La réunion au sommet du G20 approche et le Canada, encore une fois, prend le leadership de la réaction à une nouvelle gouvernance mondiale. Après son opposition farouche à une entente sur le climat, lors de la Conférence de Copenhague, le Canada s’oppose cette fois à une action commune de tous les pays pour une taxation des banques.
Lors de la rencontre préparatoire des ministres des Finances des pays du G20, qui se tenait à Washington il y a quelques semaines, les participants n’ont pas réussi à s’entendre sur un accord touchant la taxation du secteur financier, à l’origine de la crise économique mondiale. « Certains se sont prononcés en faveur, d’autres clairement contre », a souligné le ministre canadien, M. Flaherty, dont le pays préside actuellement le G7 et copréside le G20 avec la Corée du Sud, et qui a publiquement exprimé son opposition à cette taxe.
Plusieurs pays, dont les États-Unis, la France ou l’Allemagne, ont en revanche approuvé le principe de cette taxation, qui a fait l’objet d’une proposition du Fonds monétaire international à l’occasion de cette réunion du G20. « Que les pays adoptent ce genre de taxe, c’est une simple question d’équité », a estimé le secrétaire au Trésor américain, Timothy Geithner.
Mais le Canada a réussi à obtenir l’appui de plusieurs pays émergents. Le ministre brésilien des Finances, Guido Mantega, a exprimé des réticences à imposer des taxes dans des pays dont le secteur financier a été relativement épargné. « Je préfère freiner le risque en exigeant plus de fonds propres, ce qui est une manière de pénaliser les banques (…). La crise n’est pas provenue de nos systèmes financiers », a-t-il souligné.
De son côté, le Fonds monétaire international a proposé deux taxes, l’une s’appliquant à chaque institution financière en fonction de ses actifs, et en particulier des éléments risqués, et l’autre sur les profits et rémunérations. Le directeur général du Fonds monétaire international, (FMI) Dominique Strauss-Kahn, a plaidé mardi pour une « solution globale ». « Les solutions proposées par les différents pays sont intéressantes et souvent assez bien adaptées aux spécificités des pays », a-t-il dit récemment, lors d’une allocution à Bucarest. Toutefois, a-t-il ajouté, « ces solutions sont parfois, sinon totalement, du moins partiellement incompatibles entre elles, et donc je pense que tout ça devra être révisé lorsqu’une décision collective sera prise ».
Le FMI a de nombreuses fois insisté auprès du G20 pour que cette taxation soit coordonnée, afin d’éviter que les banques puissent l’éviter en choisissant de s’implanter dans un pays plutôt qu’un autre. Le FMI remettra au groupe des pays riches et émergents du G20 ses recommandations sur une taxe permettant de « récupérer l’argent public employé pour soutenir les banques et autres institutions financières durant la crise », selon ses termes.
Cette action collective constitue un précédent pour un renouvellement de la gouvernance mondiale. Elle pourrait représenter une première forme, même si elle est assez éloignée de l’idée de la taxe Tobin sur les transactions financières, d’une taxation mondiale. Les banques canadiennes ne devraient pas être épargnées par cette taxation. Si elles ont été épargnées par la frénésie spéculative des dernières années c’est en raison de la réglementation canadienne qui légalise la structure oligopolistique du système bancaire : les banques canadiennes n’ont pas besoin d’innover financièrement pour engranger des profits pharamineux; elles nous volent tout à fait légalement.
C’est le monde financier dans son ensemble qui doit absolument faire l’objet d’une nouvelle régulation par les pouvoirs publics. Il faut briser cette apparente immunité qui fait en sorte que les citoyens et les gouvernements semblent avoir perdu tout contrôle sur la capacité de nuisance de la finance globale. Les banques canadiennes ne peuvent pas, par principe, y échapper : leurs actifs, profits et rémunérations doivent être taxés pour le bien commun.
[...] Original post by Gilles Bourque [...]