seul coup. C’est là le défi de ce siècle.
Beaucoup de choses ont changé sur le plan international dans les deux dernières décennies : grandes transitions économiques, politiques, sociales et environnementales de la planète ; transformation des grandes organisations sociales nées ou reconstituées dans l’après-guerre, tels le mouvement syndical, le mouvement des agriculteurs et le mouvement coopératif ; émergence de nouveaux réseaux ou de nouvelles organisations : mouvement de la consommation responsable, économie solidaire et commerce équitable, réseaux de femmes dans les quartiers des bidonvilles du Sud, réseaux de développement local, etc. Sans compter l’internationalisation de l’action collective à travers l’expérience de la Marche mondiale des femmes, des Forums sociaux mondiaux et d’une multitude de réseaux initiés par la société civile. Les mouvements sociaux, à des degrés divers, comprennent aujourd’hui l’importance de renouveler leurs orientations et leurs stratégies de développement dans ce nouveau paysage national et international.
Malgré la déroute des projets de grande envergure des mouvements dits de libération nationale et de la mouvance socialiste et même si la mondialisation néolibérale représente indiscutablement une tendance forte et durable, le rapport des forces en présence n’est pas à sens unique pour autant. La conjoncture économique et politique internationale, très incertaine et très instable, a ouvert une brèche. Tous les mouvements ici au Québec ou ailleurs dans le monde que ce soit le mouvement coopératif, le mouvement des travailleurs (les syndicats), le mouvement des agriculteurs, le mouvement communautaire, le mouvement de la consommation responsable, le mouvement des femmes, le mouvement écologique… sont dans un processus obligé de renouvellement de leurs stratégies : pour leur propre avenir et pour augmenter en puissance une solidarité internationale qui s’impose de plus en plus face à la portée actuelle de l’interdépendance.
Pour bâtir un « new deal » écologique et social, il faut sortir du capitalisme
Un nouveau « new deal » écologique et social engage des actions sur plusieurs fronts : 1) un renouvellement des régulations à l’échelle internationale ; 2) un développement écologique où l’on accorde plus de place aux entreprises de caractère public et à propriété collective qu’à l’économie marchande dans des créneaux d’avenir, et tout particulièrement pour le développement d’une économie verte misant sur les énergies renouvelables et le maintien des écosystèmes ; 3) des mouvements sociaux qui convergent autour d’axes stratégiques communs ; 4) une redistribution des richesses par des impôts plus progressifs permettant d’offrir des services publics renouvelés ; etc.
À première vue, le projet paraît presque irréaliste. Parce qu’il suppose de bousculer fortement les pouvoirs établis. Parce que la plupart des entreprises s’en tiennent toujours aux plus bas salaires. Parce que les pouvoirs publics, sous la pression de puissants lobbies privés, s’engagent très peu dans le repartage des richesses et des revenus. Sans compter la force des multinationales qui veulent à tout prix maintenir le même modèle productif à l’échelle de la planète. Il y a donc des blocages majeurs. Mais n’a-t-on pas vu le mouvement ouvrier (syndicats, coopératives, partis politiques de gauche), dans la sortie de crise des années 1930, être capable, dans nombreux pays du Nord, d’imposer aux pouvoirs publics des demandes sociales incontournables qui ont donné naissance à ce « new deal » du 20e siècle et aux États sociaux qui l’ont porté ? Les grandes réformes ont été le produit de compromis entre groupes que ne poursuivaient pas les mêmes objectifs. Les États sociaux édifiés tout au long de 20e siècle ont donné leur pleine mesure dans la période dite des « Trente glorieuses » parce que d’un côté le mouvement ouvrier a su s’affirmer et négocier le partage de la richesse avec ses adversaires et, de l’autre les gouvernements et dirigeants politiques ont fini par s’ouvrir à la « question sociale ».
Ce qui suppose très clairement que les mouvements sociaux de toutes catégories se renforcent et s’insèrent davantage dans un mouvement citoyen international en émergence, c’est-à-dire, pour être concret, dans la dynamique sociale et politique des forums sociaux mondiaux et autres réseaux de ce type. Tentons ici d’explorer quelques pistes que pourrait emprunter une mondialisation équitable.
Suite demain sur OikosBlogue : Cinq pistes de sortie du capitalisme
On peut lire le texte complet (avec les références) sur le blogue de Louis Favreau
[...] Hier nous avons présenté sur OikosBlogue une introduction à ces extraits du nouvel ouvrage des auteurs : « Sortir du capitalisme : un new deal écologique et social ». Nous poursuivons aujourd’hui en présentant leurs cinq pistes de sortie du capitalisme. [...]
[...] This post was mentioned on Twitter by Jean Boileau. Jean Boileau said: Sortir du capitalisme : un new deal écologique et social;http://www.oikosblogue.com/?p=4001 [...]