Dès 2008, dans un rapport du Financial Stability Forum présenté au représentants du G7 par Mario Draghi, gouverneur de la banque centrale d’Italie, il était clairement établi que les causes profondes de la crise financière, en dehors des pratiques douteuses des subprimes, se trouvaient dans la gouvernance des grandes institutions financières qui, trop souvent, échappent à la surveillance publique. Parmi les trois problèmes spécifiques mentionnés par M. Draghi, il y avait « Les déficiences des pratique de surveillance, et notamment une confiance excessive et mal placée dans les agences de notation financière ».
Les trois agences de notation mondiales sont des organismes privés, totalement indépendants des régulateurs et autres gendarmes boursiers : deux groupes américains, Standard & Poor’s et Moody’s, et un acteur à capitaux français, Fitch. A elles trois, ces agences contrôlent 90% du marché mondial : 80% pour le duo Standard-Moody’s et 14% pour Fitch.
Pendant les moments les plus chauds de la crise de la dette grecque, la Commission européenne appelait les agences de notation à agir de manière « responsable », après la décision de Standard & Poor’s de diminuer la note de la Grèce. « Les marchés et les décideurs accordent aux agences de notation beaucoup plus d’influence qu’elles n’en méritent. Elles ne sont que des indicateurs parmi d’autres, avec leurs risques d’erreur et d’incompétence. » Étant donné le fonctionnement actuel des marchés financiers, libéralisé depuis trois décennies par les bons soins des décideurs publics, ces agences ont un pouvoir excessifs. Elles ont un pouvoir d’influence exagéré sur les centaines de milliers de petits décideurs, par exemple les gestionnaires et fiduciaires de caisses de retraites, qui ont peu de marge de manœuvre face aux décisions de ces agences.
Lors de ses discussions pour réglementer la profession, le Parlement européen avait évoqué la création d’une agence européenne de notation parapublique. C’est exactement ce qu’il faudrait faire, et le plus tôt possible, puisque leur rôle est trop important pour être laissé au seul marché.
L’équipe de journalistes économiques à la chaîne de Radio-Canada ont mis en ligne un dossier sur ce sujet sur leur site. Il vaut le détour pour en savoir plus sur le rôle et les impacts de ces donneurs de leçons qui, parmi tous leurs défauts, ont celui de n’être responsables que devant leurs actionnaires, le pire de tous. Devant le laisser-faire qui a dominé ces trente dernières années, il est plus que temps de remettre à leur place les institutions financières et le système d’autorégulation qu’elles ont mis en place, qui ont failli faire effondrer l’ensemble du système socioéconomique, pour les remettre au service de ce dernier.
Discussion
Pas de commentaire pour “Les agences de notation doivent être réformées”